Ahmed Tibi, un député anti-israélien à la Knesset

La question de la double allégeance est un débat récurrent de l’histoire des nations et du nationalisme. Dans nos nations modernes, plus ouvertes sur un monde globalisé, mondialisé, elle se pose de façon tout à fait différente et elle pourrait faire l’objet d’un long débat. La double allégeance est aussi un sujet qu’on peut considérer comme désuet entre deux démocraties qui accueillent des dizaines de milliers de citoyens d’autres démocraties, qui ne se font pas la guerre et qui coopèrent ensemble pour le développement de l’humanité. Toutefois il s’agit d’un sujet qui réapparaît lorsque les tensions se font sentir. Et surtout, quand en est-il lorsqu’un citoyen fait allégeance à un autre Etat, non démocratique? Et qu’en est-il aussi lorsqu’on fait allégeance à un Etat ennemi du premier, ennemi de l’Etat dans lequel on vit?

Autant de questions politiques et philosophiques qui se posent en Israël mais avec lesquelles Ahmed Tibi, député arabe israélien, ne s’embête pas. Pour lui il ne s’agit pas d’une double allégeance, mais d’une triple, quadruple, d’une multiple allégeance, non pas envers un ou deux Etats, mais trois, quatre, cinq, 22 Etats, voire 23. Plus encore, il s’agit d’une allégeance ethnique, d’une allégeance à un peuple sans doute, mais en tout cas pas à celui du propre Etat dont il a la nationalité. A n’en pas douter, Ahmed Tibi se sent Arabe et surtout Arabe, bien plus qu’Israélien. Et il ne se gêne pas pour le montrer, bien qu’il soit citoyen israélien, et député de l’Etat d’Israël.

Car en effet, Ahmed Tibi n’en finit pas de s’attaquer à tous les symboles de l’Etat Juif. Après le drapeau israélien, après l’hymne israélien, après avoir refusé tout service national pour l’Etat d’Israël pour la communauté arabe du pays, menaçant l’Etat de révoltes arabes si jamais il entendait faire participer la communauté arabe à l’effort national, le voilà à présent qui s’attaque à la mémoire d’un héros israélien, Ilan Ramon.

Ahmed Tibi a réclamé en effet que le nom d’Ilan Ramon ne soit pas utilisé pour le Nouveau Centre Aérospécial construit dans la ville israélienne de Taibe, habitée majoritairement par des Israéliens de la communauté arabe. Et ceci, bien que le centre soit financé par la Fondation Ilan Ramon et son fonds et par l’autorité du gouvernement pour le développement économique dans le secteur arabe.

Le Ministre de la Science, Daniel Hershkowitz, scandalisé par ces propos, a catégoriquement rejeté et condamné sa demande et déclaré : « Tibi a franchi une ligne rouge avec son appel exaspérant. Il fait des dégâts considérables à la société israélienne en général, et dans le secteur qu’il représente en particulier. … »>Article original Chaque centre aérospatial est nommé au nom d’Ilan Ramon, a t-il poursuivi, si Taibe ne veut pas d’un centre aérospatial nommé Ilan Ramon – ils n’auront pas de centre du tout. … »>Article original Vous ne pouvez pas profiter d’un financement de l’État et manquer de respect envers l’un des héros de l’État, le premier astronaute israélien, un homme exemplaire qui a courageusement combattu le terrorisme islamique à la fois en Israël et à l’étranger », a t-il conclu.

Mais surtout, plus profondément, il faut lire les propos d’Ahmed Tibi pour comprendre son infidélité envers l’Etat d’Israël et au contraire, sa perspective raciale et colonialiste fondée sur l’arabité. Selon lui en effet, « en nommant le centre au nom d’Ilan Ramon, Israël est susceptible d’être blessant pour les résidents locaux, et pour le secteur arabe en général. Car Ramon était un pilote de combat de Tsahal qui a participé aux bombardements de la population civile au cours de la guerre du Liban » avance-t-il, avant d’ajouter « et dans l’attaque contre les pays arabes. »

Quand bien on laisserait de côté le fait que l’aviation israélienne ne bombarde pas de population civile au hasard, mais vise au contraire des objectifs militaires, contrairement aux Etats et organisations que Tibi défend régulièrement, on remarque en revanche, d’une part que c’est l’ensemble des pilotes israéliens et des combattants de Tsahal que Tibi condamne, d’autre part qu’il fait passer la composante ethnique, raciale, l’origine des « résidents locaux », le fait qu’il soit « arabes » selon lui, avant la composante nationale. C’est-à-dire que les « résidents locaux » seraient selon lui plus touchés par le fait que des « Arabes » soient morts sous des balles israéliennes que par le fait que des Israéliens le soient sous des balles provenant de pays dominés par des Arabes.

Une fois encore, Ahmed Tibi démontre qu’entre Israël, le Liban, la Syrie, ou « les pays arabes », qu’entre Israël et les « Arabes », de façon générale, il a fait son choix. Peu importe pour lui que ces Etats soient des ennemis déclarés d’Israël, peu importe que ces Etats soient dictatoriaux ou même qu’ils aient tué plus d’ « Arabes » que ne l’a jamais fait l’Etat d’Israël, peu importe que son choix ne s’ancre pas dans une perspective nationale, mais raciale. Peu importe! Ces questions-là sont trop compliquées, trop philosophiques, trop embarrassantes pour lui. Ahmad Tibi n’a qu’un seul credo : rassembler les Arabes contre Israël.

Misha UZAN – JForum.fr Israël