Où sont les vrais dangers pour Israël ?

Ce n’est pas l’Iran ou même les Palestiniens : la menace qui pèse sur Israël c’est son propre avenir, donc l’avenir de nos enfants . Et ce danger est donc intérieur.

Les vrais dangers qui planent sur l’avenir d’Israël sont d’ordre social et économique : si les enfants ultra-orthodoxes ne sont pas équipés des outils qui leur permettront de participer au marché du travail moderne, l’État sera en difficulté.

En milieu de semaine, le Premier ministre Yair Lapid , accompagné de cinq survivants de la Shoah, s’est envolé pour l’Allemagne. Il a convaincu le chancelier Olaf Schulz quant à la position d’Israël concernant l’accord nucléaire, a signé des accords de sécurité et des accords d’approvisionnement, il est intervenu (par téléphone) dans un effort pour résoudre la crise des internes de l’hôpital, et immédiatement après sa visite, il est devenu clair que l’Allemagne paierait 200 millions de shekels supplémentaires à 14 000 survivants de l’Holocauste.

Dans le même temps, le ministre de la Défense Benny Gantz a accueilli en Israël (avec le chef d’état-major Aviv Kochavi) des chefs d’état-major et des chefs de délégations militaires de 18 pays lors de la « Semaine de l’innovation » de Tsahal. Gantz a rencontré le chef d’état-major marocain (première fois en Israël) , s’est assis avec le chef d’état-major américain, le général Mark Milley, qui est le commandant du CENTCOM, le général Eric Coryla et bien d’autres. L’événement a également réuni les chefs d’état-major de la Grèce, de Chypre, de la Pologne et de la République tchèque, ainsi que des généraux de haut rang de l’OTAN, des Émirats, Grande-Bretagne et plus encore.

Qu’a fait le chef de l’opposition Netanyahu pendant ce temps ?

Il a réussi à empêcher un accord historique entre le mouvement hassidique de Bêlez et le Trésor public , en vertu duquel ils commenceraient à enseigner les matières profanes dans leurs institutions éducatives, tandis que l’État augmenterait sa participation à la budgétisation de leur système éducatif. Netanyahu a fait cela pour empêcher une scission dans le judaïsme de la Torah, une scission qui pourrait faire s’effondrer son bloc religieux-orthodoxe, cela en accordant une subvention d’état sans contrepartie. Le bloc orthodoxe comprend deux tendances, une qui intègre les études profanes dans leur système éducatif, l’autre qui ne veut même pas en entendre parler.

L’effondrement de ce bloc ne mettra pas le pays en danger, mais il mettra grandement en danger Netanyahu. Si le bloc s’effondre, le rêve d’une coalition majoritaire est mort. Netanyahu se trouverait seul face à son destin. Même s’il sait mieux que nous tous les dommages stratégiques que cet accord sur la base d’une corruption va infliger au pays, il l’a mis en place sans sourciller. Tout comme il a laissé le pays sans budget et  lui a fait subir cinq cycles électoraux.

Le pays est important pour lui, presque autant que lui. Ce sujet n’est pas nouveau, il n’est pas savoureux et pas intéressant, mais rien n’est plus important que lui, pour l’avenir d’Israël et sa prospérité. Oui, Israël est un pays fort. Sa force militaire, technologique, de renseignement, économique et scientifique est incommensurablement supérieure à ce que tous ses ennemis peuvent présenter sur le terrain, ensemble.

« Notre situation n’a jamais été meilleure », c’est un cliché répété par les dirigeants israéliens avant la guerre du Yom Kippour, avant que ce coup ne soit porté à leur arrogance.

Ce cliché est bien plus vrai cette fois : paix stable avec l’Egypte, paix stable avec la Jordanie, Syrie désintégrée, Liban désintégré, Irak désintégré. La menace iranienne est importante mais pas immédiate, et même si elle l’est, Israël a les outils pour y faire face, sur tous les fronts. Une seule exception, c’est le conflit avec les Palestiniens. Personne ne sait vers où l’on va. Il n’y a aucune direction donnée par le Gouvernement, et les alliés d’Israël sont resté sur une vision vielle de 55 ans. Ce sujet ne peut pas être retiré de l’ordre du jour et il n’y aura jamais de paix ici tant qu’il ne sera pas résolu, et personne ne sait comment et quand. En revanche, il n’est pas défini comme une menace existentielle.

La véritable menace qui pèse sur l’avenir de nos enfants, de leurs enfants et de leurs petits-enfants c’est une menace interne. Ce n’est pas un ennemi étranger ou une guerre qui nous met en danger, mais les processus démographiques, sociaux et économiques qui pourraient dégénérer Israël. En une génération on peut transformer une puissance économique et technologique avancée en un État en faillite. Un pays en faillite est incapable de maintenir ses réserves intellectuelles, technologiques et économiques. La population aisée, abandonne la faible, qui coule. Regardez au nord vers le Liban. C’est le modèle.

C’est une question de démographie. Déjà aujourd’hui, dans les premières années, il y a plus d’élèves qui ne s’enrôlent pas dans l’IDF que ceux qui le font. Environ la moitié des élèves de première année sont arabes ou ultra-orthodoxes. Cette statistique ne changera pas, bien au contraire. Dans une décennie ou deux, les ultra-orthodoxes seront l’un des plus grands groupes de population en Israël et ne s’enrôleront probablement plus dans l’armée israélienne.

Ce combat a échoué, il faut le reconnaître. Il n’y a aucune force au monde qui puisse forcer des milliers d’adolescents à abandonner la Yeshiva, à enlever leurs uniformes noirs et à porter les uniformes olive. Si cela se produit, ce ne sera qu’au terme d’un lent processus historique social, sans coercition. Cela n’arrivera peut-être jamais si ne le fait pas. Tsahal devra se débrouiller sans eux.

Ce qui devrait vraiment nous déranger, c’est la question économique. Je n’essaie pas de dire ici ce que disait le ministre des Finances Benyamin Netanyahou en 2003, dans une interview avec Sheli Yachimowitz : « Les allocations familiales ont habitué des populations entières dans le public arabe et le public ultra-orthodoxe en particulier, à faire en sorte que ce qu’une personne, fait dans le cadre de son travail, ce sont en fait des enfants », « il fait des enfants et il élèvera des enfants dont le travail consiste à faire des enfants… Je veux que les gens fassent des enfants quand ils peuvent et doivent subvenir à leurs besoins… Une personne doit comprendre que sa responsabilité première est de subvenir aux besoins de ses enfants, e, de prendre soin de leur avenir. Il ne peut pas se dérober à cette responsabilité ni la transférer à l’État.

Ben Caspit – Israël Hayom – Jforum.fr

NDLR : Il y a en effet, un grave problème d’éducation dans une partie du monde hassidique. Mais parler des prévisions démographiques catastrophiques comme le fait la gauche pour justifier de positions politiques actuelles, sur la base de projections hypothétiques – jamais confirmées au demeurant -, reste une erreur intellectuelle contestable, voire dangereuse à bien des égards. La gauche israélienne n’a eu de cesse de nous parler d’écrasement de la population juive par la population arabe, ce qui n’a jamais eu lieu. Bien au contraire la population juive s’est considérablement renforcée au cours des années. Au moment où une partie de la population orthodoxe fait l’effort de s’intégrer dans la société israélienne, il faudrait d’abord voir la partie à moitié pleine du verre, que la partie à moitié vide. De plus ce qui vaut pour les hassidim vaut aussi pour les classes sociales les plus défavorisées, que ni la gauche ni la droite n’ont prises en considération. Être de gauche c’est d’abord lutter contre la fracture sociale, et non en créer ou entretenir une fracture, en opposant religieux et non religieux. Dernier point, la concession, si concession il y de la part de Netanyahu, aux orthodoxes reste moins dangereuse que celle faite aux partis arabes.