L’expression génique et le métabolisme de 480 rats Wistar, nourris ou non avec des OGM, ont été suivis pendant six mois. AFP – NATIONAL CANCER INSTITUTE

Aucun effet sur la santé de rats nourris pendant six mois avec deux maïs OGM différents, avec ou sans herbicide glyphosate. C’est ce que rapporte une étude française très minutieuse. Un résultat rassurant, six ans après la retentissante « affaire Séralini ».

Pour un rat de laboratoire, manger six mois durant du maïs OGM, avec ou sans herbicide glyphosate (C3H8NO5P), un pesticide décrié comme cancérogène, n’aurait pas d’incidence sur sa santé.

C’est ce que conclut une étude française minutieuse, six ans après l’étude controversée du Français GillesÉric Séralini, professeur de biologie moléculaire à l’université de Caen, qui suggérait que des rongeurs nourris durant leur vie entière (2 ans) avec du maïs Monsanto NK603 tolérant à l’herbicide Roundup développaient de nombreuses pathologies et tumeurs (lire Sciences et Avenir n° 789, novembre 2012).

Identifier très tôt les marqueurs d’exposition

Ce nouveau travail, publié en en décembre 2018 dans la revue Toxicological Sciences et nommé GMO90+, a coûté 2,5 millions d’euros. Pilotée par Bernard Salles, directeur de l’unité Toxicologie alimentaire de l’université Paul- Sabatier/Inra à Toulouse, l’étude ne porte, certes, que sur six mois. Mais elle a été conçue pour identifier très tôt des marqueurs d’exposition ou d’effets sur la santé chez des rats Wistar, une souche moins sensible aux tumeurs que celle utilisée par Gilles-Éric Séralini.

Les analyses chimiques sur les régimes des rongeurs et les analyses de toxicologie ont été complétées par des analyses plus fines, dites omiques.

Ainsi de la « métabolomique », qui traque les variations du métabolisme dans l’urine ou le sang à partir des molécules issues de la transformation des nutriments par l’organisme. Et de la « transcriptomique », qui évalue le niveau d’expression des gènes dans le foie et les reins, organes éminemment exposés.

Huit groupes de 60 rats (30 par sexe) ont ainsi suivi des régimes différents, sans ou avec maïs OGM. Certains rongeurs ont mangé du NK603 vierge, d’autres du NK603 pulvérisé avec du Roundup (dont le principe actif est le glyphosate).

D’autres encore ont croqué du MON 810, autre variété Monsanto qui produit une protéine insecticide (Bt). Selon les groupes, le pourcentage en OGM des croquettes variait entre 11 % et 33 %.

Résultat ? Aucun effet biologique significatif, ni problème de santé particulier n’a été observé chez les mangeurs d’OGM par rapport à leurs congénères nourris avec deux variétés de maïs conventionnels le plus proche possible des deux OGM.

Pour comprendre la portée de ces résultats, il faut remonter en 2012. Cette année-là, le travail effectué par le Gilles-Éric Séralini avait permis de mettre en lumière le fait que très peu d’observations à long terme avaient été menées sur la toxicité potentielle des OGM : douze depuis les années 1980 (selon le décompte de Sciences et Avenir en janvier 2013), dont trois seulement durant la vie entière des rongeurs (l’étude Séralini comprise).

Ces travaux sur la toxicité des OGM avaient en outre été conduits essentiellement par les industriels sur une durée d’un mois, plus rarement trois mois, les toxicologues partant du principe qu’ils observeraient des effets dès 28 jours et a fortiori à 90 jours si ces derniers étaient des poisons. Malgré les assurances des autorités sanitaires, ces études « sentinelles » auraient-elles pu manquer les signaux d’effets délétères à venir plus tard ?

C’est la crainte que soulevait le chercheur français, même si son travail a été éreinté en raison du faible nombre de cobayes testés (vingt par groupe, dix par sexe), de la souche de rongeurs choisie (des Sprague-Dawleys, très sensibles aux tumeurs) ou encore de ses statistiques non conclusives. L’étude fut même « dépubliée ». Mais la question de l’innocuité des OGM dans l’alimentation humaine ou animale restait brûlante.

Dans un avis rendu en 2014, le Haut Conseil des biotechnologies (HCB) affirmait que les rares expériences existantes ne permettaient pas « de valider les études de toxicité de 90 jours comme prédictives d’une absence de toxicité à long terme « .

La France et l’Union européenne ont donc déboursé plus de 15 millions d’euros pour renforcer les connaissances sur les possibles effets sanitaires à long terme de l’ingestion d’OGM, avec l’étude GMO90+, mais aussi d’autres travaux (GRACE et GTwYST) dont les résultats se montrent également rassurants.

L’évaluation du seul glyphosate rendue impossible

Tout n’est pas réglé pour autant, malgré les conclusions des statisticiens qui ont épluché les données fournies par ces analyses. Les chercheurs de l’étude GMO90+ ont en effet découvert que toutes les nourritures données aux rats… contenaient du glyphosate (entre 80 et 100 microgrammes par kilo) !

A priori, cette contamination proviendrait du soja, importé d’Amérique du Sud, qui complète les croquettes de maïs. Conséquence ? Contrairement à ce qu’ils souhaitaient, il leur a été impossible d’évaluer indépendamment l’effet du glyphosate auquel certains OGM sont rendus tolérants.

En outre, Bernard Salles, qui reconnaît que ce produit contient des dérivés mutagènes du pétrole, a estimé qu’il n’y avait pas matière, avec ce qu’il considère comme de faibles niveaux de contamination, à pousser son étude au-delà de six mois.

Pour Robin Mesnage, ancien signataire de l’étude Séralini et toxicologue au King’s College de Londres (Royaume-Uni), « se focaliser sur les OGM est peut-être une distraction. » Selon lui, il y a en effet davantage de Roundup [donc de glyphosate] dans certaines céréales du petit déjeuner que dans les OGM car ce produit est utilisé pour sécher les cultures avant la récolte ! » Pour Bernard Salles, « les études ne peuvent répondre à la double question des OGM et du Roundup. Mais ce dernier constitue un sujet de recherche à part entière. »

source: scienceetavenir

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