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La parole antisémite s’est libérée. Et les opinions au sein de la société française? Il y a eu le double d’actes antisémites entre 2004 et 2014 que lors de la précédente décennie. Le «think tank» Fondapol, dirigé par le professeur de Sciences Po Paris Dominique Reynié, a mené l’enquête avec l’institut de sondage Ifop.

Dominique Reynié tire la sonnette d’alarme: «Le préjugé antisémite amène, d’une manière générale, le développement des opinions racistes. C’est très lié. La préférence pour un système autoritaire, pour la fermeture, pour le rétablissement de la peine de mort est un système de valeurs qui féconde l’antisémitisme et le racisme. Et qui s’oppose à des systèmes ouverts libéraux et démocratiques.»

Quels sont les nouveaux visages de l’antisémitisme que met en évidence votre enquête?

Il y a d’autre points d’incandescence dans notre double enquête. Qui nous permet de confirmer ou infirmer certaines hypothèses. Ils se situent autour du Front national (FN) et de Marine le Pen, du monde musulman en France, du Front de Gauche et Jean-Luc Mélenchon et du Web.

Que dit votre enquête sur les électeurs du FN?

Il met fin à l’idée que ce parti s’est normalisé. Les résultats sont aux antipodes de ce que l’on raconte. Ce parti mobilise de manière significative des électeurs qui refusent d’inclure dans le corps de la nation des gens issus d’une autre communauté. Ils sont ceux qui disent le plus fortement qu’un Français juif n’est pas un Français comme les autres. Ils ont le même rejet envers les musulmans.

Et le monde musulman ?

Nous avons investigué le niveau d’antisémitisme au sein d’une population française qui se définit comme issue d’une famille musulmane. On remarque que le niveau des préjugés antisémites augmente en fonction du degré de pratique religieuse.

Et avec un groupe de catholiques pratiquants?

Nous l’avons aussi testé. Et l’antisémitisme chez les catholiques est légèrement plus élevé que la moyenne.

Pourquoi et quel résultat pour les électeurs du Front de Gauche?

Il y a toujours eu des formes d’antisémitisme à l’extrême gauche. Cela ne se vérifie pas chez les électeurs de Jean-Luc Mélenchon. Son discours d’universalisme républicain n’attire pas à lui cet électorat et, quelque part, cela le condamne à ne pas compter… On le constate en Europe, les partis qui ont un discours de contestation sociale font des scores entre 5 et 15%. Ceux qui y ajoutent le carburant de la détestation ou du refus de l’immigration gagnent des points et montent à des niveaux entre 15 et 25%.

Et le Web, quel rôle joue-t-il ?

Il y en a deux. On constate que le Web institutionnel – sites de journaux, etc. – propage des idées qui sont en phase avec le reste de la société. Leurs utilisateurs ne se démarquent pas particulièrement. Par contre, chez les utilisateurs des sites de partage de vidéos, de blogs et de forums, les préjugés antisémites augmentent fortement. C’est un lieu idéal à l’activisme. On l’a vu notamment dans tout ce qui a touché à l’affaire Dieudonné.
(Newsnet)

Créé: 14.11.2014, 14h13.

Interview: Xavier Alonso, Paris. Mis à jour le 14.11.2014

[24heures.chArticle original

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SOCIÉTÉ. Survivances d’antisémitisme en France

Une étude de la fondation pour l’innovation politique révèle que les préjugés antisémites sont encore bien présents en France. Et pas seulement du côté de l’extrême-droite.

Un Français juif est un Français comme les autres pour 84 % de la population française. Photo R.L./Julio Pelaez

Où en est l’antisémitisme en France ? Peut-on parler d’un regain quand le nombre des agressions antisémites a été multiplié par deux entre 2013 et 2014 ? Quel rôle joue le FN ? Quelle responsabilité pour la population musulmane ? Pour répondre à ces questions sensibles, la Fondation pour l’innovation politique (Fondapol) a lancé un travail inédit reposant sur deux enquêtes d’opinion réalisées par l’IFOP.

L’une portant sur un échantillon de 1 005 personnes représentatif des Français âgés de 16 ans et plus et l’autre sur un groupe de 575 personnes déclarant être nées dans une famille de religion musulmane.

Les résultats sont significatifs. Les préjugés antisémites s’accrochent dans les esprits. Pour 35 % des personnes interrogées les juifs utiliseraient aujourd’hui dans leur propre intérêt leur statut de victimes du génocide nazi pendant la Seconde Guerre mondiale. Les juifs auraient trop de pouvoir dans le domaine de l’économie (25 %), les médias (22 %), la politique (19 %)… Il n’est donc pas « surprenant » de noter que 21 % des Français auraient du mal à élire un président de la République juif (ils étaient 50 % en 1966, N.D.L.R.) et 6 % à avoir un voisin juif. Par ailleurs, 84 % (seulement) considèrent qu’un Français juif est un Français comme un autre. « L’antisémitisme n’est pas un fantasme. Il n’est pas résiduel », conclut Dominique Reynié, le directeur général du Fondapol. Enfin 59 % considèrent qu’il n’y a pas plus de problèmes d’antisémitisme que de problèmes de racisme. « Il faut relativiser cette opinion avec les faits et les actes. La moitié de toutes les agressions racistes concernent des juifs. Pourtant cette communauté représente 1,4 % de la population totale », souligne Dominique Reynié.

Front national, front de gauche

L’ensemble des deux études fait surtout apparaître une société où les opinions antisémites atteignent une haute intensité dans deux univers relativement limités, le Front national et le Front de gauche.

« Le Front national ne s’est pas normalisé. Notre travail révèle que le parti mobilise des électeurs qui ont un niveau de rejet de l’étranger et du juif que l’on ne retrouve nulle part ailleurs », précise Dominique Reynié. À titre d’exemple, les proches du Front national sont 68 % à être d’accord qu’il faille lutter contre l’antisémitisme et le racisme pour éviter que la tragédie de la Shoah ne se reproduise quand sur l’ensemble de la population 85 % sont favorables.

Autre exemple : 38 % des proches du FN déclarent que les juifs sont trop nombreux en France au lieu de 16 % pour l’ensemble de la population.

Les deux études du Fondapol soulignent également que les préjugés antisémites sont répandus d’une façon plus importante que la moyenne chez les proches du Front de gauche. Lorsqu’il s’agit de savoir si les juifs « sont trop nombreux en France », ceux qui répondent oui se trouvent davantage chez les proches de Jean-Luc Mélenchon (24 %) que dans les partis de droite, hors Front national.

Les musulmans pratiquants

Enfin, le travail du Fondapol met en relief un niveau plus élevé d’opinion antisémite chez les musulmans quand on les compare à l’ensemble de la population française. Pour les musulmans interrogés, les juifs ont trop de pouvoir dans l’économie (67 %), les médias (61 %) et la politique (51 %) . « Le degré d’opinion antisémite est fonction du degré de pratique et d’implication dans la religion. Plus la personne est pratiquante, plus il est marqué », souligne Dominique Reynié.

Patrice Barrère

[leprogres.frArticle original

La rédaction de JForum, retirera d'office tout commentaire antisémite, raciste, diffamatoire ou injurieux, ou qui contrevient à la morale juive.

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