Deux commémorations majeures, d’envergure nationale, concernant la communauté juive se dérouleront en cette rentrée culturelle 2012/2013 en prélude aux festivités qui accompagneront «Marseille 2013 – Capitale Européenne de la Culture».

Ces évènements célèbrent le «souvenir» et la pluralité de cette mémoire qui, à l’image du peuple juif, est d’une grande diversité.

Ainsi, seront abordés des sujets éclairant différentes facettes de notre patrimoine culturel et historique tel que le cinquantenaire des rapatriés juifs d’Algérie et la déportation, avec l’inauguration du complexe mémoriel du «Camp des Milles», ce lieu d’internement et de transit situé en «zone libre», au sud de la France, et à partir duquel tant d’innocents sont partis vers les camps de la mort.

Ces années juives d’Algérie


Mariée juive d’Alger (Delacroix)

Pourquoi célébrer ces années juives d’Algérie, celles d’une communauté minoritaire parmi les rapatriés ?

Parce qu’il est temps que la vérité soit dite, après le silence et avant que l’oubli ne s’installe.

La présence juive date de l’antiquité avant même la colonisation arabe, avec un afflux majeur lors de l’Inquisition.

Leur statut était celui de dhimmis, justes tolérés, avec des humiliations quotidiennes, même si cela était plus enviable qu’en Espagne.

Cette situation très précaire explique pourquoi «les juifs acceptèrent avec soulagement en 1870 la nationalité française» qui allait leur ouvrir les portes de l’ascension sociale via l’éducation et l’emploi.

Même si là aussi tout n’était pas rose pour ces français récents avec en point de mire l’abrogation par Vichy de leur nationalité, ils ont toujours été des citoyens loyaux attachés à la Mère patrie.

Puis la guerre de sept ans et le grand départ en 1962, «La valise ou le cercueil», et le rapatriement vers la métropole qu’ils ne connaissaient pas vraiment.

L’accueil fut des plus mitigés.

Il s’agissait d’un exode massif et complet de 1,5 millions personnes, dont 130.000 juifs, qui étaient perçus comme des colons et, quelque part, responsables de cette guerre.

Il faut rétablir la vérité et rappeler que c’est très largement à Paris, au Palais Bourbon et du Luxembourg que cette politique coloniale a été décidée dès les années 1830.

Durant toute cette longue période, les juifs d’Algérie ont su développer une tradition riche à tous les points de vue : sur le plan religieux avec des sommités rabbiniques reconnues tels que le Ribach et le Tachbetz d’Alger ou le Rav de Tlemcen Ephraïm Ankaoua. Mais également sur le plan du quotidien, vestimentaire ou culinaire et de la culture en général.

Avec le déracinement, cette culture unique, synthèse de plusieurs courants, risquait de se perdre et la mémoire avec.

Avec l’aide des institutions juives, ils ont su la perpétuer discrètement et se réinsérer de manière exemplaire dans leur nouvel environnement. Il est désormais temps de témoigner publiquement pour les générations à venir.


Tombeau du Rav de Tlemcen Ephraïm Ankaoua

Pour ce faire, sous l’égide du Collectif Juif Marseillais «Commémoration du cinquantenaire de l’exode des Juifs d’Algérie» plusieurs manifestations autour de la préservation de cette mémoire seront organisées.

Cette initiative réunit des membres de nombreuses associations juives marseillaises et parmi elles : la Wizo, le Bnai Brith, le Casim, le Centre Fleg, judaïsme et liberté, le DEJJ, les EEIF, Ets Haim, KKL et diverses synagogues.

Dans ce cadre, le Centre Culturel Edmond Fleg, partenaire du Magazine «Cœur de Ville», proposera deux expositions originales l’une sur «les expressions des juifs d’Algérie», l’autre sur «les objets, documents et costumes rappelant l’art de vivre des communautés juives d’Algérie».

Viendront compléter ces évènements, la projection d’un film inédit «Un paradis perdu» en présence de son réalisateur, ainsi qu’un dimanche spécial pour apprendre et découvrir comment préparer les meilleures recettes culinaires des juifs d’Algérie.

Le site-mémoriel du Camp des Milles ouvre ses portes


Camp des Milles

Le 12 septembre 2012, près d’Aix-en-Provence, le site-mémoriel du Camp des Milles ouvre ses portes avec des objectifs forts, nourris de l’histoire tragique de cette ancienne tuilerie. «Un lieu banal que rien ne prédisposait à ce funeste destin», comble de l’incurie des dirigeants de l’époque et qui conduisit au summum de l’horreur, Auschwitz.

Une approche scientifique pluridisciplinaire où l’émotion et l’art ne sont pas absents, avec les œuvres réalisées par les internés, mais qui se veut avant tout factuel pour que plus jamais un tel drame ne se reproduise en aucun lieu de la planète.

Jeunes et moins jeunes pourront apprendre, découvrir ou se remémorer un visage de la France que l’on a trop longtemps voulu occulter, mais qui fait partie de son histoire.

Sans cela, point de victimes, point de héros et point de libérateurs et donc de morale que l’on peut résumer à la formule : pas de passé, pas d’avenir.


Vel d’hiv

Ce visage de la France s’affiche désormais en plein jour comme l’on reconnut tout d’abord Jacques Chirac, puis récemment François Hollande lors des cérémonies commémoratives des victimes du Vel d’Hiv.

Oui ce qui s’est passé là ce n’était pas au milieu de nulle part, mais bien quelque part en France.

«Plus jamais ça nulle part dans le monde».

Mais avant toutes choses permettez-moi de vous souhaiter que les fêtes de Tichri soient placées sous les meilleurs auspices.

Et n’oubliez pas de venir nombreux au Centre Culturel Edmond Fleg de Marseille pour assister aux activités que toute l’équipe vous a préparé en lien avec ces thématiques.

A très bientôt et Shana Tova.

Pr Hagay Sobol/ Benillouche Blog Article original

Président du Centre Edmond Fleg de Marseille

copyright © Temps et Contretemps

Références :

Pourquoi un cinquantenaire spécifique pour les juifs d’Algérie ? par Jean-Louis Ayoun

Mémoire Juive d’Algérie par Pr Raphaël Drai

Judaïsme d’Afrique du Nord et Halakha par le Grand Rabbin A Hazan

Il y a 50 ans l’arrivée des juifs d’Afrique du Nord à Marseille par Martine Yana

1962 – 2012 : 50 ans de présence à Marseille pour les juifs d’Algérie par Bernard Rebouh

Mémoire pour aujourd’hui et demain par Jean Eyguesier

J’avais entendu parler d’un certain de Gaulle, entretien de Sidney Chouraqui par Jean Eyguesier

TAGS : Juifs d’Algérie Vichy Centre edmond Fleg Marseille Camp des Mille

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