En 2004, la rampe de terre qui relie le mur Occidental à la Porte des Maghrébins et mène au Mont du Temple s’était effondrée. Depuis, des querelles politiques, juridiques et archéologiques ont régulièrement éclaté au sujet de son remplacement.
Pas plus tard que la semaine dernière, une nouvelle altercation a opposé Israël à plusieurs diplomates arabes accusés par l’Etat juif d’avoir fomenté une embuscade diplomatique à son encontre, lors d’une réunion annuelle de l’Organisation des Nations unies pour l’éducation, la science et la culture (UNESCO). Il faut dire que l’UNESCO a adopté une résolution présentée par la Jordanie et d’autres Etats arabes condamnant Israël pour les travaux de construction entrepris sur la Porte des Maghrébins.

La décision de l’institution, qui n’a pas encore été officiellement entérinée et reste sujette à changement, a été prise lors d’une conférence à Paris. La rampe, une structure purement utilitaire mais attenante à un site saint pour le judaïsme et l’islam, constitue l’un des projets, sujet à vive polémique.

Ces dernières années, la lutte pour le contrôle de Jérusalem a été centrée sur l’acquisition de biens par les Israéliens qui investissent les quartiers de la partie orientale de la ville, annexée après la guerre des Six-Jours. Mais la controverse autour des lieux saints de la capitale a, par le passé, fourni une plate-forme pour le déchaînement de violence. Deux cas emblématiques : en 1996 quand Israël autorise l’ouverture de tunnels sous le mur Occidental, et en 2000 avec la visite du Premier ministre Ariel Sharon sur le Mont du Temple.

« Côté palestinien, l’attention se porte aujourd’hui sur d’autres questions que les lieux saints »>Article original, mais la situation demeure assez tendue et une mobilisation populaire reste toujours possible », explique Nathan Brown, expert des questions moyen-orientales à l’Université George Washington, aux États-Unis. Et de prévenir : « Une simple étincelle pourrait déclencher des explosions de violence. »

Le petit pont de bois…

Les pourparlers de paix entre Israël et les Palestiniens sont au point mort depuis fin 2008. Et les efforts américains pour relancer les discussions se sont tous soldés par un cuisant échec. Pour bon nombre d’analystes, la course engagée par les Palestiniens pour obtenir reconnaissance d’un Etat indépendant aux Nations unies pourrait attiser les frustrations des Palestiniens et servir de terreau pour le déclenchement d’une troisième Intifada. Si Israël aspire à conserver Jérusalem, comme la capitale unifiée de l’Etat juif, les Palestiniens, de leur côté, souhaitent que la moitié orientale de la Ville sainte devienne la capitale de leur futur Etat. Unique accès au Mont du Temple sous contrôle direct israélien, la Porte des Maghrébins demeure un sujet épineux.

Israël a construit un pont temporaire en bois, un an après l’effondrement de la rampe. Mais, l’Etat hébreu espère le remplacer par une structure permanente plus grande. Une initiative qui inquiète les Palestiniens et les autorités jordaniennes qui administraient Jérusalem-Est jusqu’en 1967 et conservent toujours un droit de regard sur les affaires de la ville.

Israël a tenté, en vain, de bâtir un nouveau pont en 2007, mais les travaux ont été très vite interrompus. Pourtant, la structure aurait permis de mettre en place une plus longue rampe, assez large et assez solide, non seulement pour transporter des personnes, mais également des véhicules de police nécessaires pour réprimer les troubles qui ont éclaté par le passé au-dessus du Mont du Temple.

Maintenir l’intégrité du site

L’UNESCO évoque régulièrement le dossier de Jérusalem et de sa Porte des Maghrébins lors de ses réunions annuelles du Comité du patrimoine mondial. Jusqu’à cette année, le comité, un simple organe technique, a réussi à accoucher d’une décision par consensus. « L’UNESCO a tenté de proposer une ébauche qui puisse plaire à tout le monde. Ce qui permettrait de maintenir l’intégrité du site », a déclaré un responsable proche du dossier.

Pourtant, selon Nimrod Barkan, ambassadeur israélien à l’UNESCO, la Jordanie qui avait finalement approuvé le projet israélien, a retourné sa veste et donné son aval à une déclaration, soumise par plusieurs pays arabes, condamnant Israël. Il a affirmé au quotidien Haaretz que le Royaume avait bien « menti » à l’Etat hébreu. Ni Barkan, ni le porte-parole du ministère jordanien des Affaires étrangères, Mohammad Kayed, n’ont souhaité s’exprimer sur la question. Yigal Palmor, porte-parole du ministère des Affaires étrangères israélien, a également refusé de commenter l’affaire.

« Le processus diplomatique qui pourrait conduire à une résolution de l’UNESCO sur Jérusalem et ses antiquités est toujours en cours. Pour l’heure, nous préférons ne pas nous exprimer publiquement sur la question. Nous croyons simplement que l’UNESCO devrait reconnaître nos continuels efforts pour travailler dans un esprit de coopération », écrit Palmor dans un courriel.

Pour Itzhak Reiter, affilié à l’Institut de Jérusalem et à l’institut académique d’Ashkelon, mais également expert sur le conflit entourant les lieux saints, les Israéliens souhaitent simplement disposer de davantage de place pour les fidèles au Kotel. Ce qui constitue leur motivation principale pour la construction de ce pont.

Le Premier ministre, Binyamin Netanyahou, doit subir, d’un côté, les pressions des experts affirmant que le projet de pont est inutile, et, de l’autre, celles de figures nationalistes et religieuses qui soutiennent sa construction. Néanmoins, Reiter comprend les objections de la partie musulmane. « Si l’Etat hébreu construit un grand pont, il sera plus facile pour les Israéliens de pénétrer dans le Dôme du Rocher. Pour les Palestiniens, il s’agit d’une manifestation de la domination et de l’occupation israélienne », souligne-t-il.

Griefs contre le Waqf

La Porte des Maghrébins n’est pas le seul projet de construction prévu dans des zones religieusement sensibles. En effet, Israël apporte sa touche finale à un réseau de tunnels partant du mur Occidental, passant sous les murs de la Vieille Ville et traversant le quartier arabe de Silwan. Une zone également connue sous le nom de Cité de David, une petite enclave juive dans la partie arabe de Jérusalem. Les tunnels seront ainsi construits au-dessus de ruines datant de l’époque biblique.

Un autre projet prévoit la construction de bureaux mis à disposition du grand rabbin du Kotel ainsi que d’une clinique médicale d’urgence et une station de police au nord de la place du Mur occidental. Mais Israël multiplie également les griefs à l’égard du comportement de la partie arabe sur ce dossier. Depuis 1967, le Waqf, une organisation islamique, règne sur le Mont du Temple. La police israélienne n’y pénètre qu’en cas d’émeute. En 1996, le Waqf a bien failli faire écrouler les murailles du Mont du Temple en aménageant la mosquée Al-Marwani, une immense structure souterraine, sous la mosquée Al-Aqsa. Les travaux furent financés et organisés par l’Autorité palestinienne, les autorités religieuses islamiques de Jérusalem et les Islamistes conduits par Sheikh Raed Salah. Pour les Israéliens, ces travaux ont servi d’excuse aux Palestiniens pour détruire des milliers de pièces archéologiques prouvant que le Mont du Temple était sacré pour les Juifs et les Chrétiens bien avant que l’Islam ne s’installe à Jérusalem.

Selon Reiter de l’Institut de Jérusalem, les autorités israéliennes pourraient apaiser les craintes des Arabes en les associant au processus de planification. Par le passé, le gouvernement jordanien avait déjà engagé un avocat pour le représenter devant les autorités municipales suite à un litige. Mais Brown de l’Université George Washington reste sceptique. « En l’absence de cadre politique plus large, difficile d’imaginer un dialogue constructif », souligne-t-il. « La méfiance demeure si profonde que tout changement est susceptible d’être considéré comme illégitime et suspect. »

DAVID ROSENBERG, THE MEDIA LINE

JPost.com

La rédaction de JForum, retirera d'office tout commentaire antisémite, raciste, diffamatoire ou injurieux, ou qui contrevient à la morale juive.

S’abonner
Notification pour
guest

Ce site utilise Akismet pour réduire les indésirables. En savoir plus sur comment les données de vos commentaires sont utilisées.

0 Commentaires
Commentaires en ligne
Afficher tous les commentaires