1 Qui est juif ?

Dans la tradition juive un enfant né d’une mère juive est juif, comme l’est toute personne qui se convertit au judaïsme dans le cadre de règles et de rituels stricts. Une personne peut être juive sans être pratiquante. On désigne les juifs qui ne sont pas religieux comme étant laïques. La tradition religieuse juive englobe différents mouvements, qui vont d’une tradition orthodoxe stricte au judaïsme Masorti ou au judaïsme libéral.

2 Combien de juifs y a-t-il dans le monde aujourd’hui ?

Il y a approximativement treize millions de juifs dans le monde, ce qui est un très petit pourcentage de la population mondiale qui est de 6 milliards 6 millions. La moitié d’entre eux environ vivent en Israël et il y a des populations juives relativement importantes aux Etats-Unis, en Russie et en France. Ces trente dernières années la population juive dans le monde n’a augmenté que de 2% alors que la population mondiale totale augmentait de 60 %.

3 Les juifs constituent-ils une race ?

Non. En termes de biologie il n’y a qu’une seule race : la race humaine. Mais au XIX ème siècle et au cours de la première moitié du XX ème siècle des scientifiques importants ont voulu prouver la supériorité de leur propre race, la « race blanche. » Leurs idées ont été utilisées par les nazis dans les années 1930 et 1940 pour distinguer les Aryens des autres races. Les nazis ont élaboré une « échelle des races, » plaçant les Aryens à son sommet et la « race sémite » tout en bas. Des études modernes en science et génétique ont prouvé d’une manière irréfutable qu’il ne peut y avoir aucune notion de classement des races.

4 Qu’est-ce que l’antisémitisme ?

L’antisémitisme a pour synonyme la haine des juifs et antisémite signifie anti-juif. Le terme d’antisémitisme est devenu courant vers 1880 lors de la parution d’articles et de brochures écrites par Wilhelm Marr, un journaliste allemand connu par la suite comme  » père de l’antisémitisme. » Alors que l’antisémitisme politique est né au XIX ème siècle, l’antisémitisme religieux, connu également sous le nom d’antijudaisme, est apparu dans des temps anciens et a perduré au Moyen-Age, plus particulièrement au sein de l’Eglise chrétienne. Pour légitimer cet antijudaïsme religieux les juifs furent accusés d’avoir incité les Romains à assassiner Jésus Christ, un prêcheur juif en qui les juifs ne reconnaissaient pas le Messie biblique.

5 Y a-t-il une conspiration ourdie par les juifs pour dominer le monde ?

Si la haine des juifs remonte très loin dans l’histoire, l’idée que les juifs veulent dominer le monde s’est répandue à la fin du XIX ème siècle et au début du XX ème siècle.

Ce mythe, qui joua un rôle important dans la propagande nazie en Allemagne, réapparut en Russie au début du XX ème siècle avec la sortie du livre « Les Protocoles des Sages de Sion. » Ce livre avait été élaboré par le régime tsariste en Russie pour détourner l’opinion publique des crises graves que traversait le pays et rendre les juifs responsables des difficultés que connaissait le peuple russe. Ce livre donne un prétendu compte-rendu de vingt-quatre rencontres secrètes des soi-disant Sages de Sion, groupe imaginaire de juifs riches. Ces hommes se rencontrent pour débattre de la manière dont ils pourraient détruire la communauté chrétienne et établir un ordre mondial juif. Les Protocoles furent publiés pour la première fois dans un journal de St Petersburg en 1903 et il y eut rapidement d’autres publications avec des versions qui variaient souvent considérablement.

Malheureusement, des versions des Protocoles sont très largement distribuées en arabe et en persan dans le monde musulman et des musulmans sont induits en erreur au moyen de ces faux. En 2002 la télévision égyptienne a lancé la diffusion d’un feuilleton très important réalisé d’après Les Protocoles. Cette série, « Cavalier sans Monture, » a été diffusée dans un certain nombre de pays arabes, contribuant à répandre ce mythe.

6 La politique étrangère des Etats-Unis est-elle dominée par les juifs ?

Le lobbying politique est institutionnalisé aux Etats-Unis. Les groupes organisés dont le but est de défendre des intérêts donnés doivent être déclarés de manière officielle et travailler en toute transparence. Il y a des groupes de lobbying pro-arabes et pro-iraniens comme il y a des groupes de lobbying juifs. En fait, il est plus exact de dire qu’il y a des groupes de lobbying pro-israéliens plutôt que pro-juifs. Il est intéressant de noter que les chrétiens évangélistes jouent un rôle très important dans le lobby pro-israélien au Etats-Unis. Il y a environ sept millions de juifs en Amérique, soit 2,5% de la population. Les juifs d’Amérique forment une communauté très diverse et souvent divisée.

On exagère souvent l’influence que peut avoir le lobby pro-israélien de Washington sur la politique moyen-orientale de l’Amérique. Une étude complète de centaines de décisions politiques ayant trait au Moyen-Orient a montré que dans des situations où il y avait désaccord entre les points de vue du Président américain et l’AIPAC, le lobby pro-israélien le plus important aux Etats-Unis, le Congrès n’a pris le parti de l’AIPAC que dans 27 % des cas.

7 Que signifie le terme Shoah ?

Le terme de Shoah englobe les persécutions et les meurtres systématiques d’environ six millions de juifs par le régime nazi et ses collaborateurs entre1933 et 1945. Les nazis, qui sont arrivés au pouvoir en Allemagne en janvier 1933, pensaient que les Allemands appartenaient à une « race supérieure » et que les juifs, considérés comme « inférieurs, » représentaient une menace étrangère à la soi-disant communauté raciale allemande. Les Tziganes, des personnes souffrant de handicaps mentaux et physiques et des Polonais furent également la cible de destructions ou furent décimés pour des raisons raciales, ethniques ou nationales.

8 Qu’entend-t-on par « Solution Finale » ?

L’expression « Solution Finale » renvoie au plan élaboré par l’Allemagne nazie pour massacrer tous les juifs d’Europe. Cette expression a été utilisée pour la première fois lors de la Conférence de Wannsee qui s’est tenue à Berlin le 20 janvier 1942, lorsque des responsables allemands ont discuté de sa mise en oeuvre. Les nazis utilisèrent l’expression « Solution Finale » pour dissimuler ce projet qui avait pour but le massacre de tous les juifs d’Europe, en les tuant par balles, en les gazant et en utilisant tout autre moyen. Ce sont six millions de juifs, hommes, femmes et enfants, environ, dont un million et demie d’enfants, qui furent assassinés pendant la Shoah. Soit les deux-tiers des juifs qui vivaient en Europe avant la deuxième guerre mondiale.

9 Combien de juifs ont été tués pendant la Shoah ?

Entre cinq et six millions de juifs, sur les neuf millions de juifs qui vivaient en Europe, ont été tués pendant la Shoah. Il est impossible de savoir exactement combien de personnes sont mortes étant donné qu’elles ont péri au cours de milliers d’événements sur une période de plus de quatre ans. La moitié environ des victimes juives a trouvé la mort dans des camps de concentration ou des camps de la mort comme Auschwitz. L’autre moitié a été assassinée lorsque les soldats nazis sont entrés dans nombre de petites et de grandes villes d’Allemagne, de Pologne, d’Union Soviétique ou d’autres régions, et y ont massacré les gens par dizaines ou par centaines.

10 Qu’est-ce qui prouve que tant de juifs ont été tués par les nazis?

Parmi les nombreuses preuves du massacre de cinq à six millions de juifs par les nazis il y a :
• Les rapports officiels où est inscrit le nombre de personnes envoyées dans les camps de la mort principaux qui furent construits et utilisés essentiellement pour les juifs
• Des études démographiques portant sur le nombre de juifs en Europe avant et après la guerre
• Des rapports d’activité de commandants nazis de camps de la mort et d’escouades de la mort dans les territoires conquis
• Des témoignages de dirigeants et de commandants nazis recueillis après la guerre
• D’autres preuves plus récentes sont apparues avec, par exemple, l’excavation de charniers en Ukraine.

Des dirigeants nazis ont fait de nombreuses références à l’extermination des juifs, comme dans :

– Le journal de Joseph Goebbels, Chef de la Propagande d’Hitler (Lochner, The Goebbels Diaries, 1948, pp. 86, 147-148):

14 février 1942 : Le Führer a exprimé une nouvelle fois sa détermination à voir nettoyer sans pitié l’Europe des juifs. Sans qu’il y ait ni sensiblerie ni dégoût facile. Les juifs méritent la catastrophe qui leur arrive. Leur destruction ira de pair avec la destruction de nos ennemis. Nous devons accélérer ce processus froidement et avec détermination.

27 mars 1942 : La procédure suivie est assez barbare et ne sera pas décrite ici de manière plus précise. Il ne restera pas grand chose des juifs. On peut dire globalement que 60 % d’entre eux environ devront être liquidés tandis que 40 % seulement peuvent être utilisés pour des travaux forcés.

– Discours du Chef SS Heinrich Himmler à Posen le 4 octobre 1943, enregistré sur bande magnétique (Procès des Criminels de Guerre les Plus Importants, 1948, Vol. XXIX, p. 145):

Je me réfère maintenant à l’évacuation des juifs, l’extermination du peuple juif. C’est quelque chose qui se dit facilement : « le peuple juif est en cours d’extermination » dit chaque membre du Parti , « tout à fait, cela fait partie de nos plans, cette élimination des juifs, cette extermination, nous sommes en train de le réaliser. »

11 Pourquoi les nazis ont-ils choisi les juifs, parmi tous leurs « ennemis » – pour les exterminer ?

Hitler a mené une guerre mondiale pour accomplir son rêve de domination mondiale. Cette guerre a fait quelque 72 millions de morts, avec, parmi eux, 47 millions de civils, dont quelque six millions de juifs. Les juifs ont été la cible de la Shoah parce qu’Hitler haïssait les juifs et les rendait responsables de tous les problèmes du monde. Il avait grandi à Vienne où les juifs jouaient un rôle de premier plan dans la vie politique et culturelle de la ville. Il rendait les juifs plus particulièrement responsables du fait que l’Allemagne avait perdu la première guerre mondiale. Hitler disait au peuple allemand qu’il aurait pu gagner cette première guerre mondiale si l’Allemagne n’avait pas été « poignardée dans le dos » par les juifs et leurs conjurés.

Cette haine des juifs d’Hitler était si profonde que plusieurs de ses biographes l’ont décrite comme étant une véritable obsession. Albert Speer, qui était un confident et un proche d’Hitler, écrivit en 1977 :

La haine des juifs était le moteur principal d’Hitler et un point central, peut-être même le seul élément qui le motivait. Le peuple allemand, la grandeur allemande, le Reich, rien de cela ne comptait pour lui, en fin de compte. C’est ainsi que la dernière phrase de son testament cherchait à nous inciter, nous les Allemands, à haïr les juifs sans merci après cette chute apocalyptique.

J’étais présent lors de la session du Reichstag du 30 janvier 1939 lorsqu’Hitler a assuré que s’il y avait une autre guerre, ce seraient les juifs et pas les Allemands qui seraient exterminés. Cette phrase a été exprimée avec une telle certitude que je n’aurais jamais douté de son intention de la mettre à exécution.

12 Les Allemands ordinaires étaient-ils au courant des persécutions infligées aux juifs pendant qu’elles étaient perpétrées ?

Dans les années 1930, les persécutions nazies des juifs et d’opposants étaient parfaitement connues en Allemagne. Des nouvelles filmées étaient projetées dans des cinémas dans le monde entier à l’époque et montraient des attaques perpétrées contre des juifs, leurs biens et des synagogues en Allemagne, pendant la Kristallnacht ( La Nuit de Cristal) par exemple. Mais les nazis ont essayé de garder secrets l’extermination des juifs et leurs autres actes de génocide. Alors que les Allemands savaient dans leur ensemble que les juifs avaient été déportés vers l’Est, de grandes parties de la population allemande ne savaient pas qu’ils étaient assassinés.

13 Les peuples de l’Europe occupée savaient-ils ce que les Allemands faisaient aux juifs à l’époque ?

L’attitude des populations locales à l’égard de la persécution et de la destruction des juifs est allée d’une collaboration zélée avec les nazis à l’indifference ou une aide active apportée aux juifs. Il est donc difficile de généraliser. La situation a varié d’un pays à l’autre. En Europe de l’Est et notamment en Pologne, en Russie, en Roumanie et dans les Pays baltes (Estonie, Lettonie et Lituanie), on était bien plus au courant de l’existence de la « Solution Finale » parce qu’elle était mise en oeuvre dans ces régions et qu’une partie de la population locale y participait. En Europe de l’Ouest, la population locale était moins au courant des détails de cette « Solution Finale. » Il faut dire que dans chaque pays d’Europe, il y a eu des individus courageux qui ont risqué leur vie pour sauver des juifs. Dans plusieurs pays il y eût des groupes qui vinrent en aide aux juifs, comme le groupe de Joop Westerweel aux Pays-Bas, Zegota en Pologne, le mouvement clandestin d’Assisi en Italie et les habitants du village français du Chambon-sur-Lignon.

14 Qui sont les « Justes Parmi les Nations »?

« Justes Parmi les Nations » fait référence au non-juifs qui, de leur propre initiative, ont aidé des juifs pendant la Shoah, souvent au péril de leur vie. Il y a eu des « Justes Parmi les Nations »dans tous les pays envahis par les nazis ou qui leur étaient alliés et , grâce à leurs actions, des vies juives ont été sauvées. Yad Vashem, l’institution israélienne qui a autorité en matière de souvenir de la Shoah, décerne des distinctions honorifiques exceptionnelles à ces personnes. A ce jour, après que chaque cas ait été examiné soigneusement, Yad Vashem a reconnu environ 10.000 « Justes Parmi les Nations » répartis dans trois catégories différentes. Parmi eux, à ce jour, soixante-dix musulmans ont reçu le titre de « Justes Parmi les Nations. »

15 Aurait-on pu faire quelque chose pour arrêter le génocide des juifs ?

La manière dont les Alliés ont réagi à la persécution et à la destruction des juifs en Europe a été inadéquate et la voix morale la plus forte, celle du Pape, est restée silencieuse. Le 17 décembre 1942, les Alliés ont condamné les atrocités nazies contre les juifs mais cela a été la seule déclaration faite avant 1944. De plus, rien n’a été fait pour en appeler aux populations locales d’Europe pour qu’elles n’apportent pas leur concours aux nazis dans leur entreprise de meurtre systématique des juifs. On a dit que les Alliés auraient pu bombarder le camp de la mort d’Auschwitz pour ralentir la machine de mort nazie. Mais il paraît peu vraisemblable que de telles mesures auraient pu stopper ni même ralentir de manière significative le génocide des juifs.

16 Pourquoi les juifs considèrent-ils que la Shoah a été quelque chose d’exceptionnel alors tant d’êtres humains ont perdu la vie dans d’autres catastrophes au cours de l’histoire ?

Sur le plan moral il est injustifié de classer les souffrances humaines pour diminuer l’horreur de formes « moindres. » Chaque catastrophe ou acte de génocide a des points communs et des differences avec d’autres catastrophes et génocides. Mais les historiens soulignent que ce qui fait de la Shoah un événement exceptionnel, c’est que cela a été et reste la seule fois au cours de l’histoire où une nation, qui se considérait comme faisant partie des nations soi- disant civilisées, a tenté d’assassiner systématiquement chaque homme, femme et enfant appartenant à une certaine ethnie ou à une minorité religieuse, donnant à ces massacres un but politique, s’efforçant de les trouver et de les détruire partout où ils étaient, que ce soit dans les métropoles trépidantes en Europe ou dans des îles grecques isolées. Et les nazis créèrent un appareil bureaucratique complet pour atteindre leur but.

17 Quelle était la différence entre les camps de concentration et les camps d’extermination sous le régime nazi ?

Les nazis avaient établi un système de camps qui en englobait différents types, selon des objectifs différents. Camp de concentration était un terme générique pour décrire des camps qui étaient des prisons. Les « camps de travail  » avaient pour but l’exploitation d’une main d’oeuvre rendue esclave pour contribuer à l’effort de guerre de l’Allemagne. Les « camps d’extermination » étaient les six camps situés en Pologne où des juifs furent massacrés.

18 Pourquoi les nazis ont-ils construit les camps d’extermination camps en dehors de l’Allemagne ?

Il était plus facile de cacher au peuple allemand des camps situés à l’extérieur de l’Allemagne. Et la grande majorité des juifs assassinés venaient de territoires conquis à l’est et au sud des frontières de l’Allemagne d’avant guerre. Les camps d’extermination étaient situés plus près de ces régions, ce qui facilitait le transport.

19 Les Juifs ont-ils essayé de combattre les Nazis ?

En dépit des conditions très difficiles auxquelles les juifs étaient soumis en Europe occupée par les nazis, nombre d’entre eux ont mené une résistance armée contre eux. On peut diviser cette résistance en trois types principaux d’activités armées : révoltes dans des ghettos, résistance dans des camps de concentration et des camps de la mort et lutte de partisans. La révolte du ghetto de Varsovie, qui dura cinq semaines environ et commença le 19 avril 1943, est probablement l’exemple le plus connu d’une résistance armée juive mais il y eût de nombreuses révoltes dans des ghettos au cours desquelles des juifs ont combattu les nazis.

Malgré les conditions terribles qui régnaient dans les camps de la mort, les camps de concentration et de travaux forcés, des prisonniers juifs combattirent les nazis à Treblinka (2 août 1943,) Babi Yar ( 29 septembre 1943,) Sobibor ( 14 octobre 1943,) Janowska ( 19 novembre 1943) et Auschwitz ( 7 octobre1944).

Des juifs prirent également une part active aux mouvements de résistance nationaux contre les occupants nazis et dans des unités de partisans juifs.

20 Que pensaient vraiment les nazis des musulmans ?

Selon l’idéologie raciste des nazis, les Arabes sont de race sémite et donc des sous-hommes semblables aux juifs. Dans son livre, Mein Kampf, Hitler décrit le combat pour la domination du monde comme étant une lutte se déroulant sur le plan racial, culturel et politique entre les Aryens et les non-aryens. Il avait élaboré une « échelle » de la hiérarchie raciale, affirmant que les « Aryens » allemands étaient au sommet de cette échelle tandis que juifs et Tziganes étaient tout en bas. Dans l’échelle raciale d’Hitler, Arabes et musulmans occupaient une place peu glorieuse et étaient l’objet d’un mépris similaire à celui qu’il avait pour les juifs.

Dans une remarque personnelle faite en 1939 Hitler décrivit le peuple du Moyen-Orient comme un peuple « de demi-singes peints qui devraient tater du fouet. »

Dans d’autres circonstances, cependant, les nazis n’ont jamais laissé leur vision idéologique entraver leurs considérations politiques plus pressantes. Ainsi reconnurent-ils qu’il était important de chercher à plaire au monde arabe et au monde musulman pour que ceux-ci prennent leur parti et dans leurs déclarations publiques ils minimisèrent l’opinion qu’ils avaient réellement des musulmans et des Arabes. Lorsque Mein Kampf a été traduit en arabe en 1938, faisant preuve de »tact, » Hitler, lui-même, proposa de ne pas y faire figurer sa théorie de « l’échelle raciale. »

21 Quelle attitude eurent les musulmans envers les nazis ?

Pendant les années 1930 les nazis se sont efforcés de tirer parti du ressentiment arabe et perse contre la domination coloniale britannique au Moyen-Orient. Les nazis promirent aux Arabes de les « libérer » des Français et des Britanniques, promesse que beaucoup, au sein du monde arabe, crurent sur parole, ne saisissant pas la nature raciste d’un régime nazi qui les aurait vraisemblablement réduits en esclavage dans leur propre pays.

Bien que l’on ait très largement compris l’Allemagne nazie dans une grande partie du monde musulman, cela venait surtout d’une forte hostilité envers les Britanniques, plutôt que d’un soutien aux doctrines racistes nazies et on y trouvait rarement un élément antisémite. Et tandis que, pour la grande majorité des musulmans, la guerre en Europe restait un conflit lointain, les nazis réussirent à recruter directement quelques musulmans. Deux divisions SS furent levées parmi les musulmans d’Albanie et de Bosnie, mais les nazis se rendirent rapidement compte que ces unités étaient inefficaces sur le plan militaire et n’étaient nullement motivés pour combattre pour le Troisième Reich.

Les nazis firent grand cas de la rencontre entre Hitler et Haj Mohammed Amin al-Husseini, Grand Mufti de Jérusalem, qui eut lieu le 21 novembre1941. Al-Husseini ou les troupes musulmanes qui combattirent aux côtés de la Wehrmacht n’étaient pas représentatifs de ce qu’éprouvaient les musulmans au cours de la Deuxième Guerre Mondiale. Des centaines de milliers de soldats musulmans venus d’Afrique, des Indes et d’Union Soviétique, combattirent dans les armées alliées pour aider à vaincre le fascisme en des lieux comme El-Alamein, Monte Cassino, les plages de Provence et Stalingrad.

22 Des musulmans ont-ils contribué à sauver la vie de juifs fuyant les persécutions nazies ?

Oui. Il est intéressant à cet égard de signaler le cas de l’Albanie. L’Albanie est le seul pays européen qui a une majorité musulmane dans sa population. L’Albanie a été le seul pays européen où il y avait plus de juifs après la guerre qu’il n’y en avait eu avant guerre. Avant la Deuxième Guerre Mondiale il n’y avait que 200 juifs en Albanie sur une population de 800.000 personnes. Après la guerre il y avait beaucoup plus de juifs après que des réfugiés juifs, venus d’une demi-douzaine de pays, aient fui les persécutions nazies et se soient réfugiés en Albanie.

Parmi les 70 musulmans reconnus officiellement comme Justes Parmi les Nations, il y a, à leur propos, un grand nombre d’histoires relatant des histoires de grand courage et de sacrifice. Parmi ces héros musulmans on trouve le Bosniaque Dervis Korkut, qui cacha une jeune juive résistante du nom de Mira Papo et qui préserva la Haggadah de Sarajevo, l’un des manuscrits en hébreu les plus précieux au monde. Ou le Turc Selahattin Ulkumen, qui sauva cinquante juifs des fours d’Auschwitz. Son geste héroïque fut la cause indirecte de la mort de son épouse, Mihrinissa, tuée lors de représailles menées par les nazis. C’était peu après qu’elle eut donné naissance à leur fils, Mehmet. Il y eut encore l’Albanais Refik Vesili qui, à l’âge de 16 ans, sauva huit juifs en les cachant dans la maison que possédait sa famille à la montagne.

23 Juifs et Musulmans ont-ils toujours été ennemis ?

Non. Islam et judaïsme se ressemblent beaucoup en tant que fois religieuses.

Toutes deux vouent un culte à un Dieu strictement unitaire. Toutes deux ont des lois sacrées avec des codes alimentaires et des règles détaillées qui gèrent les relations entre hommes et femmes. Toutes deux veulent que leurs textes sacrés soient appris et enseignés dans leur langue d’origine. Les musulmans considèrent que juifs et chrétiens font partie du « Peuple du Livre. » Dans le Dar al-Islam – les territoires sous autorité musulmane – ceux-ci ont toujours joui d’une plus grande protection que celle dont bénéficiaient les païens. Pendant des siècles, le statut de la dhimma a été appliqué à juifs et chrétiens dans le monde musulman. Ce qui signifie qu’en contrepartie d’un paiement d’impôts supplémentaires des droits limités leur étaient accordés.

Pendant quatorze siècles des minorités juives ont vécu en paix dans nombre de pays et sous nombre de régimes appartenant au monde musulman. Mais s’il y a eu des périodes paisibles et des régimes tolérants dans les pays arabes, il y a eu aussi des régimes belliqueux et des périodes d’intolérance. Sous le règne de nombre de Sultans ottomans, par exemple, le climat religieux était relativement tolérant. En revanche, la dynastie Safavid d’Iran, qui a régné de 1501 à 1722, était extrêmement intolérante vis-à-vis des minorités religieuses. Et ce sont non seulement les juifs perses, mais aussi les Zoroastriens et les Arméniens d’Iran, qui étaient régulièrement harcelés, persécutés et forcés à se convertir sous les rois Safavid.

24 La vie des juifs était-elle meilleure dans l’islam que dans la chrétienté ?

Comparer quatorze siècles d’islam à vingt siècles de christianisme est difficile, mais il est généralement vrai que bien qu’il y ait eu des discriminations récurrentes à l’encontre des juifs dans le monde islamique, ils y furent rarement persécutés.

Dans l’Europe chrétienne, beaucoup d’énergie a été déployée pour forcer les juifs à renier leurs croyances religieuses. Pendant des siècles les Chrétiens ont essayé de convertir les juifs, y mettant beaucoup de zèle. Cela s’est beaucoup moins produit en islam. A cette époque, nombre de théologiens chrétiens et de dignitaires de l’Eglise se sont rendus coupables de la propagation de légendes et de stéréotypes antisémites. Ce dont les érudits musulmans et les penseurs islamiques ont été bien moins coupables. La littérature musulmane des débuts ne contient aucun « monstre juif. »

Les stéréotypes antisémites sont apparus pour la première fois dans le monde arabe au dix-neuvième siècle lorsque de grandes parties du monde arabe ont été conquises par des puissances coloniales européennes. Il est frappant de voir que presque tous les mythes antisémites qui prolifèrent dans le monde arabe et le monde musulman de nos jours ont été fabriqués dans le monde chrétien et le monde occidental.

25 Y a-t-il dans l’histoire des exemples d’une coexistence harmonieuse entre juifs et musulmans ?

Pendant des siècles la plus grande partie de la population juive a vécu dans des territoires gouvernés par des musulmans. Bien que les juifs aient toujours été traités en dhimmis, il y eut pour eux des périodes de tolérance et même de prospérité.

Aux dixième et onzième siècles, dans la partie de la péninsule ibérique du nom d’Andalousie – Al-Andalus- qui était gouvernée par des musulmans, les arts et sciences des mondes juif, chrétien et islamique, furent florissants et se développèrent harmonieusement. Les plus beaux palais maures furent construits, calligraphes et illustrateurs ont créé de beaux rouleaux de la Torah, de belles Bibles et de beaux Corans et des linguistes juifs traduisirent des textes latins en arabe et des textes arabes en latin. Des juifs ont joué un rôle important à la cour d’Abd al-Rahaman III (912-961), qui a dirigé le Califat de Cordoue pendant cinquante ans. Cette période prit fin lorsque des dirigeants fanatiques berbères d’Afrique du Nord, les Almohad, envahirent l’Andalousie.

Les Almohads traitèrent durement les dhimmis. Devant choisir entre la mort et la conversion, la plupart des juifs et des chrétiens émigrèrent. Certains, comme la famille de Maïmonide, ce philosophe de premier plan, fuirent vers l’est dans des terres musulmanes plus tolérantes, tandis que d’autres partirent vers le nord pour s’établir dans les royaumes chrétiens de plus en plus nombreux.

Lorsque le roi catholique d’Espagne ordonna l’expulsion des juifs en 1492, le Sultan ottoman, Bayazid II promulga un décret envoyé aux gouverneurs des provinces de l’Empire ottoman leur ordonnant de « ne pas refuser l’entrée aux juifs ni de leur faire de problèmes mais de les recevoir cordialement. » Selon l’historien américain Bernard Lewis, « il était non seulement permis aux juifs de s’installer sur des terres ottomanes, mais il y étaient encouragés, ils y étaient aidés et parfois même contraints. »

Les juifs nouvellement venus ont prospéré sous le règne de plusieurs sultans ottomans et ils contribuèrent d’une manière significative au progrès scientifique et à l’administration de l’Empire ottoman. La première imprimerie dans un pays musulman fut installée par un juif à Istanbul en1493.

26 Que dit l’Islam des Juifs ?

Juifs et chrétiens ont un statut unique en islam. Les musulmans pensent que Dieu a fait connaître ses volontés aux prophètes Abraham, Moïse et Jésus. Marie, mère de Jésus apparaît dans le Coran plus que dans le Nouveau Testament. Il y a aussi beaucoup de références à la Torah et aux prophètes juifs dans le Coran. Les juifs sont les descendants d’Abraham et Sarah, tandis que les musulmans se voient comme étant les descendants d’Abraham et Hagar, la servante de l’épouse d’Abraham qui lui donna son premier fils, Ismaël.

Selon la tradition islamique, Abraham a construit la Ka’aba – le sanctuaire de La Mecque – avec son fils Ismaël. Les musulmans croient que les révélations faites par Dieu à Moïse et Jésus n’ont pas été transmises de manière exacte. Les révélations faites au prophète Mahomet, telles qu’elles sont inscrites dans le Coran, sont la véritable Parole unique et éternelle de Dieu. A part des allusions à la Torah, aux prophètes et au Nouveau Testament, le Coran décrit les heurts qu’il y eut entre le Prophète Mahomet et les tribus juives de la Péninsule arabique. Trois tribus juives qui ne voulaient pas se convertir à l’islam y vivaient à la même époque que Mahomet. L’armée du Prophète expulsa deux de ces tribus de Medine en 624 et 625.

Quelques années plus tard les hommes de la troisième tribu juive furent tués et leurs femmes et leurs enfants furent vendus en esclavage. Le conflit entre Mahomet et les tribus juives de Medine n’est pas l’un des thèmes centraux du Coran, il n’a qu’une importance mineure. Pourtant les verstes du Coran au sujet de la lutte entre le Prophète Mahomet et les juifs ont été utilisés de manière récurrente ces dernières années par des extrémistes qui voulaient attiser les sentiments anti-judaïques parmi les musulmans. Ces extrémistes ignorent entièrement la manière positive dont les juifs ont été traités à la fois dans le Coran et dans la tradition orale du Prophète Mahomet comme on le voit, par exemple, dans la Sourate 2:47 du Coran : « Oh, Enfants d’Israël ! Gardez à l’esprit Mes faveurs que je vous accorde et le fait que j’ai fait en sorte que vous excelliez parmi les nations. »

27 L’islam est-il contre les juifs ?

Non, parce que le Coran reconnaît que les juifs appartiennent au « Peuple du Livre. » C’est pour cela que nous, en tant que musulmans, sommes attristés de voir tant de mythes et légendes antisémites propagés dans le monde musulman.

Il faut se souvenir qu’il y a nombre de mouvements divers au sein du monde islamique. On ne doit pas oublier que pendant quatorze siècles d’histoire le monde islamique a été relativement tolérant vis-à-vis de la minorité juive en son sein, surtout si on le compare avec le monde chrétien. Grâce au climat de tolérance religieuse de l’Empire ottoman, les persécutions contre les juifs n’étaient guère monnaie courante, comme ce fut également le cas en Andalousie – en Espagne médiévale – sous les dirigeants musulmans.

L’antisémitisme qui est apparu dans le monde musulman aujourd’hui a été inventé en Europe, bien que l’on ne doive pas sous-estimer la gravité et la nocivité des idées et des stéréotypes antisémites qui sont actuellement endémiques dans maint pays musulman. On peut aisément retrouver l’origine de maint stéréotype dans les images antisémites qui apparurent il y a bien longtemps dans l’Europe chrétienne. Parmi ceux-ci, il y a les mythes qui décrivent le juif comme traître et conspirateur, les mythes concernant de soi-disant crimes rituels, etc. Mais cela n’a aucun sens de parler d’antisémitisme chrétien ou islamique. Ce ne sont pas les religions qui sont antisémites mais les extrémistes qui manipulent les sentiments religieux à des fins politiques.

En tant qu’intellectuels musulmans, nous pensons que les faiseurs d’opinion et les dirigeants musulmans et arabes ont la responsabilité morale de dénoncer l’antisémitisme au nom de l’islam, tout comme les penseurs et intellectuels juifs de premier plan en Occident ont été parmi les premiers à condamner le sectarisme et la discrimination pratiqués contre les musulmans.
L’antisémitisme, tout comme le sectarisme anti-musulman, est une honte pour celui qui en est l’auteur plutôt que pour la victime et le rabaisse

28 La Shoah appartient à l’histoire de l’Europe, en quoi concerne-t-elle les musulmans ?

La Shoah – le meurtre de millions de juifs assassinés par les nazis – ne fait pas partie de l’histoire de l’Europe, mais de l’histoire de l’humanité. Ce qui est arrivé à des millions d’êtres humains au cours de ce génocide concerne chacun d’entre nous, quelles que soient notre religion ou nos croyances.

L’un des mystères tragiques de la Shoah est comment le meurtre prémédité, systématique, de millions de personnes a pu être commis par des membres d’une société qui semblait être avancée. Mais si nous devons tirer des leçons de la Shoah nous devons comprendre que les forces sombres qui ont miné la démocratie en Allemagne, trahi une génération de jeunes gens, plongé le monde dans un conflit global et conduit à la Shoah, continuent à menacer nos sociétés.

29 Qu’est-ce que le négationnisme ?

Le négationnisme consiste à nier la réalité de l’extermination des juifs par les nazis et à prétendre que cela ne s’est jamais produit. Ou prétendre que le nombre des pertes subies par les juifs a été très largement exagéré ou que la Shoah n’a été ni systématique ni le résultat d’une politique officielle, ou tout simplement que la Shoah n’a jamais existé. Les nazis ont été les premiers à essayer de cacher ou de détruire les preuves de la Shoah.

Un Français du nom de Paul Rassinier affirma que seuls 500.000 ou un million de juifs ont trouvé la mort pendant la Deuxième Guerre Mondiale, surtout à cause de mauvaises conditions physiques, et peu à peu, et non pas systématiquement aux mains des nazis. D’autres pseudo-érudits et « historiens révisionnistes »ont suivi. Avec l’arrivée d’Internet, des négationnistes ont utilisé ce moyen pour répandre leurs messages de haine. Nombre de sites Internet, qu’ils ont établi, ou qu’ont établi des groupes apparentés, tels que les suprémacistes blancs, proposent leur version faussée de l’histoire.

30 Qu’est-ce qui prouve que les nazis ont gazé leurs victimes ?

Les chambres à gaz des camps de la mort ont été le moyen principal utilisé pour executer les juifs pendant la Shoah. Les nazis ont publié une directive mettant en place les chambres à gaz à l’automne 1941, le faisant sur une grande échelle mais, à cette époque, d’autres pratiques qui facilitaient les massacres, de petites chambres à gaz y compris, avaient déjà été mises en oeuvre. Avant d’être utilisées dans les camps de la mort, les chambres à gaz avaient déjà été un élément central du programme « d’eugénisme » d’Hitler. Entre janvier 1940 et août 1941, 70.273 Allemands – la plupart d’entre eux étaient handicapés physiques ou mentaux – ont été gazés, par groupes de 20 à 30 à chaque fois, dans des pièces hermétiquement fermées et déguisées en salles de douche.

En attendant, des massacres de juifs avaient été perpétrés par balles, et cela à grande échelle, dans la foulée de la campagne allemande de l’Est. Mais en octobre 1941 ces actions perpétrées par des unités de meurtriers étaient devenues un processus difficile à gérer. Des camionnettes mobiles à gazer, qui utilisaient les gaz d’échappement de leur moteur diesel pour tuer leurs passagers, furent utilisées pour tuer des juifs à Chelmno et Treblinka à partir de novembre 1941. Au moins 320.000 prisonniers de Chelmno, des juifs pour la plupart, ont été tués au moyen de cette méthode. Un total de 870.000 juifs furent assassinés à Treblinka en utilisant des camionnettes à gaz et des chambres à gaz utilisant du diesel.

Des chambres à gaz furent installées et utilisées à Belzec, Lublin, Sobibor, Maïdanek et Auschwitz-Birkenau à partir du 3 septembre 1941, date à laquelle le premier gazage expérimental a été perpétré à Auschwitz. Gazages qui ont continué jusqu’à novembre1944. Les autorités ont estimé qu’entre 2 et 3 millions de juifs ont été tués dans ces chambres à gaz.

31 Pourquoi ceux qui mettent en doute l’existence de la Shoah sont-ils accusés d’être antisémites ou néo-nazis ?

Le meurtre de six millions de juifs au cours de la Deuxième Guerre mondiale est le crime contre l’humanité qui a été le mieux documenté au cours de l’histoire. Il y a une profusion de documents, dont la plupart viennent de l’Etat nazi lui-même, concernant la planification et l’exécution de ces atrocités. On peut également consulter un grand nombre de films et de photos, pris lors de la libération des camps de concentration et de la découverte de charniers, et il y a des quantités de témoignages oculaires, témoignages de survivants de la Shoah y compris. Compte tenu de l’existence de toutes ces preuves, il est évident que le négationnisme a toujours eu des motivations politiques. Il est souvent utilisé pour attirer de nouvelles recrues néo-nazies.

Chercheurs et universitaires ont amassé des centaines d’exemples qui démontrent qu’une corrélation directe existe souvent entre le négationnisme et l’antisémitisme ou le nazisme. Ainsi l’organisme principal qui promeut le négationnisme aux Etats-Unis, l’Institut pour le Réexamen de l’Histoire – the Institute for Historical Review-, est dirigé par Greg Raven, qui déclara publiquement en1992 qu’Hitler était « un grand homme …certainement plus grand que Churchill et FDR Franklin Delano Roosevelt ndlr « >Article original réunis…la meilleure chose qui ait pu arriver à l’Allemagne. »

Il est intéressant de noter qu’alors que des centaines d’historiens connus dans le monde entier ont conduit des recherches sur la Shoah au cours des dernières décennies, aucun d’entre eux n’a adopté ces thèses négationnistes.

32 Pourquoi le négationnisme est-il un délit dans la plupart des pays européens ?

Le négationnisme est un délit dans les pays européens car on le considère comme étant une incitation à la discrimination, la violence, le racisme et la xénophobie. Une personne qui dit que la Shoa n’a jamais existé, compte tenu de tous les procès, tous les monuments et musées, tous les mémoires et films existants, revient à prétendre qu’il y a imposture à une grande échelle. Le négationnisme, de par sa nature même, est une allégation d’imposture à une grande échelle.

Le Comité des Droits de l’Homme des Nations Unies écrivait en 1996, à propos du cas de Robert Faurisson, que le négationnisme : « insinue, sous couvert de recherche académique impartiale, que les victimes du nazisme seraient coupables d’inventions malhonnêtes. » Etant donné que le négationnisme n’est qu’une forme d’incitation à la haine des Juifs il va de soi qu’il soit considéré comme un délit.

33 Pourquoi le négationnisme est-il si répandu dans les pays arabes et musulmans ?

La montée récente du négationnisme dans le monde musulman pourrait être attribuée au fait qu’il est soutenu par des Etats, à la progression d’un islam radical et à l’aggravation du conflit israélo-arabe. On voit couramment des manifestations de négationnisme à travers tout le Moyen-Orient, dans des discours et des déclarations de personnalités, dans des programmes télévisés diffusés par des télévisions d’Etat, dans des articles et des éditoriaux écrits par des journalistes et dans les résolutions d’organisations professionnelles. Le principe au coeur du négationnisme, à savoir que les juifs auraient inventé l’histoire de la Shoah pour promouvoir leurs propres intérêts, semble être une doctrine qui est de plus en plus acceptée par un grand nombre de personnes dans les Etats arabes et musulmans.

La perception arabe et musulmane de la Shoah n’a jamais été monolithique et a souvent été influencée par la tournure prise par le conflit israélo-arabe. Dans certains cas le négationnisme est activement soutenu par des gouvernements en place, comme cela est le cas pour l’Iran et la Syrie. Dans d’autres pays du Moyen-Orient, cependant, nier ou minimiser l’étendue du meurtre des juifs pendant la Deuxième Guerre Mondiale, est le fait de partis d’opposition ou de factions dissidentes qui s’opposent à toute tentative de normalisation avec Israël ou les Etats-Unis.

34 Comment le négationnisme a-t-il été « importé » dans le monde musulman ?

Bien que le négationnisme soit apparu pour la première fois dans le monde arabe dans les années 1970, ce n’est que dans les années 1990 que le négationnisme est devenu un phénomène répandu que l’on retrouve dans les médias populaires dans tout le Moyen-Orient. Roger Garaudy, l’un des négationnistes occidentaux, ancien intellectuel communiste qui s’est converti à l’islam, a joué un grand rôle dans la propagation du négationnisme et des écrits antisémites dans le monde musulman. Garaudy a été acclamé en héros à travers tout le Moyen-Orient quand il a été poursuivi par le gouvernement français pour incitation à la haine raciale.

L’un des signes les plus importants qui montrent que des liens se développent entre les négationnistes et le monde arabe est apparu en décembre 2000, lorsque l’Institut pour le Réexamen de l’Histoire, – Institute for Historical Review-, basé aux Etats-Unis, a annoncé que sa quatorzième conférence révisionniste se tiendrait à Beyrouth au Liban, début avril 2001. De nombreux intellectuels arabes ont été indigné et ont protesté ouvertement. La conférence fut finalement interdite par le gouvernement libanais. Lors de la conférence sur la Shoah de Téhéran de 2006, conférence organisée par le ministère des Affaires étrangères iranien, parmi les orateurs principaux il y a eu des négationnistes européens et américains tels que l’ancien dirigeant du Ku Klux Klan, David Duke, des universitaires discrédités et plusieurs autres suprémacistes blancs.

35 En quoi le négationnisme profite-t-il aux musulmans ?

En rien. Mais nier l’existence d’une catastrophe ayant touché l’être humain, amoindrit l’estime d’eux-mêmes qu’ont les musulmans et leurs valeurs morales.

Comme l’affirment des musulmans parmi nous, nous devons maintenir catégoriquement que l’on ne peut faire progresser aucune cause ni aucun programme, aussi légitime soient-ils, en niant ou en dépréciant l’immense souffrance humaine qu’a provoqué le meurtre de millions de juifs et d’autres minorités perpétrés par le régime nazi et ses alliés pendant la Deuxième Guerre Mondiale. Les tentatives cyniques qu’il y a eues d’utiliser le négationnisme comme outil politique dans le conflit au Moyen-Orient ne pourront que servir à aggraver la méfiance et l’hostilité qui sont déjà présents dans cette région tourmentée.

36 Les juifs ont-ils utilisé la Shoah pour obtenir la création d’Israël ?

Ce serait une erreur de croire que l’Etat juif doit son existence à Hitler. Le nationalisme juif ou Sionisme, avait vu le jour plus d’un demi-siècle avant que les juifs d’Europe ne soient exterminés. Toutes les institutions nécessaires à un Etat juif étaient déjà en place en Palestine lors de la montée au pouvoir d’Hitler en 1933, et lorsque la partition de la Palestine fut proposée en 1936. Israël n’est donc pas le résultat direct de la Shoah.

Lorsque l’on lit les délibérations des Nations Unies et de ses divers organismes en 1947-1948, il est difficile de trouver la moindre preuve démontrant que la Shoah ait joué un rôle décisif ou même significatif. Même s’il est vrai que la Shoah a accéléré l’acceptation de la légitimité d’une patrie juive aux yeux du monde. Mais il n’y a pas de relation de cause à effet entre la Shoah et Israël.

37 Le fait de parler de la Shoah ne profite-t-il pas à Israël ?

Non. La Shoah n’est pas un problème israélien et, de plus, le négationnisme de certains musulmans ne s’est pas avéré être d’une grande utilité pour la cause palestinienne. Quelle que soit la position politique que nous adoptons vis-à-vis de l’Etat d’Israël et de la politique menée par le gouvernement israélien, les preuves historiques de l’existence de la Shoah demeurent avérées. Rien ne peut justifier moralement le négationnisme ou le fait de minimiser le génocide du peuple juif. Reconnaître la Shoah n’entraîne pas le désaveu des droits des Palestiniens, pas plus que cela ne renforce leur arguments.

38 Pourquoi ne peut-on comparer le conflict israélo-palestinien à la Shoah ?

Le conflit entre Israël et les Palestiniens n’est pas racial mais national; il est politique et territorial. C’est une lutte entre deux peuples pour une petite terre. Au cours des décennies cette lutte a oscillé entre violence et tentatives de négocier une solution. En l’absence d’un accord de paix, la violence continue à tourmenter Arabes et juifs et les difficultés des Palestiniens perdurent.
Et, surtout, c’est l’idéologie raciale nazie qui a provoqué le meurtre des juifs. Selon cette idéologie les juifs appartenaient à une race malfaisante dont l’existence même présentait un danger pour l’Allemagne et toutes les civilisations humaines. La campagne nazie contre les juifs n’avait pas pour objet d’obtenir des juifs des gains tangibles, comme des terres ou d’autres richesses. Son but était de débarrasser le monde de l’influence soi-disant pernicieuse des juifs.

La Shoah est issue de l’idéologie raciale nazie et les nazis ont essayé de mettre tous les juifs à mort. Au cours de la Shoah une nation souveraine a exploité tous ses appareils d’Etat pour massacrer systématiquement un peuple donné.
Les nazis ont systématiquement assassiné des juifs par balles, par gaz dans des chambres à gaz conçues spécialement dans ce but dans les camps d’extermination. Sous les nazis, dans les ghettos, les camps et les installations où travaillait une main d’oeuvre esclave, des centaines de milliers de juifs furent également mis brutalement au travail jusqu’à ce que mort s’ensuive. Le résultat en a été le meurtre de près de 6 millions de juifs.

Aussi tragique le conflit israélo-palestinien puisse-t-il être, il ne peut être comparé à la Shoah. Utiliser des termes pris dans l’histoire de la Shoah pour décrire la situation au Moyen-Orient brouille les événements et leurs conséquences plus qu’ils ne les clarifient.

39 Pourquoi les Palestiniens, qui n’ont rien à voir avec la Shoah, devraient-ils en payer le prix ?

La question de la Shoah, en tant que catastrophe humaine, doit être séparée de la création de l’Etat d’Israël et, plus particulièrement de la politique israélienne.
Les coeurs et les esprits des Palestiniens et des Israéliens portent le poids d’histoires sacrées, de traditions douloureuses, et de superstitions entretenues vis-à-vis les uns des autres. La manière dont musulmans et arabes voient l’histoire juive, tout comme la manière dont les juifs voient l’histoire musulmane et arabe est emplie de malveillance et de mythes. A un point tel qu’il est difficile à chacun d’entre eux de voir la souffrance de l’autre, que ce soit la souffrance qu’il y a de nos jours ou celle qu’il y a eu au cours de l’histoire.

Il y va de la responsabilité des intellectuels des deux côtés de cette division de tenter de corriger malveillance et mythes dans les deux communautés. Les intellectuels musulmans doivent être assez courageux pour déclarer que dire que les juifs sont comme les nazis et que dessiner une Etoile de David – comme symbole juif- en en faisant l’équivalent d’une Swastika nazie, est non seulement absurde mais c’est aussi l’affront ultime fait aux victimes de la Shoah et leurs familles car cela revient à comparer les victimes à leurs bourreaux.

Les intellectuels juifs ont aussi le devoir d’effacer mythes et malveillance qui brouillent l’opinion qu’ont leurs frères juifs des Palestiniens et de leurs aspirations légitimes.

Et, plus important encore, la question de la Shoah doit être tenue à l’écart des disputes politiques. Même si la Shoah a joué un rôle décisif dans la création d’Israël, même si les Arabes n’ont joué aucun rôle dans la tragédie qui est arrivée au peuple juif, il serait moralement inadmissible que les musulmans nient la Shoah ou considèrent que reconnaître qu’elle a eu lieu serait apporter un soutien à Israël ou trahir les droits des Palestiniens.

40 Pourquoi parle-t-on tant de la Shoah ?

La Shoah n’est pas uniquement le fait de se souvenir et d’honorer les victimes du nazisme. C’est un avertissement quant à ce qui peut se produire lorsque des dirigeants d’un pays sont motivés par la haine et utilisent cette haine pour apporter des réponses simplistes aux problèmes de leur pays en rendant un groupe de personnes données responsables de ces problèmes, se fondant sur une division religieuse ou ethnique. Bien que ceux qui sont prêts à utiliser leur haine pour atteindre leurs buts soient peu nombreux, si personne ne s’oppose à eux, ils semblent alors être majoritaires. S’il y a une chose que nous devons apprendre de ce qu’a été la Shoah, c’est que le silence est le pire ennemi de la justice. Si nous devons tirer les leçons des erreurs du passé, nous ne pouvons pas rejeter la Shoah sous pretexte qu’elle appartient à l’histoire et nous devons prendre à coeur ce qu’elle nous enseigne.

Les musulmans et les peuples de toutes fois religieuses, ou qui n’ont pas de foi particulière, devraient étudier les causes et les conséquences de la Shoah, notamment les moyens rhétoriques utilisés par les dirigeants politiques, les éditorialistes et les commentateurs au cours des décennies qui l’ont précédée. Et nous devons toujours nous souvenir que la Shoah n’a pas commencé à Auschwitz ou dans les ghettos. Elle a commencé longtemps auparavant dans les coeurs de ceux qui gardaient le silence et permirent à une haine née de l’ignorance de se développer.

NDLR – Cet article provient d’un site sur la SHOAH, tenu par des musulmans désireux d’instaurer une meilleure entente entre les deux cultures.

http://www.projetaladin.org/holocaust/fr/pourquoi-ce-site-internet/un-appel-a-la-conscience.html

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Jean

Sur la condition, au cours des siècles ,des Juifs en terre d’islam , il faut lire l’ouvrage de l’universitaire israélienne Bat Yéor,

Ouvrage intitulé Le Dhimmi

Ne pas oublier aussi de lire le Coran et tout particulièrement la deuxième sourate , dite la plus importante ,faite après l’Hégire

Intitulée La vache (Le Veau d’or )

Jean Redomier

Avraham MALTHETE

Je ne vois nulle part que l’on parle du Mufti de Jérusalem, Mohammed Amin al-Husseini et de sa conduite vis-à-vis des Nazis et de leur idéologie. Il n’est pas aussi parlé de la 13e division de montagne de la Waffen SS Handschar (cf. les articles y afférant sur Wikipedia, et autres liens faciles à trouver sur ce sujet).

Le Professeur Paul FENTON vient de sortir un livre, « L’exil au Maghreb », qui raconte le long, très long martyrologe des Juifs en terre musulmane. L' »Age d’or andalou » est une aimable fable, Juifs et Chrétiens y restant des sous-hommes en tant que « dhimmis ». Les Musulmans sont les premiers, avant les Chrétiens, a avoir imposé une marque vestimentaire aux Juifs pour les reconnaître dans la rue.

Quant au Coran, les Juifs y sont, au choix, des singes, des porcs, etc.

Etant pour le dialogue interreligieux, je n’en gomme pas pour autant ce qui gratte.

J’interviens ce soir-même dans la réunion du Cercle d’amitié judéo-chrétienne de Paris-Est, dans le 12e, et je suis membre et intervenant au sein du Groupe interréligieux du 93 pour la Paix.

Si dialogue il y a, il faut alors que TOUT SOIT DIT.

Dans les négationnistes/révisionnistes, vous oubliez, entre autres, Robert Faurisson (plusieurs fois condamné) et Alain Guionnet (plusieurs fois condamné à de la prison ferme; réside à Issy-les-Moulineaux et a un blog sur le Net).

Il est donc temps que nos frères musulmans (sans jeu de mots) balaient devant leur porte.

Avraham MALTHETE
Epigraphiste-Paléographe,
Bibliste,
en charge des manuscrits hébreux,
Bibliothèque de l’Alliance Israélite Universelle, Paris.