«Shana tovah». Une fin d’année inoubliable
Une nouvelle année commence pour les juifs, alors que l’escalade militaire entre Israël et l’Iran s’accélère dangereusement
Richard Prasquier
L’Iran a tiré hier soir plus de 180 missiles sur le territoire israélien. Le pays a été mis en alerte, et la population est descendue dans les abris. Heureusement, les missiles ont majoritairement été interceptés par le Dôme de fer. Des tirs de joie nourris ont éclaté dans la banlieue sud de Beyrouth, contrôlée par le Hezbollah, après cette importante attaque. Pendant le même temps, un attentat à Tel-Aviv mené par deux tireurs faisait sept morts. Benyamin Netanyahou a estimé que l’Iran avait « commis une grave erreur » en attaquant son pays, et qu’il en « paierait le prix ».
Pour les juifs, aujourd’hui est traditionnellement une journée de purification spirituelle ou tout au moins de réflexion sur l’année qui vient de se dérouler. Il n’est pas besoin de souligner que cette réflexion prend un relief particulier compte tenu de l’année que nous avons vécue. C’est cette veille de Rosh Hachana que le régime iranien a choisie pour lancer 180 missiles balistiques sur Israël. Pour les chiites, le Nouvel an (qui a eu lieu cette année en juillet) est la commémoration du malheur des malheurs, la mort de l’imam «martyr» Hussein au cours de la bataille de Kerbala en 680.
Le « front de la résistance » en mauvaise posture
Le communiqué officiel des Gardiens de la Révolution relatant l’attaque de missiles parle de la nation « noble et martyrisée de l’Iran ». Pour les mollahs iraniens, leur pays, depuis Hussein, est donc une nation martyre. Pour tous ceux dont le bon sens n’a pas été détruit par l’idéologie, c’est leur régime qui martyrise l’Iran.
Ce communiqué prétend aussi que cette attaque est « conforme aux droits légaux de l’Iran et aux lois internationales », et prévient Israël que s’il réagit militairement il s’exposera à de nouvelles attaques « encore plus écrasantes et destructrices ».
Malgré ces paroles victorieuses et martiales, il n’y a pas la moindre précision sur les conséquences de l’attaque et, en dehors des mollahs, bassidji et pasdarans les plus obtus, les Iraniens auront donc compris qu’il s’agit d’un échec cuisant pour le régime.
« Les coups du Front de la Résistance contre le corps décrépit et en décomposition du régime sioniste seront encore plus écrasants », avait prétendu l’ayatollah Khamenei. J’aurais tendance à dire « décrépit lui-même ».
Dans le centre du pays, un Israélien observe les dégâts dans un restaurant après les attaques iraniennes, 1 octobre 2024 SOPA Images/SIPA Numéro de photo : 01178302_000015
Il est à noter que l’attaque iranienne n’a été accompagnée par aucun soutien du fameux « Axe de la Résistance ». Même s’il ne semble pas que le Hezbollah possède des missiles balistiques à longue portée, et qu’il ne pouvait donc pas aider à saturer le système Arrow III qui a détruit les missiles iraniens, l’absence de participation du Hezbollah en soutien à cette offensive iranienne en dit long sur son affaiblissement. Le monde démocratique et le Liban devraient en être reconnaissants à Israël. On a vu que cela n’a pas été tout à fait le cas…
En Israël, beaucoup estiment qu’une fenêtre de tir s’est ouverte pour frapper le programme nucléaire iranien
Une autre remarque concerne les Américains. Joe Biden n’a pas lésiné son approbation de la liquidation de Nasrallah. Il n’a pas non plus lésiné son soutien à Israël au cours de l’attaque iranienne. On dit beaucoup que les Américains sont immobilisés par la perspective des élections, mais il faut peut-être se rappeler que Biden avait promis qu’il ne laisserait jamais l’Iran posséder l’arme nucléaire. Un rapport publié en juillet par la Direction du Renseignement américain a donné de très inquiétantes informations sur l’avancement des Iraniens. Est-il possible que le président américain en tire la conclusion que c’est le moment ou jamais d’empêcher ce régime criminel d’acquérir l’assurance-survie nucléaire avec le poids qu’elle ferait peser sur le monde libre?
Une troisième remarque, à propos de la position française. Elle repose sur une image du Liban qui avait sa validité il y a cinquante ans, avant que ne commence la guerre civile dans le pays. Il ne semble pas que la diplomatie française ait averti le président de la République que la situation avait changé depuis cette époque. La posture paternaliste d’une France soutenant le petit frère libanais et l’appel à un cessez-le-feu sans rappeler les crimes du Hezbollah et sans en citer le nom, marquera un point haut des rodomontades nationales, un point bas de l’influence de notre pays dans le monde et un sommet d’exaspération pour les Juifs de France.
Une dernière remarque, une confirmation plutôt, sur Jean-Luc Mélenchon et son tweet lunaire au moment des envois de missiles iraniens sur Israël. On savait qu’il était infréquentable, mais je pense que ceux qui continuent de le fréquenter sont désormais eux-mêmes infréquentables…
Richard Prasquier, président d’honneur du CRIF.
JForum.fr avec causeur.fr
Des missiles iraniens survolent la ville de Jerusalem, 1er octobre 2024 © CHINE NOUVELLE/SIPA