S’il y avait le moindre doute quant aux conclusions de la commission Turkel – nommée par le gouvernement – sur le blocus de Gaza et l’arraisonnement de la flottille Mavi Marmara, le 31 mai dernier, il a été balayé par la plupart des membres du panel, mercredi 13 octobre.Ces derniers ont défendu le gouvernement contre les critiques sur sa politique de fermeture émises par les groupes de défense des droits de l’Homme, appelés à témoigner. Parmi les organisations présentes : B’Tselem (Centre d’information israélien pour les droits de l’Homme dans les territoires palestiniens), Médecins pour les droits de l’Homme-Israël, et Gisha (Centre légal pour la Liberté de Mouvement).

Quant aux deux Arabes israéliens censés venir témoigner devant la commission, plus tard dans la journée, ils ne se sont pas présentés et n’ont pas prévenu le panel de leur absence. La commission a publié un communiqué pour expliquer qu’elle examinerait les mesures à prendre à l’encontre de ces deux témoins.

A l’heure où ces lignes sont publiées, les raisons pour lesquelles Mohammed Zidan, originaire de Kafr Manda en Galilée occidentale, et Hamad Abou Dabus de Rahat, cité bédouine du Néguev, ne se sont pas rendus devant la commission étaient encore inconnues.

Les thèses de B’Tselem au pilori

Première appelée à témoigner : la directrice générale de B’Tselem Jessica Montell. Le ton de l’audience est très vite donné lorsqu’elle utilise le mot « siège » pour décrire la fermeture de Gaza par le gouvernement, une politique instaurée en 2007 dans le sillage de la prise de contrôle de la bande côtière par le Hamas.

« Pourquoi utilisez-vous le terme ‘siège’ plutôt que ‘fermeture' », demande le général de division, Amos Horev, membre du panel. « Les mots sont importants. La sémantique est importante. »

Reouven Merhav, ancien directeur général au ministère des Affaires étrangères, s’adresse alors à Montell. Il lui demande si elle est capable de différencier les civils de Gaza tués pour avoir servi de boucliers humains aux terroristes qui visaient des cibles israéliennes, et ceux qui ont trouvé le mort dans d’autres circonstances. « Soit vous présentez des chiffres, soit vous reconnaissez qu’il y a des lacunes dans vos informations », lui lance-t-il.

Montell a commencé par présenter le contexte qui a conduit à la fermeture de Gaza. Avant d’en venir au point de vue de B’Tselem : même après le désengagement de 2005, Israël restait responsable des Palestiniens de Gaza, puisqu’il continuait de contrôler des aspects majeurs de leur existence, comme l’accès au territoire (terre, mer ou air). Puis elle en vient à donner des exemples des effets de cette politique de fermeture sur l’économie gazaouie.

Montell accuse l’Etat hébreu d’avoir restreint la liberté de mouvement des Palestiniens en augmentant la zone qui leur est interdite à la circulation, le long de la frontière israélienne : de 50 mètres au moment des accords d’Oslo, elle est passée à 300 m aujourd’hui. Et d’ajouter que selon les chiffres de l’ONU, Israël maintient même une zone stricte d’interdiction de 500 m depuis la frontière et une zone moins stricte de 1500 m.

Horev intervient alors : « Il y a des raisons pour l’expansion de cette zone. Ce n’est pas une question de texte (en référence aux Accords d’Oslo – ndlr). Vous présentez des faits qui sont sortis du contexte de la réalité. Vous ignorez cela. »

Et Merhav de poursuivre : « Vous devriez vous poser des questions avant de faire de telles déclarations. La situation a changé depuis qu’Arafat a signé les Accords d’Oslo. Le Hamas n’est pas un grand supporter d’Oslo. Peut-être cette expansion est-elle due aux tirs de mortier. »

Lorsqu’un autre membre du panel lui demande d’arrêter de présenter le contexte et d’en arriver aux faits, Montell répond : « Ce sont les faits. Nous sommes une organisation pour les droits de l’Homme. »

Merhav lui réplique alors : « Vous ne nous donnez pas de contexte. Vous vous contentez de nous soumettre vos suppositions. »

Selon Ken Watkin, observateur canadien de la commission, « si Montell veut prouver que la politique de fermeture est une punition collective pour la population civile, elle choisit le mauvais exemple. Dans le cas de cette zone d’interdiction, il est clair qu’Israël est motivé par des raisons de sécurité, et non par le désir de punir. »

« Vous vivez dans une bulle »

Est alors venu le tour de l’avocat de Gisha, Tamar Feldman, qui a elle aussi présenté les motivations de l’organisation qu’il représente.
A savoir : insister sur le fait qu’Israël doit continuer à être responsable du bien-être de la population de Gaza.

D’un point de vue politique et légal, le blocus naval annoncé par Israël en janvier 2009 n’est rien de plus qu’une extension de la politique de fermeture introduite en 2007, après le pilonnage de centres civils israéliens par des terroristes palestiniens. Mais selon Feldman, ce blocus est en réalité en vigueur depuis qu’Israël a occupé Gaza en 1967. Le Manuel de San Remo, qui fournit les bases juridiques d’un blocus naval, ne s’applique pas à l’action d’Israël à Gaza, estime-t-il.

Pendant son témoignage, Feldman a accusé le gouvernement de refuser de rendre publics des documents qui exposent sa politique de fermeture, en particulier sur la façon dont la nourriture est livrée, les aliments autorisés et les critères pour les sélectionner.

« L’économie de Gaza est gérée sans transparence », martèle Feldman. Merhav conteste alors cette déclaration : « Qui dirige l’économie de Gaza ? Vous en parlez comme si c’était une colonie israélienne. Votre vocabulaire doit être très précis. » Horev ajoute : « Vous ne pouvez ignorer la réalité. Vous semblez vivre dans une bulle. »

Et le général de division de rejeter l’affirmation de Gisha selon laquelle Israël mène une guerre économique contre la population civile de Gaza, sous forme de punition collective. « Il n’est tout simplement pas possible d’imposer des sanctions économiques sans que la population civile ne soit touchée », explique-t-il. « Prenez l’Afrique du Sud, par exemple. »

En clair, B’Tselem n’a pas convaincu les membres du panel. Turkel, à la tête de la commission et dont le vote sera prépondérant en cas d’impasse entre les quatre membres, a même fait savoir à Montell : « Je lis vos rapports de temps en temps, et je dois dire que je m’interroge sur vos sources. Je ne suis pas sûr de la fiabilité de vos informations. »

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