Le bras-de-fer entre le procureur de New York et DSK n’est pas encore terminé que l’ex-directeur du FMI est accusé, en France, de tentative de viol par Tristane Banon. L’avocat de la jeune femme affirme avoir des éléments matériels : ce ne sera pas « parole contre parole ».

Plusieurs éléments fragilisent le dépôt de plainte, effectué le mardi 5 juillet 2011, par l’avocat de Tristane Banon, à l’encontre de DSK, dans les domaines suivants.

1. La date de la plainte : huit ans et demi après les faits qui remonteraient au 11 février 2003 (selon la version donnée par Tristane Banon à L’Express, le 4 juillet 2011), voire en 2002, comme l’a indiqué le biographe de DSK, Michel Taubmann.

2. Le contexte actuel (au 4 juillet 2011) dans lequel intervient la plainte : l’annonce de la plainte a été faite lundi 4 juillet 2011, soit deux jours après que l’accusation contre DSK se délite à New York, l’avocat espérant, probablement jusque-là, « surfer sur la vague » menant DSK à un procès pour viol.

3. La motivation de la plainte évoquée implicitement dans l’interview de Tristane Banon, publiée par l’Express, le 4 juillet 2011, est très éloquente : « Si les choses ne se sont pas passées là-bas comme elles nous étaient présentées (à l’Hôtel Sofitel de New York, le 14 mai 2011), il me faudra donc prouver davantage qu’il m’a fait du mal à moi. Sinon, je vais encore me faire traiter d’affabulatrice. »

4. L’objet de la rencontre entre DSK et Tristane Banon, dans un lieu privé, le 11 février 2003, n’est pas très précis : après une première interview à l’Assemblée nationale, la journaliste stagiaire souhaite apporter des compléments d’information pour alimenter un essai – Erreurs avouées – sur les politiques et personnalités du show-business.

5. Le lieu des faits est plutôt vague : le 2e rendez-vous a lieu « entre Montparnasse et l’Assemblée nationale, dans une rue proche du boulevard des Invalides… », confie l’intéressée à l’Express, le 4 juillet 2011 ; cet appartement ne serait ni le domicile de l’ancien ministre, ni sa permanence.

6. Les conditions de l’entretien sont au moins ambiguës et variables de la part de la journaliste stagiaire :

– En 2007, Tristane Banon avait déclaré : « J’ai posé le magnétophone tout de suite pour enregistrer, il a voulu que je lui tienne la main pour répondre, parce qu’il m’a dit ‘je n’y arriverai pas si vous ne me tenez pas la main’, et puis après la main, c’est passé au bras, et c’est passé un peu plus loin. »

– Le 4 juillet 2011, Tristane Banon déclare à propos de DSK : « Il a voulu qu’on aille sur le canapé, puis que je lui tienne la main pour répondre. »

7. Les circonstances du début de l’éventuel dérapage de l’entretien ne font pas état d’immobilisation ou de violence manifeste : « Il a arrêté le dictaphone, m’a attrapé la main puis le bras, je lui ai demandé de me lâcher, et c’est de là qu’est partie la bagarre. »

8. Les circonstances de la suite de l’éventuel dérapage ne permettent pas de retenir une qualification de tentative de viol, mais au plus de tentative d’agression sexuelle :

– La journaliste dit s’être battue au sol avec le politique « pendant plusieurs minutes ».
– Elle se retrouve, raconte-t-elle, le soutien-gorge déchiré.
– Après être parvenue à se dégager, la jeune femme s’enfuit et se réfugie dans sa voiture, d’où elle appelle sa mère.

9. Lorsqu’elle rejoint sa voiture, Tristane Banon dit avoir été contrariée par le fait d’avoir trouvé un PV sur sa voiture pour dépassement d’heure : a-t-on l’esprit apte à se préoccuper d’un PV de stationnement au-delà de l’heure prévue après une tentative de viol ?
 
10. La véracité et la trace de SMS qui auraient été envoyés par DSK à la journaliste stagiaire ne sont pas, pour l’instant, apportées : Strauss-Kahn « m’a envoyé tout de suite un texto en disant « alors je vous fais peur ?’, d’un air un peu provocateur … »>Article original et après il a pas arrêté de m’envoyer des SMS » .

11. Le ton badin utilisé à l’émission de Thierry Ardisson, en 2007, parlant alors de quelqu’un qui lui aurait sauté dessus au cours d’une interview quatre ans plus tôt dont le nom (de DSK) a été bipé.

12. L’absence de dépôt de plainte de Tristane Banon en 2007, après sa déclaration sur le site Agoravox confirmant qu’elle parlait bien de DSK sur le plateau de Thierry Ardisson : le directeur du FMI menaçant de poursuivre « avec détermination » quiconque propagerait des « rumeurs » …

13. La qualification des faits, s’ils sont prouvés, correspondraient davantage à une tentative d’agression qu’à une tentative de viol :

– une personne qui se plaint d’attouchements contraints sur les parties sexuelles du corps serait victime d’une agression sexuelle,
–  le viol (ou la tentative de viol) se caractérise par un acte (ou une tentative d’acte) de pénétration sexuelle non consenti, quel qu’il soit ;

14. L’information de différentes personnes, en 2003, ne rend pas le récit des faits véridique : que Tristane Banon ait fait part de cette éventuelle « agression sexuelle » à un « homme de télévision connu », à « un proche » qui aurait rapporté les faits à des journalistes, à sa mère ou à un leader du Parti socialiste ne sont pas des présomptions de preuves en soi.

Conclusion : la décision du Parquet d’ouvrir une enquête préliminaire confiée à la Brigade de répression de la délinquance contre la personne (BRDP) ne préjuge pas du sort qui sera réservée à cette plainte.

Comme toute personne déclarant avoir subi des violences, Tristane Banon est présumée victime, de même que la personne accusée, DSK, est présumée innocente.

Si les faits relatés sont établis (ce qui n’est qu’une hypothèse), le Parquet devrait alors les qualifier, soit de tentative d’agression (prescrite au bout de trois ans, depuis au moins cinq ans et demi, donc), soit de tentative de viol (non prescrite à ce jour), auquel cas un juge d’instruction pourrait, éventuellement, être désigné pour instruire une possible affaire (et rendre un non lieu, par exemple, en cas de défaut de preuve des faits avancés).

N’oublions pas que, parallèlement, les avocats de DSK s’apprêtent, au vu de la plainte de Tristane Banon, à déposer, à leur tour, une plainte pour « dénonciation calomnieuse ».

Le schéma le plus probable est que l’enquête préliminaire se termine par un non lieu, sans saisine d’un juge d’instruction par le Parquet, en raison de la prescription de trois ans, s’appliquant à d’éventuels faits de tentative d’agression sexuelle qui se seraient produits en 2003 (et non de tentative de viol, comme relaté au § 13). 

André Sillam

Le Nouvel Obs.com 


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bernard

Dans ces affaires, le prévenu est PRESUME INNOCENT tant qu’il n’est pas condamné. Tout le monde est d’accord sur ce point.
Mais alors, réciproquement, le plaignant n’est-il pas présumé menteur?

Jmnpsg

Est-ce que la police à vérifier les appels téléphonique passés par T.Banon ? Qui tire les ficelles ?

Armand Maruani

Franchement s’il y avait eu tentative de viol , c’est chez Ardisson qu’on va faire des confidences autour d’une table où tout le monde se marre , et 4ans aprés ? Si elle avait été si marquée et choquée que celà , c’est dans la seconde qu’elle aurait dû porter plainte . Je trouve cette attitude pour le moins étrange.