“C’est en explorant des microcosmes que, souvent, on assiste à l’émergence de cadre plus vastes. Il y a relativement peu de choses qui a été écrit sur l’histoire juive de La Haye, dont fait partie la station balnéaire de Scheveningen. En compagnie de Hanneke Verbeek, je me suis appuyé sur l’histoire de Harstenhoekweg comme point de depart pour notre recherché sur ce sujet. C’était une rue où de nombreux Juifs, dont la plupart était originaire d’Europe de l’Est, ont vécu, Presque depuis que cette rue a été construite, au tout début du siècle précédent[1].

Le Professeur Wim Willems enseigne l’Histoire à l’Université de Leiden et ses recherches se concentrent sur l’histoire de La Haye.

“Au cours de la Première Guerre Mondiale, beaucoup de réfugiés juifs se sont enfuis de Belgique vers les Pays-Bas, qui demeuraient un pays neutre. Cette immigration a conduit à une augmentation de la population juive de Scheveningen. Ces immigrés étaient principalement des Juifs européens d’Antwerp, don’t beaucoup étaient impliqués dans les métiers du diamant. Après la guerre, un certain nombre d’entre eux sont retournés en Belgique, mais certains sont restés et ont requis la naturalisation en tant que citoyens hollandais.

“Une infrastructure sociale et religieuse juive s’est lentement créé. Cette communauté est un exemple très intéressant de l’intégration réussie des immigrés dans la société néerlandaise. Puis, je me suis ensuite demandé si on pouvait topographier la création et le développement de cette communauté.

“La communauté juiive d’Europe de l’Est à Scheveningen était très différente, sur le plan sociologique, de la petite communauté juive d’Europe de l’Est présente à Rotterdam, par exemple. La communauté de Rotterdam était composée de Juifs arrives dans cette ville portuaire en partance pour les Etats-Unis, mais qui ont finalement décidé de rester. Ils ont fondé une communauté juive d’Europe de l’Est voisine de la communauté juive hollandaise de Rotterdam, plus vaste et plus ancienne.

“Notre recherché s’est focalisée sur tous les Juifs qui ont toujours vécu sur (la rue) Harstenhoekweg, tout au long des années qui vont jusqu’en 1941. C’est la toute dernière année où on peut voir qui vivait là, à partir des informations trouvées dans les archives municipals. Il s’avère que, parmi les 455 familles juives qui vivaient ou avaient vécu dans cette rue spécifique, on dénombre un total d’approximativement 1.400 personnes.

“Après la Shoah, il ne restait plus qu’une communauté juive décimée, à Scheveningen. Au cours de l’été, elle était le lieu de passage d’un afflux temporaire de nombreux touristes juifs de Belgique, qui venaient se détendre dans la cite balnéaire. Durant de nombreuses années, il subsistait un restaurant cacher au premier étage de la synagogue d’Europe de l’Est, sur Harstenhoekweg. Cette synagogue, fondée en 1926, a été construite dans un bâtiment qui avait, auparavant, été une sale de danse. Ainsi, une infrastructure religieuse juive permanente a pu voir le jour à Scheveningen.

La communauté juive s’est lentement développée après le tournant du 20ème siècle. De nombreuses organisations se sont établies,y compris certaines dans le domaine de la musique et du spectacle. Des mouvements de jeunesse, comme les scouts, un club théâtral, des organisations sionistes et religieuses ont été fondés. Des boutiques cacher ont ouvert dans le quartier.

Une facette très importante sur laquelle je souhaitais enquêter était celle de l’interaction sociale entre la communauté et les autres. Beaucoup se concentraient sur la vie de famille, parce qu’ils devaient travailler si durement. Certains se rendaient, les jours de semaine, au marché diamantaire d’amsterdam par le train. Avant la Seconde guerre mondiale, ce marché était essentiellement juif, jusqu’à un certain point. On a retrouvé des cartes de membres de certains Juifs de Scheveningen à Amsterdam. D’autres travaillaient au bureau de change de Rotterdam.

“Nous avons découverts que ces immigrés qui venaient, par exemple, de Cracovie ou de Lvov dans leur majorité entretenaient, des relations avec des gens de la même ville ou de la même region qu’eux. Pour autant q’uon a pu le verifier, ils parlaient Yiddish ou allemande entre eux ouà la maison. Beacoup de ceux qui demeuraient à Scheviningen, après la Première Guerre Mondiale, parlaient aussi néerlandais.

“Nous avons entrepris des périples vers des lieux en Pologne et en Ukraine, dans l’anciennne Galicie, d’où provenaient de nombreuses familles. Nous n’avons pas trouvé trace des affaires les concernant, mais, au moins, leur environnement original nous est apparu plus familier. A l’exception de Cracovie, il y a eu très peu de recherches ou de choses faites, à propos de la reconstruction de l’histoire des Juifs d’ancienne Galicie.

“Nous avons aussi parlé à un grand nombre de survivants de la Shoah aux Pays-Bas, en Angleterre, en Israël et en Belgique. Ils nous ont raconté que, dans les écoles non-juives qu’ils fréquentaient, les vendredi après-midi, il y avait une cloche qui sonnait –la fameuse cloche juive. Les élèves juifs savaient ainsi qu’on leur permettait de quitter l’école plus tôt et de rentrer à la maison à temps pour Shabbat.

“Un autre exemple de pluralisme religieux concernait les vacances de Sinterklaas, en Hollande. Tous les enfants recevaient du chocolat sous forme d’alphabet – et on leur offrait les initiales spécifiques de leur prénom – et les enfants juifs recevaient des lettres en chocolat cacher. Pour Noël, on distribuait des patisseries et sucreries fantaisie aux enfants hollandais  et des patisseries et sucreries cacher aux enfants juifs”.

Le Professeur Willems se résume : “Nous avons retrouvé bien plus d’information que nous ne l’espérions, lorsque nous avons commence à mener cette recherché sur l’histoire de cette communauté juive. Nous aimerions nous assurer que des documents et matériaux historiques, qui se trouvent, actuellement, en possession de personnes privies, ne se perdent pas. Il n’existe pas une seule rue de Scheviningen qui ait pris le nom d’une personnalité juive. Il n’y a aucun monument pour honorer la mémoire des nombreuses personnes assassinées qui vivaient dans cette zone. Si on parvient à diffuser bien plus la conscience de l’histoire de la communauté juive de Scheviningen, de tells choses pourraient devenir possible”.

Manfred Gerstenfeld interviewe le Professeur Wim Willems

Le Dr. Manfred Gerstenfeld est membre du Conseil d’Administration du Centre des Affaires Publiques de Jérusalem, qu’il a présidé pendant 12 ans. Il a publié plus de 20 ouvrages. Plusieurs d’entre eux traitent d’anti-israélisme et d’antisémitisme.

Adaptation : Marc Brzustowski.

[1] D’ici la fin 2015, l’éditeurr Bert Bakker publiera leur livre : Wim Willems and Hanneke Verbeek, ‘Hier woonden wij’. Hoe een stad zijn Joodse verleden herontdekt.

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