Au lendemain du discours du Maréchal Pétain qui appelle à l’arrêt des combats et à la collaboration, le Général De Gaulle,  sur la BBC de Londres, répond en lançant l’Appel du 18 Juin 1940 qui marque l’acte de naissance de la résistance française.

Quel rôle ont joué les résistants juifs dans les différents mouvements de lutte contre l’occupant et les collabos?

Les Juifs ont été nombreux dans les réseaux de résistance française, leur combat fut précoce.

Patriotes, socialistes, gaullistes, communistes, trotskistes, ils participèrent aux différents mouvements de Résistance.

Sauver les enfants, une priorité

Le sauvetage des enfants constituait la première forme d’action entamée par les organisations juives. Grâce à l’Oeuvre de Secours aux enfants (OSE) plusieurs milliers d’enfants ont été sauvés  par leur  déplacement en zone sud.

Les principaux centres d’hébergement se trouvaient en zone sud tels celui de  Montpellier. Au sein du « Comité de Nîmes », l’organisation de sauvetage des enfants réussit à  faire partir trois cents enfants vers les Etats-Unis.

L’OSE disperse les enfants dans les œuvres, familles chrétiennes et laïques. A Lyon, le réseau Georges Garel, créé en août 1942, permit de sauver plus de mille six cents enfants. Garel demanda l’aide de Monseigneur Salièges.

Le 1er juin 1941, au 25 de la rue d’Italie,  le centre marseillais de l’OSE ouvra ses portes grâce à  l’aide de l’organisation américaine humanitaire l’Unitarian Service Committee (USC) qui apporta des fonds importants.

Dans l’équipe de direction on comptait un délégué américain, un catholique, le docteur Zimon, le représentant de la Jeunesse juive de France à Marseille, Julien Samuel.

Les priorités concernaient avant tout  l’assistance médico-sociale aux enfants et aux adultes. Lorsqu’en juin 1943, sonna l’heure de la clandestinité, l’OSE concentra ses forces dans le sauvetage des enfants en les « plaçant » avant de les envoyer hors des frontières.

Mouvement scout, les Eclaireurs Israélites de France (EIF), tout comme l’OSE, ont pour préoccupation majeure le sauvetage des enfants.

Grâce à leur aide, plusieurs centaines d’enfants réussissent à passer en Suisse.

Un Organisme de sauvetage clandestin « la Sixième » fut mis en place, dès septembre 1942. Il s’agit de placer des jeunes munis de faux papiers dans des internats, et des familles. D’autres branches des mêmes activités s’agrègèrent progressivement à des formes de lutte plus musclées.

L’action concernait aussi le sauvetage des adultes. Les formes d’action se diversifièrent. La répression s’abattit sur les responsables de la « Sixième » : Mila Racine, convoyeuse d’enfants fut prise à la frontière suisse, mourut en déportation (1943). Arrêtée avec les enfants qu’elle voulait faire passer en Suisse,  Marianne Cohn fut assassinée en 1944.

 

Selon Annette Wieworka, le rôle de toutes les associations est fondamental, on estime que près de dix mille enfants ont été ainsi sauvés.

Dès le 15 juin 1940, le jour même où la Gestapo s’installa à Paris, quelques jeunes rompus au travail social s’interrogent: comment aider tant de Juifs nécessiteux, à qui les moyens ont manqué pour se joindre à ceux qui ont fui devant l’invasion allemande ? Comment leur porter secours,  alors qu’à Paris aucune œuvre juive de bienfaisance ne fonctionnait plus ?

Ils décidèrent de créer le Comité de la rue Amelot, qui regroupait cinq œuvres parmi lesquelles la « colonie scolaire » avec son dispensaire, « La Mère et l’enfant », les services de la « Fédération des Sociétés Juives ».

L’âme de l’insoumission était David Rappoport. Exilé russe à Paris, il incarnait la fraternité et la générosité « rêve d’Abraham ».

 


Dès les premières persécutions, Rappoport lançait la Résistance, dans l’action de camouflage, de fabrication de faux papiers, de sauvetage d’enfants. Henri Bulawko s’occupait du réseau des faux papiers.

Une résistance sioniste?

La résistance sioniste, elle aussi s’affirma tôt. Dès juillet 1940, à Toulouse,  Abraham Polonski surnommé « Maurice Ferrer », et son épouse Génia (« Bat Mattahiaou »), David et Ariane Knout constituèrent la Main Forte (M.F).

Ce fut le premier noyau de la Résistance sioniste. En octobre 1940, Lucien Lublin (« Lucien »), et les fondateurs de la Main Forte (M.F) créèrent l’Armée juive (A.J) afin d’élargir le nombre des militants et de développer l’action de la MF sur le terrain militaire.

 

En décembre 1941, les deux piliers de l’Armée juive, Lev Zupraner dit « Léonard » et Albert Cohen  surnommé« bébé », reçurent pour mission de constituer un premier corps-franc de l’Armée juive à Toulouse.

En 1942, d’autres corps-francs furent créés. Ces unités se spécialisèrent dans les coups de main: les traîtres et les installations militaires allemands furent visés.

A l’automne 1943, les EIF et le Mouvement des  Jeunesses Sionistes (MJS créé en 1942 à Montpellier), se fondirent dans l’Organisation Juive de Combat qui choisit la Résistance armée et se consacra au rassemblement des jeunes dans les maquis.


Des maquis juifs se formèrent dans la région du Tarn, et de la Haute Loire. L’OJC organisa une série de corps-francs dans différentes villes : à Lyon, à Grenoble, à Nice, à Paris….

Le maquis du Tarn fut le plus célèbre, les EIF occupaient une grande place en s’associant à la Résistance intérieure. Robert Gamzon surnommé Castor, chef des EIF organisa les premiers noyaux tels celui de la Malquière, en novembre 1943.

Comme la région était, en grande partie protestante,marquée par l’histoire de persécutions religieuses,  cela facilita les rapports avec la population.

 Pour exprimer leur identité sioniste, à l’intérieur du corps franc de la Montagne Noire, le maquis d’Espinassier commandé par le capitaine Jacquel, prit le nom de Trumpeldor, un héros national sioniste. Sous l’appellation « compagnie Marc Haguenau » le corps-franc n° 10 prend participa à la libération de Castres et de Mazamet (18-22 août 1944).

Les sionistes ont ainsi participé au combat général pour la survie des Juifs en France et ont permis d’intégrer  le sionisme dans le paysage communautaire de France.

Les Juifs dans les FTP-MOI

Les Juifs dans les Francs Tireurs Partisans-Main d’Oeuvre Immigrée, constituaient une autre composante de la résistance.

Parmi les réfugiés politiques, de nombreux juifs avaient adopté les idéaux de la gauche : socialiste, communiste et trotskyste. Le courant bundiste comptait aussi de nombreux adeptes.

Le Bund (socio-démocrate et culturel, identitairement juif)  a commencé les premières grèves ouvrières du textile, en Pologne, en 1897, bien avant Odessa, le Potemkine en 1905. Le Parti communiste soviétique étant hégémonique, a fait en sorte d’en faire disparaître les traces sous Staline, auparavant, par Trotski et ainsi de suite… Le Bund est fondateur du mouvement révolutionnaire qui va ensuite embrasé la Russie, il a lutté contre l’autocratie tsariste. Les bolchéviques ont clôturé le mouvement et l’ont centralisé jusqu’à disparition effective : ce mouvement totalitaire se traduira par de nombreuses purges en Sibérie. On observe le même phénomène, dans l’historiographie de la résistance, où les noms des Juifs combattants sont rayés des listes après-guerre, par le Parti Communiste, qui en chargera Aragon et quelques autres, afin de faire apparaître une « résistance communiste française », entièrement nettoyée des courants considérés comme « déviationnistes et bourgeois »( Ajouté par Marc B.).

Certains d’entre eux, les ouvriers étrangers avaient adhéré à la structure rattachée à l’appareil dirigeant du parti communiste français: la Main d’Oeuvre Immigrée (MOI).  Ils correspondaient à la première génération d’immigrés, nés en Pologne.

En 1940-1941, la MOI se reconstitua dans la clandestinité. Parmi les groupes de langue, le groupe yiddish était composé essentiellement de juifs polonais.

Parmi les dirigeants de ces groupes de Résistance, on trouvait souvent des Juifs ayant appartenu aux Brigades internationales d’Espagne, où ils s’étaient habitués à la lutte armée et la clandestinité.

 Très tôt, en zone nord, les Résistants juifs avaient établi des laboratoires de faux papiers. En zone sud, Adam devint le responsable pour les relations entre organisations juives et les mouvements de la résistance communiste.

Les « Bataillons de la Jeunesse », formation de combat créée par les jeunesses communistes réunissaient une forte proportion de jeunes Juifs.

Dès l’été 1941, les attentats anti-allemands se multiplièrent. Au début de 1942, se constituèrent à Paris quatre unités combattantes FTP-MOI, composées en grande majorité d’étrangers.

L’unité juive connue sous le nom du « deuxième détachement » juif ainsi que la formation roumaine comptant près de 90% de Juifs étaient particulièrement efficaces dans de très nombreuses opérations militaires menées en plein Paris.

De nombreux jeunes Juifs, après la rafle du Vélodrome d’Hiver, en juillet 1942, rejoignirent la résistance communiste. C’était une génération de jeunes, désespérés par ce qu’ils avaient vu, par leur milieu d’origine, par leur environnement. Ils avaient trouvé une nouvelle famille. La plupart de cette génération devint communiste dans et par la Résistance.

Le 28 juillet 1943, une unité spéciale formée de combattants des quatre unités FTP-MOI,  ayant à sa tête le jeune Marcel Rayman s’attaqua  au Général Schaumburg, commandant du grand Paris.

Deux mois plus tard, elle exécuta le gauleiter Julius Ritter, délégué aux réquisitions de la main d’oeuvre en Espagne.

A Lyon, Gilbert Weissberg continuait son travail d’instruction militaire. De nombreux attentats anti-allemands étaient organisés par des Juifs en particulier, le groupe Carmagnole.

A Toulouse la jeunesse communiste se regroupait autour du comité d’action pour la Défense de la Jeunesse Juive, à la tête on y trouve Raph Feigelsohn.

En novembre 1943, Marcel Rayman ainsi que la plupart de ses compagnons juifs furent arrêtés. Le 15 février 1944, s’ouvra devant le tribunal militaire allemand, le procès des « vingt-trois ».

La fameuse Affiche  Rouge était placardée dans toute la France, elle portait en grandes lettres l’inscription : « l’armée du crime » et des photos de dix « criminels ».

Le chef Missak Manouchian fut traité d’Arménien, « chef de bande ».

Vingt trois partisans dont onze Juifs furent exécutés par la Gestapo.


Le poète Aragon les a chantés :
« Vingt-trois amoureux de vivre à en mourir
Vingt-trois qui criaient la France en s’abattant. »
Rapidement les affiches sont barbouillées par les résistants. Partout on les voit couvertes d’inscriptions : « Morts pour la France. »

Après des arrestations successives, les rescapés de la MOI juive se replièrent en zone sud. A Lyon durant le mois de mai 1943, le rapprochement de la MOI et des autres organisations juives de Résistance donna naissance à l’Union des Juifs pour la Résistance et l’Entraide (UJRE).

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Toutes ces organisations en liaison avec le Consistoire furent à l’origine de la création du CRIF, le Conseil Représentatif des Israélites de France, à Lyon en janvier 1944. Il lui appartint d’unifier les actions de sauvetage face à l’occupant et à la police obéissant aux ordres nazis. L’unité d’action et de coordination s’imposa.

Les Juifs dans la Résistance Nationale

Les Juifs dans la Résistance Nationale ont joué, eux aussi, un rôle important. Dans l’organisation « Libération », il y avait trois personnalités juives parmi les six membres fondateurs.

Dans le Conseil National qui se constitua plus tard, et qui représenta la haute autorité dans la résistance française, il y avait trois Juifs parmi les seize membres.

Les Juifs étaient présents également dans un détachement qui manœuvrait aux côtés de Charles De Gaulle, et dans d’autres groupes français.

Parmi les membres de la résistance se trouvaient également des personnalités telles Pierre Mendès-France, Marc Bloch, René Cassin, Raymond Aron.

Jean-Pierre Lévy fonda l’un des groupes principaux de la résistance française. Le commandant d’une des annexes d’une grande organisation communiste fut le « Colonel Gilles » dont le nom véritable était Josef Epstein, et qui était originaire de Pologne.

Marcel Deimann, un Juif de 19 ans qui animait plusieurs actions de combat courageuses à Paris, fut pris par les nazis vers le début de la guerre et fut condamné à mort. Il devint l’un des exemples, des modèles, dans la résistance française.

Fausse carte d’identité remise à Jean-Pierre Levy à Londres (Doc.

Le résistant Jacques Bingen quitta la France en 1940, et se joignit aux forces de De Gaulle en 1943. Il revint clandestinement en France et fut mis à la tête des Forces de la France Libre dans le nord du pays.

Si les Juifs participèrent massivement à la résistance en métropole, la résistance juive en Algérie ne fut  pas en reste.


Dans une note du 27 mars 1943, le chef nazi de la section des affaires juives à Paris déclare pour justifier sa politique de concentration et de déportation des Juifs français :
«  Éviter toute possibilité que les Juifs de la province puissent jouer un rôle infâme similaire à celui lors du débarquement des troupes américaines et britanniques en Afrique du Nord. »

Adaptation par Jforum

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Bonaparte

Les Juifs qui ont été accueillis tenaient abolument à exprimer leur reconnaissance en offrant leur vie .

En tout temps ils furent de bons patriotes…….. quand on les autorisait à se battre et ce , seulement à partir de la révolution .

On les trouvait sur tous les champs de batailles :

de Stalingtad aux plages de Normandie sous tous les drapeaux .

LUCCHINI PATRICE

Gloire éternelle et honneur à tous ceux-là.