Il était totalement improbable, il y a quelques mois encore, que l’on parlerait d’une alliance aussi étroite entre les ennemis d’hier. Tout a radicalement changé, à cause ou grâce aux besoins des uns et des autres de sécurité, de coopération et de croissance partagée. La prise de conscience de la stérilité des discours anciens laisse apparaitre les bénéfices de relations sorties de leurs fantasmes de voir Israël disparaître de la carte du monde. La rhétorique ancienne sur laquelle campent les terroristes s’effondre en même temps que naissent une autre vision et un autre avenir. Ce bouleversement est du domaine du miracle

Face à l’Iran, un système de défense commun israélo-arabe ?

Si le gouvernement israélien ne tombe pas d’ici là, la prochaine tournée de Joe Biden au Moyen-Orient pourrait permettre de restaurer les liens américains avec les États arabes du Golfe face à l’Iran. Au menu : un projet de défense commun américano-arabo-israélien.

Prévue fin juin, la visite du président américain, Joe Biden, en Israël et dans les pétromonarchies pourrait enclencher une montée en puissance significative de la coopération militaire entre Israël et les États arabes du Golfe, ces derniers ayant signé des accords de paix [dits “accords d’Abraham”] avec l’État juif et les États-Unis sous l’ancienne administration du républicain Donald Trump.
Ces derniers mois, les monarchies arabes du Golfe ont semblé se distancier de l’administration démocrate américaine, notamment sur la question ukrainienne. La nécessité de renforcer les liens entre Israël, les États-Unis et les monarchies du Golfe (y compris l’Arabie saoudite, qui n’entretient pas officiellement de relations avec l’État hébreu et était jusqu’à il y a peu en froid avec l’administration Biden) est au cœur des discussions entre Jérusalem et Washington.
Sur le plan opérationnel, cette coopération renforcée pourrait prendre la forme d’un système régional de défense commun pour aider les États de la région à répondre collectivement et de façon coordonnée à la menace croissante des missiles balistiques et de croisière iraniens, ainsi que de leurs drones.
L’ordre du jour de la visite du président Biden en Israël n’a pas été rendu public, d’autant qu’elle pourrait être parasitée, voire empêchée par une possible implosion du gouvernement israélien de coalition Bennet-Lapid.
L’un des principaux objectifs de Washington est de restaurer les relations avec Riyad. L’assassinat, en 2018 en Turquie, du journaliste saoudien Jamal Khashoggi et les révélations sur l’implication personnelle du prince héritier saoudien Mohammed ben Salmane dans ce meurtre avaient mis à mal les relations entre le Parti démocrate américain et Riyad, ce qu’avait illustré la réaction plus que tiède de l’Arabie saoudite à l’élection de Joe Biden.
Mais les États-Unis ont plus que jamais besoin du Golfe, compte tenu de la hausse mondiale des cours du pétrole et de l’invasion de l’Ukraine par la Russie.

Un pour tous, tous contre l’Iran

Pour rebâtir ses relations avec les monarchies du Golfe, Washington attend d’Israël qu’il poursuive et augmente ses ventes d’armes aux Émirats arabes unis (EAU) et fasse preuve d’une plus grande ouverture envers l’Arabie saoudite. Ainsi, une idée désormais sérieusement débattue porte sur la mise sur pied d’une architecture sécuritaire régionale axée sur l’amélioration des systèmes de défense face aux missiles et drones iraniens.
Ces trois dernières années, l’Iran a lancé des dizaines d’attaques de drones contre des installations et des infrastructures pétrolières en Arabie saoudite et dans les EAU. La plus grave a été une attaque contre un complexe d’Aramco, en septembre 2019. Depuis lors, les États arabes du Golfe ne songent plus qu’à perfectionner leurs systèmes de défense, d’autant que certaines de ces attaques ont été menées par des rebelles houthistes au Yémen, lesquels reçoivent une aide militaire considérable de Téhéran.
Dans un discours prononcé il y a deux semaines à l’université Reichman [une université privée située à Herzliya, au nord de Tel-Aviv], le ministre de la Défense, Benny Gantz [Kahol Lavan, droite modérée], a évoqué la menace des drones et missiles de croisière iraniens de longue portée. “En Irak, il y en a des centaines. Des dizaines d’autres vont s’y ajouter cette année”, a-t-il déclaré.

“Au Yémen, leur nombre a augmenté et les houthistes [soutenus par l’Iran] en ont des dizaines, malgré l’embargo international. En Syrie, les Iraniens poursuivent leurs efforts pour fabriquer et transférer des armes de haute précision. Israël continuera de contrer ces efforts et de prévenir toute menace contre ses citoyens et la région.”

À l’échelle du Moyen-Orient, Israël a beaucoup à apporter en matière de systèmes défensifs, de développements technologiques, d’outils de collecte de renseignements et de capacité à intégrer et à coordonner ces systèmes. Mais, contrairement à ce qui est rapporté dans certains médias, cela n’inclut pas la vente de systèmes antimissiles inspirés du programme israélien Kipat Barzel [“Dôme de fer”].
D’un autre côté, la connexion aux systèmes d’alerte israéliens pourrait réduire considérablement les temps d’alerte dont disposent les États du Golfe en cas d’attaque iranienne. Cet avantage serait à double sens, l’installation de stations radars israéliennes dans le Golfe permettrait à Israël d’être averti beaucoup plus tôt qu’aujourd’hui des tirs de missiles iraniens.

Une alliance arabo-israélienne sous alibi américain

Depuis la signature des accords d’Abraham [en septembre 2020], les États arabes du Golfe ont renforcé leur coopération avec Israël, y compris sur le plan opérationnel. Ces deux derniers mois, plusieurs sites web spécialisés à la fiabilité reconnue ont signalé que de nombreux avions-cargos atterrissaient en Israël en provenance des EAU avant de s’en retourner vers leur base.
Le renforcement des relations avec les pays du Golfe est lié à une initiative américaine parallèle, laquelle vise à transférer au Centcom [Commandement central américain, force de déploiement rapide américaine au Moyen-Orient, en Asie centrale et en Asie du Sud] la responsabilité de coopérer avec Tsahal. À Ha’Aretz, des sources anonymes mais de haut rang de Tsahal confirment que cette initiative américaine avait grandement contribué à faciliter la coordination quotidienne entre Israël, d’une part, et tous les États du Golfe, d’autre part, certains d’entre eux craignant jusqu’alors de passer aux yeux d’une partie de leurs opinions publiques pour des “valets” d’Israël.
En mai dernier, un officier supérieur du Centcom s’est rendu en Israël, une première. Le général américain Michael Kurilla a rencontré le ministre israélien de la Défense, Benny Gantz, et le chef d’état-major de Tsahal, Aviv Kochavi, et a assisté à des exercices militaires israéliens. Tsahal affectera bientôt un officier de liaison permanent auprès de la Ve flotte de la marine américaine, dont le QG est basé à Bahreïn, État avec lequel Israël a, en septembre 2020, normalisé ses relations dans le cadre des accords d’Abraham.

Haaretz

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