Le Mossad, véritable couteau suisse des gouvernements d’Israël… (Suite et fin)

Le monde des services secrets, disais-je à la fin du premier article sur le livre de Gordon Thomas., est fascinant, je dois ajouter qu’il est aussi impitoyable.

C’est sa nature elle-même, et en principe, il doit rester secret, ce qui pose le problème de son contrôle dans les démocraties. D’ailleurs, presque tous les présidents de la République française s’occupent de changer le titulaire du poste car il en sait parfois plus qu’eux-mêmes. Israël ne fait pas exception à la règle.

Il y a quelques temps, les médias israéliens dont on connaît la dureté et la voracité, s’étonnaient de l’absence du Premier Ministre Netanyahou durant toute une journée.

On se demandait où il avait bien être  et les spéculations allèrent bon train. Il était, disait les uns, allé discrètement rencontrer le président US. Mais pas du tout, il avait, dans le plus secret, passé la journée à la Kirya avec les dirigeants du Mossad…

Le Mossad doit surveiller tous les mouvements islamistes quels qu’ils soient car leur dénominateur commun est toujours le même : la haine d’Israël, la volonté proclamée urbi et orbi de détruire l’Etat juif. Pas étonnant que le Mossad surveille aussi la toile pour découvrir ce que ses ennemis ourdissent contre lui.

Le service est aussi actif dans la guerre psychologique. On l’a vu pour Arafat, on le voit actuellement pour l’Iran : hier soir, j’ai vu une vidéo  de quelques minutes en anglais exhibant des iraniennes toutes de noir vêtues, pleurant leurs morts et se plaignant de la cherté du coût de la vie.

C’est Tsahal qui était à la manœuvre, mais on sait que c’est le Mossad qui en est toujours la cheville ouvrière… Il est vrai que le volume pris par la haine anti-israélienne avait atteint de telles proportions qu’une vigilance renforcé  s’avéra plus que nécessaire.

Cette expertise des maîtres espions de l’Etat juif a connu des hauts et des bas, mais les uns comme les autre forçaient l’admiration. Souvenons nous de l’espion Elie Cohen auquel une série vient d’être consacrée qui a gravi toutes les marches du pouvoir, avant d’être démasqué et d’être pendu en place publique, à Damas..

Israël fait des pieds et des mains pour rapatrier son corps. Si ma mémoire ne me trompe, on a retrouvé il y a peu une montre qui semble avoir été la sienne, mais nul ne se souvient du lieu de sa sépulture.

C’est encore le Mossad qui a tout mis en œuvre lors de l’opération Moïse, destinée à ramener en Terre sainte les Juifs d’Ethiopie. C’est encore et toujours le Mossad qui intervient en plein territoire hostile, loin derrière les lignes ennemies pour mener à bien ses missions.

L’un des coups les plus fumants (si vous m’autorisez à utiliser cette expression familière), fut le vol en plein Téhéran, au nez et à la barbe des mollahs, des archives sur la réalisation d’une arme nucléaire. Le Premier Ministre Netanyahou a pu présenter à la télévision toutes ces archives que l’Etat juif a permis aux services amis de consulter sur place. On pourrait sans  peine multiplier les exemples. Mais il est un autre aspect hautement intéressant de ce livre : je pense à la présentation des différents caractères des plus hauts dirigeants du pays.

Comme c’est toujours le chef du Mossad, le fameux Méir Dagan qui mène le jeu, on a droit à une émouvante description des derniers instants d’Ariel Sharon en tant que Premier Ministre ; Frappé par un accident vasculaire cérébral, pesant près de cent quarante kilos, le général victorieux de la guerre de 1973, s’était remis au travail.

On lit comment les deux hommes se faisaient totalement confiance, se connaissant depuis bien avant la guerre du Liban ; ils évoquaient leurs souvenirs mais la visite du chef espion dans le ranch du Premier Ministre  obéissait à une décision d’urgence : fallait il lancer une attaque préventive contre l’Iran des mollah afin de détruire une fois pour toutes ses velléités nucléaires.

Peu avant son départ, Dagan remarqua la fatigue du Premier Ministre qui devait subir le lendemain une seconde intervention chirurgicale avec une anesthésie générale. Mais peu après son départ, une seconde attaque survint et qui fut fatale au Premier Ministre.

Son médecin personnel était bien sur place mais il comprit que la situation n’était pas très bonne. Parvenu à l’hôpital, le Premier Ministre décéda après une opération de plus de sept heures !

Petite pensée délicate des ennemis d’Israël : le Hamas priait pour le décès du général tandis que Ben Laden priait pour qu’il souffre, que son agonie fût terrible et interminable. Encore un exemple de cette inextinguible haine que certains vouent à l’Etat juif dont le seul crime est de vouloir revivre sur lre sol ancestral. Le Moyen Orient ne ressemble à aucune autre région de ce bas monde !

Gordon Thomas nous livre aussi que dans cet univers clos et secret, personne ne fait confiance à personne. Pour reprendre un bon mot de Margaret Thatcher : nul ne peut vous surprendre plus qu’un ami…

Peu avant le déclenchement de la guerre du Golfe, Tony Blair, alors Premier Ministre et Georges Walker Bush, décident de faire espionner leur allié espagnol, José Maria Aznar, dont la détermination à aller au combat contre Saddam laissait à désirer.

Il faut dire que l’écrasante majorité du peuple espagnol était contre cet aventurisme militaire et Aznar pouvait flancher à tout instant. Lorsqu’elle fut découverte, l’affaire fit grand bruit. L’ambassadeur espagnol à l’ONU se montra philosophe : tout le monde espionne tout le monde ici, et si on ne vous surveille pas, c’est que vous ne valez rien…

C’est une façon de voir les choses. Et le Mossad ne se gênait pas pour surveiller de près certains pays arabes mais aussi d’autres nationalités.

Bref, tout le monde espionne tout le monde, y compris entre alliés.  Kofi Anan, secrétaire général de l’ONU était espionné par les services US. On dit même que Netanyahou aurait fait écouter le président Trump pour connaître le fin mot de son plan de paix.

Mais pour l’Etat d’Israël, tout savoir avant tout le monde, c’est une garantie de survie.

Pour Israël continuer à exister relève d’un acte d’héroïsme quotidien. Quand donc la situation de veillée d’armes changera t elle ? Dieu seul le sait.

Maurice-Ruben Hayoun

Le professeur Maurice-Ruben Hayoun, né en 1951 à Agadir, est un philosophe, spécialisé dans la philosophie juive, la philosophie allemande et judéo-allemande de Moïse Mendelssohn à Gershom Scholem, un exégète et un historien français. il est également Professeur à  l’université de Genève. Son dernier ouvrage: Joseph (Hermann, 2018)

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