Servir l’Éternel: par amour ou par crainte?

Caroline Elishéva REBOUH le 03.09.2020

Dans la massékhet Shabbat du Talmud de Jérusalem (I,3) il est écrit que la crainte de D. est la couronne de la plus haute sagesse ce qui n’est que le premier échelon qui permette d’accéder à l’humilité.

Lorsque l’homme déclare qu’il croit en un Dieu parfait, il déclare en sous-entendu qu’il adhère totalement aux Commandements et il s’empêche de penser par-là que les décrets imposés par le Créateur à Ses créatures  sont arbitraires comme ceux qu’un tyran imposerait à ses subalternes.

En imposant des mitsvot à l’homme, Dieu éprouve Ses créatures  comme le déclare Rab en statuant : en effet, qu’importe-t-il au Saint Béni soit-Il qu’on égorge une bête par la nuque ou par la gorge ?(guemara houlin)

La Tradition orale affirme que Dieu a besoin de la prière des  hommes ainsi qu’il est dit dans la pessikta où Dieu S’adresse aux anges de cette façon : si Israël n’accepte pas la Torah, vous et Moi ne pourrons subsister.

Ainsi, Dieu a besoin des prières des hommes  tout autant que l’homme ne peut se maintenir sans la bénédiction du Ciel…..

L’un des nombreux midrashim rapportant le don de la Torah, précise que lorsque le Créateur proposa la Torah à Israël, Dieu renversa le Mont Sinaï sur le peuple d’Israël en promettant : si vous acceptez Ma Torah, c’est bien, sinon, là sera votre tombeau….

Où est le libre arbitre en ce cas ? Il intervient dans le choix d’accepter, d’observer les mitsvoth divines ou pas.

Dans le livre du Lévitique (vayikra) XVIII, 4, Dieu dit au peuple d’Israël :
את משפטי תעשו ואת חוקותי תשמרו, ללכת בהם. אני ה׳ אלוקיכם :
« Mes jugements vous les pratiquerez et mes Statuts vous les observerez afin d’aller par eux. Je suis le Seigneur votre Dieu ».

Par « jugements » il faut comprendre les lois concernant, les vols, les unions illicites, l’idolâtrie, les blasphèmes, l’homicide etc……

Et, par « statuts » il faut entendre les lois contre le mauvais penchant, les  lois comme celle de l’interdiction de la consommation du porc, celle du port de fibres mélangées les lois concernant la lèpre et les lépreux et leur purification, la vache rousse le lévirat et le déchaussement,  le bouc émissaire.

A chaque fois que dans un verset sont écrits les mots suivants : אני ה׳ אלקיכם, Dieu veut nous montrer et nous « rappeler » qu’Il est notre Dieu et qu’en tant que Tel, s’Il a décrété ces lois, il ne nous appartient pas ni d’essayer de les comprendre ni de les combattre ni de s’y opposer.

Doit-on chercher des motifs rationnels aux mitsvoth ? Certifier que si Dieu nous a interdit de consommer tel animal c’est parce que celui-ci est porteur de maladies ou que la circoncision protège hommes et femmes de…..

Ceci n’est pas le propos d’un homme craignant Dieu. Rashi d’ailleurs dit en l’occurrence :ce n’est pas par miséricorde que Dieu a donné Ses Commandements, mais pour imposer Ses Décrets aux Enfants d’Israël de manière à leur faire savoir qu’ils sont Ses serviteurs et qu’ils doivent observer Ses commandements et Ses décrets même dans le cas où le Satan et les non Juifs les attaqueraient en disant  : « à quoi vous servent ces commandements? »

De plus, certains rabbins ont interdit toute explication rationnelle des mitsvoth, craignant qu’elle ne porte atteinte à l’hétéronomie de la pratique religieuse et ont pensé qu’elle est plus nuisible que bénéfique.

Dans la tradition rabbinique, la Crainte de Dieu se confond avec l’amour de Dieu ainsi que les Rabbins l’ont exprimé dans un ancien texte : ô Eternel, unis nos cœurs pour que nous craignions Ton Nom ; éloignes de nous ceux que Tu détestes, rapproches de nous ceux que Tu aimes et sois Miséricordieux envers nous pour L’AMOUR de Ton Nom. Ou bien encore :
J’ai eu peur dans la joie, je me suis réjoui dans la Crainte de Ton Nom mais mon Amour pour Toi a été plus fort que la joie et la crainte.

Yéhouda Halévy écrivit dans le célèbre Livre du Kuzari : « Sache dit le Rabbin au roi des Khazars que notre Torah est constituée de trois états psychologiques : la crainte, l’amour et la joie….. Ainsi, les émotions humaines fondamentales sont appelées au service de Dieu ». 

Dans le Livre des Psaumes, on trouve cette expression : craindre Dieu ainsi : (tehilim 67,8) : « Dieu nous bénira et toutes les extrémités de la terre Le craindront ou encore (tehilim 102,16) : toutes les nations craindront le nom de l’Eternel, et tous les rois de la terre (craindront) Ta gloire… ».

Une expression similaire se trouve dans le livre de l’Exode à propos des Égyptiens qui libérèrent leurs esclaves : ceux qui craignent la parole de l’Éternel… Mais cette expression met en question les Gentils (non Juifs) par rapport à D.

Doit-on servir D. par amour ou par crainte?  La question mérite réflexion et Maimonide conseille de considérer la célèbre maxime d’Antigone de Sokho (אנטיגנוס איש סוכו) dans les Pirké Avot I, 3 :
אל תהיו כעבדים המשמשים את הרב על מנת לקבל פרס (….) תהיה מורא שמיים עליכם”….”

C’est-à-dire que nous ne devons pas accomplir les mitsvoth ni étudier la Torah afin de recevoir une récompense (tous les biens et toutes les bénédictions promis ici- bas) et mériter aussi une belle part du monde futur mais, je m’abstiens de commettre des transgressions afin de ne pas être puni et de ne pas risquer d’être retranché du monde futur  car une telle démarche trahirait une certaine crainte et non pas une obéissance aux commandements par Amour…..

Servir par crainte n’est pas  la marque d’une conduite digne d’un prophète ou d’un sage, de quelqu’un d’un niveau supérieur mais cela démontrerait plutôt de la conduite d’un homme  du commun.

Seules les personnes ayant acquis plus de discernement sont capables de faire la différence entre crainte et amour….. Et s’astreint à respecter les mitsvoth de la Torah pour en faire un modus vivendi basé sur le fait que la Torah est vérité et conduit à la félicité.

Le célèbre philosophe mystique italien du XVIIème siècle, Moshé Haim Luzzatto a ainsi exprimé sa perception de la crainte du ciel, vertu importante, qui trouve sa place juste au-dessous de la Sainteté et, ajoute-t-il, on distingue deux façons de craindre le ciel : craindre le ciel dans le sens de peur : on applique les statuts de la Torah parce qu’on a peur et il y a ce qu’il convient de désigner sous l’appellation de crainte révérencielle laquelle se rattache à un niveau supérieur exigeant une parfaite maîtrise de soi et atteindre aussi à la perfection. Cette sorte de crainte est constituée en partie de la crainte de la faute.

La crainte du châtiment c’est la peur que l’homme éprouve à transgresser l’ordre de D. à cause de la peine qu’une transgression peut entraîner tant pour le corps que pour l’âme. Ce sentiment s’éveille naturellement puisque de façon naturelle, l’homme s’aime personnellement et craint pour sa personne et par conséquent, par crainte de s’attirer quelque malheur, l’homme évitera de transgresser la Loi. Luzzatto soutient, comme Maimonide, que l’homme sage ne se conduit pas ainsi.

La crainte révérencielle est donc celle qui est inspirée par la Grandeur infinie de D. Elle va imprégner les sentiments de l’humain et va l’entraîner à se tenir à l’écart de la faute et s’en abstient eu égard au respect qu’il accorde au Créateur…

Un peu comme le petit enfant – toutes proportions gardées – qui obéit aveuglément à ses parents….

L’homme désire se sentir « beau » face à son créateur, la crainte et la piété vont de pair et l’homme prend conscience de sa petitesse face à l’Infinité du divin, face à sa toute puissance, à sa magnificence et cela suffit pour  éprouver de la honte et se sentir tremblant face à D. et implorer Son pardon.

Les grandes figures du judaïsme se sont toujours distinguées par la qualité de leur crainte ou de leur amour pour D.

Toutefois,  la crainte de la faute qu’inspire la grandeur infinie de D.  possède sa propre originalité puisque c’est grâce  à elle  que l’homme s’inquiète au sujet de ses actions afin d’éviter que ces actes de la vie quotidienne ne puissent donner une ouverture à un soupçon  de faute quelconque ou ne puisse se retrouver incompatible avec le caractère de    La Majesté divine et de la Sublimité de Son nom.

En résumé, l’une et l’autre de ces craintes ont un rapport direct avec la façon d’agir de l’être humain qui doit prendre en compte cette Majesté divine..

La différence qui existe est que la crainte révérencielle ne se fait sentir qu’au moment de commettre une faute, au moment de l’acte, de la prière ou de n’importe quel autre acte cultuel.

A ce moment, l’homme sera saisi de confusion, de honte, d’angoisse, voire même d’un tremblement. Si lui est donnée l’occasion de « pécher » et qu’il en prenne conscience, il s’y refusera pour ne pas aller à l’encontre de D.

Quant à la crainte du péché, elle se fait jour à chaque occasion, c’est à ce propos qu’on trouve dans les Proverbes (משלי) XXVIII, 14 : Heureux l’homme qui est perpétuellement dans la crainte et c’est dans le livre de l’Exode (שמות) XX, 20 que Moise s’exprime ainsi au sujet de cette crainte : Pour que cette crainte soit présente à votre esprit et que vous ne péchiez pas.

C’est-à-dire qu’il faudrait que cette crainte ne nous quitte jamais dans le péché et, s’il y tombe, il ne sera pas considéré comme responsable, comme s’il s’agissait d’un cas de force majeure. Il faut donc être constamment empli d’émoi et d´angoisse en prenant conscience que nous sommes sans cesse en présence du Créateur.

Elie dit dans Job XXXVII,1, : Voilà pourquoi  mon cœur bat d’angoisse et est arraché de sa place ; prêtez dans la crainte l’oreille  à Sa voix.

C’est cette crainte authentique, celle que l’homme pieux doit ressentir , qu’elle soit sans cesse présente à la pensée et dont il ne doit pas se départir.

Il est dit en hébreu que « tout est entre les mains du ciel sauf la crainte du ciel » laissant ainsi à l’homme la liberté de craindre et/ou d’aimer. A propos du verset 12 du chapitre 10 du livre des Nombres : « Et maintenant, Israël que te demande l’Eternel ton Dieu sinon que de Le craindre et de L’aimer »….. Or personne n’est obligé d’aimer car l’amour doit être gratuit et désintéressé.

Cette crainte peut être envisagée sous deux aspects selon que l’objet porte sur le présent et l’avenir ou sur le passé.
Si l’acte se situe dans le présent ou dans l’avenir,  on doit prendre conscience des conséquences que l’acte peut entraîner….

Si l’acte se situe dans le passé même s’il s’agit d’un passé tout-à-fait récent comme le matin même…..

Faire un examen de conscience au sujet de ce qu’on aurait pu faire de grave involontairement, tel le tsadik Baba ben Bouta qui offrait chaque jour le sacrifice que les hommes avaient coutume d’offrir pour les péchés sur lesquels planait un doute.

Dans la Genèse (בראשית) XV, 1 D dit : Sois sans crainte, Abraham. De quelle sorte de crainte s’agit-il ? Si le Créateur a pris le soin de rassurer Son serviteur, c’est l’indication qu’Abraham craignait D très sincèrement et d’une manière absolue.

A propos de ce degré de crainte du Ciel les hazal ont dit  : tout ce que le Saint béni soit Il possède dans ce monde,  qu’Il a créé, c’est le trésor constitué par la crainte du Ciel mais, toujours d’après les Hazal, seul Moïse a pu atteindre à des sommets de crainte du Ciel jamais atteints par un être humain.

Pour tenter d’atteindre ce niveau spirituel il faudrait être dans un état de méditation constante et de réflexion approfondie sans se laisser accaparer par une autre pensée quelle qu’elle soit.

En s’astreignant à des lectures spirituelles de très haut niveau nous pourrions aussi y arriver ce qui tendrait à signifier que l’homme devrait arriver à sublimer ses penchants et ses instincts et ne pas se laisser dominer par la grossièreté de ses sens en captivant sa vue par des textes de très haut niveau.

Le Roi David exprima son sentiment sur la crainte de D. comme une grâce  du Ciel : (תהילים -psaumes CXXXVI,2) Enseigne-moi Ta voie ô Seigneur, et je marcherai dans Ta Vérité. Dispose mon cœur à craindre Ton Nom.

Le psalmiste a aussi écrit : écarte-toi du mal et fais le bien סור מרע ועשה טוב psaumes 34,15…… faire le bien pour le bien mais aussi faire le bien par amour pour D. ou par crainte de D. ?

Aimer les créatures de D. et témoigner de l’amour pour ses créations, c’est la meilleure façon d’aimer D. et de Le servir. Cet amour est un amour absolu et dans l’absolu, car il n’a rien de charnel ou d’éphémère c’est un amour grandiose qui atteint des cimes qui n’ont rien d’humain …

Ce respect empreint d’amour que nous devons avoir pour la créature humaine est prouvé de maintes façons par exemple : si une personne tombe malade, nous devons transgresser le shabbat pour lui porter secours si besoin est : c’est une obligation.

Dans la Guemara berakhot 19b, se trouve la confirmation : plus grand est le respect des créatures que les interdictions mêmes qui sont dans la Torah c’est ce qui s’appelle Pikouah nefesh ou sauvetage de la vie.

C’est un devoir impératif car D. confie à l’homme un corps et une âme dont il doit être  responsable et en prendre soin et les préserver de toute atteinte extérieure. Nous disposons pour cela de nombreux conseils dispensés par Maimonide à travers son Livre de la Connaissance. C’est toujours pour la même raison qu’il nous est interdit de nous faire tatouer quoiqu’il y ait là une intention : celle de ne pas imiter les païens et de confirmer par des ras de façons notre identité juive .

Dans le livre de la Genèse lorsqu’il est question d’Abraham recevant la visite des Anges, le sens aigu de l’hospitalité du patriarche est évoqué (´hakhnassath orhim הכנסת אורחים).

Cependant, le fait qu’Abraham, malgré le fait qu’il était épuisé par les suites de la circoncision se soit précipité au-devant des Visiteurs eux-mêmes fatigués par leur voyage et la chaleur, interrompant son étude et sa méditation ainsi que ses prières pourrait être classé dans le pikouah nefesh puisqu’en se précipitant vers eux, il se porta à leur secours pour les rafraîchir et les aider à se reposer et à se réhydrater.

C’est grâce à cette qualité qu’Abraham et Sara furent récompensés par la naissance d’Isaac qui fut instruit par son père en justice et droit (צדקה ומשפט) vertus hautement appréciées par le Créateur ainsi qu’il est écrit dans la prière de la amida : מלך אוהב צדקה ומשפט.

Dans l’introduction aux devoirs des cœurs Bahyya Ibn Paquda, (חובות הלבבות בחיה ובן פקודה) dit que l’homme qui aime D. passe par trois étapes :
– l’amour par abnégation qui amoindri la valeur de l’argent pourvu que son corps et son âme soient intégraux
– l’amour qui n’a presque aucune limite pourvu que la vie soit préservée….
– l’amour si absolu que rien ne semble important ni l’argent, ni le corps ni même la vie ….
C’est ainsi que l’on voit qu’Abraham a gravi ces trois étapes puisqu’il a donné ses biens aux pèlerins et aux pénitents.

Il a donné son corps avec la circoncision et, Il a donné son âme puisqu’il s’empresse d’aller sacrifier Isaac pour prouver au Créateur que son amour pour D. dépasse toutes les notions tant son amour est pur et profond et qu’il Lui est soumis.

Celui qui persévèrera dans l’amour de D. qui est la voie de l’espérance et de la crainte dont la plupart des hommes peuvent assumer l’exigence en concentrant les forces de la volonté, D. alors, enverra Son secours à cet homme et affirmera ses possibilités. Comme il est dit dans Les Proverbes (משלי) VIII, 7 : Mes amants, Je les aime et ceux qui Me recherchent aux aurores, Me trouvent.

La haine vouée aux Amants de D. est un obstacle à l’amour de D. mais, les signes de l’amour qui marquent ces Amants de D. comprennent le renoncement à tout ce qui peut troubler la soumission au Créateur car le Craignant D. ou l’Amant de D. doit vénérer le Maître du Monde et Le craindre. Celui qui essaie de ne jamais commettre de faute dans l’observance des mitsvoth est ainsi.

Cet amant devient joyeux, il jubile, rempli d’allégresse et de satisfaction tel un jeune enfant qui s’est bien conduit et suppose qu’il va contenter ses parents…tout comme il sera très triste à cause de fautes qu’il aura commises. L’Amant de D. doit vivre dans la pénitence et la contrition. La prière doit l’aider dans sa conduite  mais la prière nocturne est plus propice encore car la nuit facilite la concentration et le recueillement et il ne sera pas dérangé….

La solitude protège contre les atteintes extérieures et l’isole dans cette activité  vers D.
Selon Bahya Ibn Paquda, on parvient à l’amour de D. après avoir franchi dix degrés spirituels : reconnaître l’Unicité de D., l’observation des créatures, la soumission à D., l’abandon à D., la purification de l’acte, l’humilité, la pénitence, l’ascèse, (c’est-à-dire : refus du repos et des plaisirs charnels qui ne sont pas strictement nécessaires à la vue) et  c’est ainsi que l’homme peut atteindre le stade de pureté dans l’amour de D.

Rabbi Shim´on Bar Yohai a dit HaKadosh Baroukh Hou a octroyé trois facultés à Israël et toutes s’acquièrent par des souffrances : la Torah, la Terre d’Israël et le Monde à venir. Souffrances morales car il est écrit : « si tu abandonnes la Torah un jour, elle t’abandonnera deux jours….
Dans le Midrash Tadshé (midrash Tadshé ou Beraita de Rabbi Pinhas ben Yair) est écrit le principe suivant : il existe trois sortes de sacrifices : le ôla ou holocauste, les shelamim ou sacrifices de paix, le hatat ou sacrifice expiatoire.

Les Justes se divisent eux aussi en trois catégories ceux qui agissent par amour (ahavah) ceux qui agissent en faisant prévaloir leurs requêtes (bakasha), et ceux qui agissent par crainte (yir ´a). En schématisant on pourrait établir le parallèle suivant :
Holocauste…………………. Amour……………………………Gloire de D.
Sacrifice de paix……………Requête………………….A notre bénéfice
Sacrifice expiatoire…………Crainte…………………..A notre bénéfice

L’amour a précellence sur la requête et la requête sur la crainte….
La crainte dont il est question ici est la crainte à son niveau le plus bas et la crainte ou plutôt la peur panique de la sanction.

Servir D. avec amour en rendant honneur à la Gloire et au règne de D. est la conduite de certains Justes car D. créa tout ce qui nous entoure par la parole et non en y prenant de la peine.. Et c’est ainsi que la bénédiction de « shé’hakol ni’hya bidvaro » le confirme car Il a tout créé par Sa parole.

C’est pour Le remercier de Ses bienfaits, (puissance, sagesse, bonté et miséricorde) et, parce qu’Il est notre D., notre Père et notre Roi, qu’un holocauste est offert….

Les sacrifices de paix, sont offerts en raison des requêtes que les hommes servant D. ont coutume de Lui adresser en Le suppliant et en Lui demandant de leur donner diverses vertus ou d’autres choses pour leur bénéfice ou pour leur avantage personnel : sagesse, discernement, connaissance, longévité, guérison, une épouse de grande raison, des enfants à la belle nature, réussite professionnelle,…… Salomon n’avait-il pas demandé à l’Éternel qu’Il lui accorde la sagesse ?

Pourquoi alors offrir un sacrifice expiatoire pour la crainte ? Pour ceux qui servent D. avec une grande crainte, voire même une grande frayeur car  les hommes prient pour être sauvés des malédictions proférées par la Torah contre ceux qui transgressent les Paroles divines et que le châtiment  promis devra se réaliser dans ce monde ou dans l’autre.

L’amour a précellence sur la requête et celle-ci sur la crainte ; pourtant. Les trois sacrifices sont offerts dans le même Temple par le même  Cohen à D. Ils sont donc égaux. Ceci veut dire qu’en servant D., l’homme agit par amour en réclamant toujours quelque chose, et en craignant D., l’homme s’abrite toujours dans l’Ombre du Saint-béni- soit- Il.

George Vajda, zal, (anciennement Professeur de Philosophie à la Sorbonne) s’exprimait ainsi : l’amour de D. est en quelque sorte le ressort principal des relations entre D et Israël….et, si Israël est fidèle à D., c’est par amour. C’est la raison pour laquelle tout au long de l’Histoire du peuple juif sont citées des personnes qui ont préféré perdre la vie plutôt que d’être infidèle  à D. et L’abandonner.

Aimer D. est donc un engagement total de l’individu et non moins total de la collectivité. L’homme ne devrait donc jamais s’imposer de limites dans l’observance des mitsvoth et par là aussi, à la soumission au Créateur ; l’être humain devrait être vigilant   Afin qu’aucune défaillance de notre part ne vienne entacher cet amour livré au Créateur et au respect ou à l’hommage qui Lui est dû.

L’une des meilleures illustrations d’un amour sans faille pour le Créateur est celle du sacrifice d’Isaac, c’est grâce à cet amour inconditionnel des patriarches a sans aucun doute comme récompense directe l’élection du peuple juif.

Abraham le Patriarche aimait D. inconditionnellement, sans en attendre quoique ce fût tout en Le craignant….

Dans le Sefer Hayashar attribué à Rabbénou Tam (petit fils de Rashi), est posée la question : comment servir D. ? Par la foi est la réponse.

Qu’est -ce que la foi ? Elle résulte de plusieurs vertus : elle dérive de la raison ou de l’intelligence, celle-ci étant un composé d’amour, de crainte et de sagesse. Dans l’analyse de ces notions on peut trouver ceci : les piliers du culte sont au nombre de 5 : l’intelligence, l’amour, la crainte, la sagesse et la foi.

L’intelligence exige des soins attentifs et si l’on y arrive, l’homme atteint presque un degré de perfection car à ce moment- là, il sert D., L’aime et Le craint. En effet l’homme intelligent peut ressentir un amour inspiré de l’une de ces trois façons :
1- Utilité ou espoir d’un avantage,
2-Association ou camaraderie,
3- Inspiré par les vertus de l’aimé.
Or, vis à vis de D., seul l’amour inspiré par les vertus divines est solide.
L’intensité de cet amour est porté aux vertus de l’aimé et est proportionnel à ses propres vertus qui sont l’intelligence et l’âme pure. C’est la raison pour laquelle tout homme à l’intelligence saine et à l’âme pure se sent attiré vers l’amour de D.

L’auteur du Sefer Hayashar, fait remarquer qu’en observant le comportement d´un être qui en aime un autre, il essaie toujours  d’être à son service et, lorsqu’il fait quelque chose qui plaît à l’être aimé, il en éprouve un grand bonheur ;   mais, si, au contraire, il fait quelque chose qui déplaît à cette même personne, il en sera chagriné , désolé voire gêné ou honteux et en concevra un malaise puisque ses actes auront déplu ; aussi, demeurera-t-il dans la crainte.

C’est cela la crainte de D. : c’est avoir des attentions et des intentions pures envers D. pour ne pas Le chagriner, D. prenant ici l’endroit de l’aimé s’il est possible de s’exprimer de la sorte et de même que la poésie biblique et mystique campe l’amour entre D. et Son peuple…comme s’il s’agissait de l’amour charnel d’un homme et d’une femme. …..

Le Sefer Hayashar et le Maharal de Prague ont en quelque sorte la même  approche  puisque le Maharal s’exprime ainsi pour définir celui qui craint D. : c’est la conscience de l’homme qu’il n’est rien devant la Cause, c’est le sentiment d’être une chose créée et du rapport qui existe entre lui et D. (le Créateur).

Pour le sefer Hayashar, amour et crainte ne sont pas suffisants: il faut y adjoindre la science et la sagesse car, celui qui n’a pas de science ne connaît  pas les vertus de l’aimé donc, l’amour de l’ignorant n’est pas amour, car il n’est pas parfait et ne tend pas même à l’être, or, ce qu’il faut, c’est au moins atteindre à un degré de perfection. L’intelligence lie donc l’amour , la crainte et la science et aucun d’entre ces trois- là n’est parfait sans les deux autres or, ils ont un but: le service de D. : cependant, il ne saurait être question de service de D. sans foi, c’est-à-dire, sans conviction ou sans hypocrisie et, à ce moment-là, il y a obligation désagréable.

Ce raisonnement nous démontre que le fondement du service de D. est la foi et, foi et service de D. se complètent car il ne peut y avoir l’un sans l’autre et procèdent des trois précédents (amour, crainte et sagesse) et par conséquent de l’intelligence.
Pour arriver au service de D. et à la foi, il y a trois degrés à gravir. Le degré inférieur est l’intelligence (degré supporté par quatre piliers qui sont l’étude, le discernement, l’expérience de la vie et la longévité.

A partir de ce degré, l’homme s’élève vers celui de l’amour et de la crainte ainsi que de la science ; ces trois piliers soutiennent le degré supérieur : foi et service. Ces deux piliers composent ce degré supérieur grâce auquel on peut atteindre le plus haut niveau de la conduite humaine : saisir la volonté de D. et être en parfaite communion avec Lui.  C’est-à-dire l’Unité de D. : la Emouna. Il est dit dans le Deutéronome VII, 13 : Il t’aimera et te bénira, si nous- mêmes l’avons aimé et écouté en parvenant à ce haut niveau dont nous venons de  parler. D. aimera cet homme et comblera tous ses vœux, son âme subsistera après la mort et, si un homme souffre sur terre, il peut être assuré de l’amour que D. lui porte car il est de passage sur terre et lors de ce passage, il expie ses fautes ainsi, pourra-t-il dans le monde futur jouir de la récompense à ses bonnes actions, alors que l’autre homme, celui qui a beaucoup de chance sur terre, doit comprendre que cet amour lui est non pas refusé mais qu’il est en examen.
Pour servir D. il faut à l’homme :
1-Un cœur pur et bon car si l’on est bon avec ses semblables, on l’est forcément vis-à-vis de D.
2- Croire que tout est imparfait hormis D.
3-Postulat lié au second point : reconnaître que D. est parfait,
Lorsque ces trois qualités sont réunies, le culte de D. est parfait. De l’amour procède la crainte mais la réciproque n’est pas toujours vraie et D. a loué l’homme pour son amour car la crainte sans amour est propre aux méchants et aux autres nations et non aux tsadikim auxquels s’adresse la mitsva de VeAhaveta.
Reconnaître que D. est parfait. Dans le livre de l’Exode (שמות) il est écrit « ils ont craint D » c’est-à-dire qu’ils ont reconnu D  il s’agit là de la crainte révérencielle dont il est question supra.

Pour être reconnu comme aimant D., l’homme doit pouvoir disposer des dix qualités suivantes :
Aimer la loi divine
Se délecter du service de D. plus que tout objet de délectation
Mépriser ceux qui méprisent D. (athées etc…) et aimer ceux qui L’aiment.
L’amour des biens de ce monde ne doit pas compter devant le service de D.
Toutes peines, privations, souffrances, seront douces en regard de l’amour de D.
Nulle affaire personnelle ne prendra le pas sur les affaires de D.
Proclamer l’amour de D. devant les hommes et s’en glorifier
Ne point prêter l’oreille aux discours de ceux qui veulent séduire l’amant en le détournant du service de D.
Nul événement heureux ou malheureux ne fait déserter à l’amant le service de D
Ce service ne visera aucune récompense car il dépendrait alors de quelque chose d’autre et pas de D.
En réunissant ces dix critères, l’homme devient un Amant de D et atteint un sommet de piété.

Le Sefer HaYashar souligne encore que si l’amour et la crainte ont pour motif une attente, ils ne pourront être durables car, ils disparaîtront dès que l’attente sera comblée ou frustrée. Il ne faut pas que la crainte de D. prenne le dessus de l’amour dont elle procède au risque d’affaiblir cet amour et les vertus qui le caractérisent et en découlent. C’est par rapport à l’équilibre que la créature saura donner à cet amour et la crainte de D que l’homme sera jugé. Cependant, l’Ecriture et la tradition s’accordent à qualifier de crainte des Cieux, un amour très intense  et essentiel.

La crainte de D., du Ciel, n’est donc pas une simple crainte-peur, peur de la punition, mais crainte révérencielle qui comporte une note haute en respect,  une notion profonde de l’infiniment petit de la créature face à l’Infiniment Puissant qu’est l’Etre Suprême, de l’être aussi imparfait  que peut l’être l’homme face à la Perfection du Créateur, de la créature impure obéissant à des instincts ou des penchants incontrôlés face à la Pureté et la Sainteté.

En conclusion du livre de l’Ecclésiaste (קוהלת), Salomon s’écrie
: Crains D. et Ses Paroles, observe-les, car c’est là tout l’homme (  סוף דבר הכל נשמע, את האלקים ירא ואת מצותיו שמורכי זה כל האדם ) dans les Maximes des Pères (פרקי אבות), se trouve un conseil judicieux (פרק 6) Craignez D. comme vous craignez les hommes, ce sera déjà un bon point……. ואמרו חכמי המוסר שהלוואי שנירא את ה׳ כמו קטנים ונשים מפני שבדרך כלל פוחדים מאנשים ולא מהקב״ה…

Caroline Elishéva REBOUH

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