Emmanuel Macron et Mark Zuckerberg, le 23 mai 2018 à l’Elysée (Christophe Petit Tesson/AP/SIPA )

La France et Facebook vont travailler ensemble sur le contrôle des contenus sur les réseaux sociaux et internet, a annoncé lundi 12 novembre à Paris Emmanuel Macron.

Facebook « accueillera prochainement une délégation de régulateurs français », qui « auront pour mission, avec les experts » de Facebook de « faire des recommandations conjointes précises, concrètes, sur la lutte contre les contenus haineux et offensifs », a indiqué le président français à l’Unesco, en lançant les travaux du Forum international sur la gouvernance de l’internet, qui se tient chaque année.

Il a affirmé :

« Je me réjouis de cette démarche expérimentale très innovante qui permettra de réfléchir très concrètement aux meilleures voies pour garantir que les grandes plateformes appliquent un haut niveau de qualité dans la modération des contenus. »

Etats et acteurs privés du réseau mondial doivent « apprendre à réguler ensemble », pour « sauver l’internet libre » des menaces qui se font de plus en plus précises contre lui, a insisté Emmanuel Macron.

« Les très grandes plateformes (internet) ne peuvent pas être exonérées de toute responsabilité. »

Le discours d’Emmanuel Macron au Forum sur la gouvernance de l’internet

Voyages chez Facebook en Irlande et en Californie

Facebook a confirmé de son côté la constitution d’un « groupe de travail » avec des régulateurs français, qui « voyagera sur différents sites de Facebook autour du monde, dont probablement Dublin et la Californie ».

Nick Clegg, le nouveau directeur des affaires publiques de Facebook pour le monde, a déclaré que le réseau social acceptait l’idée d’un « besoin de régulation ».

« Le meilleur moyen de s’assurer qu’une régulation est intelligente et fonctionne […] est que les gouvernements, les régulateurs et les entreprises travaillent ensemble pour apprendre de chacun et explorer des idées », a-t-il indiqué, cité par un communiqué de Facebook.

L’idée d’une collaboration entre le réseau social et l’administration française est née lors de l’entretien d’Emmanuel Macron avec Mark Zuckerberg au printemps à l’Elysée, ont indiqué l’Elysée comme Facebook.

Selon des sources gouvernementales française, la délégation française qui commencera à travailler au début du mois de janvier prochain sera composée d’une poignée de fonctionnaires, issus de différentes agences de l’Etat ou ministères, comme l’Arcep ou le ministère de la Justice.

Le groupe d’experts cherchera des idées pour réguler non sur les contenus haineux eux-mêmes, souvent difficiles à caractériser légalement, mais plutôt sur les procédures que doivent mettre en place les réseaux sociaux pour les identifier et les filtrer.

Il pourrait s’agir « d’identifier » des bonnes pratiques, que le régulateur pourrait ensuite « certifier », indiquait-on ainsi à l’Elysée.

Des défaillances maintes fois relevées

Les réseaux sociaux sont régulièrement critiqués pour les défaillances de leur modération. En février, un rapport du Haut Conseil à l’égalité entre les femmes et les hommes avait dénoncé une « très grande impunité vis-à-vis des discours de haine » sur Facebook, Twitter et YouTube. Un test avait été fait avec le signalement aux trois services de 545 contenus insultants, menaçants ou constituant une forme de harcèlement moral ou sexuel envers des femmes.

Dans le cas de Facebook, si 100% des contenus « menaçants ou suicidaires » ont été supprimés, seulement 9% des propos liés au « harcèlement ou [à] de l’incitation à la haine envers un genre/orientation sexuelle » ont disparu du réseau social. Et les « contenus offensants ou haineux » n’ont jamais été supprimés.

En mai 2016, des tests effectués par l’UEJF (Union des étudiants juifs de France), SOS Racisme et SOS Homophobie sur 586 contenus haineux avaient montré des résultats aussi consternants, avec pour Facebook un tiers seulement des contenus racistes, homophobes ou autres signalés qui avaient été supprimés.

Pour le réseau social, la collaboration avec les pouvoirs publics français sera plus confortable que de se voir imposer des normes strictes, comme en Allemagne où une loi votée fin juin 2017 (et entrée en vigueur en octobre) impose aux réseaux sociaux de supprimer les contenus haineux ou illégaux en moins de 24 heures après leur signalement par les internautes : propos racistes ou antisémites, incitations à la haine, propagande terroriste, pédopornographie ou encore fausses informations.

Un « appel de Paris » pour la cybersécurité

Lors de son discours, le président français a également présenté « l’appel de Paris pour la confiance et la cybersécurité dans le cyberespace », signé à l’initiative de la France par plus de 370 Etats, organisations non gouvernementales et entreprises.

L’appel de Paris vise à relancer des discussions sur un code international de bonne conduite sur internet. Celles-ci sont au point mort depuis 2017, lorsqu’un groupe d’experts mis en place à l’ONU s’est séparé sur un constat d’échec, du fait des divergences entre les grandes puissances de la planète.

Les soutiens de l’appel de Paris s’engagent à travailler ensemble entre autres pour :

  • « coopérer afin de prévenir les interférences aux processus électoraux »,
  • « travailler ensemble contre les violations de la propriété intellectuelle par voie cyber »,
  • « accroître la sécurité des produits et services numériques ainsi que la ‘cyber-hygiène’ de tous »,
  • « prendre des mesures contre le cyber-mercenariat et les actions offensives des acteurs non étatiques ».

Parmi ces soutiens (PDF), on trouve 51 Etats – manquent notamment les Etats-Unis, la Russie et la Chine – et de nombreux acteurs du secteur privé, dont beaucoup de géants tech (comme Google, Facebook, Microsoft, Cisco, mais pas Apple, Amazon ou Twitter).

Thierry Noisette (avec AFP)

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Ajj

Toutes ces manips dévaloriserons les sites et réseaux sociaux classiques par ce flikage; les internautes n’auront comme seul choix le Dark Web de plus en plus en vogue. Et là le pire est à craindre car même les signaux faibles ne seront plus perceptibles par les algorithmes de cybersécurité.