Coligny-Cornet honore des élèves juifs déportés

Une plaque sur un mur et un cerisier planté dans la cour rappellent la mémoire des écoliers déportés en 1943.

On faisait du rangement dans des anciens placards de l’école et on a découvert un registre d’appel de l’année scolaire 1941-1942, raconte Patricia Duchadeuil, directrice de l’école Coligny-Cornet, à Poitiers. En parcourant les noms, je me suis arrêtée sur celui de Rachel Friedmann. J’ai eu un frisson, un tilt. L’enseignante fait alors une recherche sur le site du Mémorial de la Shoah et retrouve le nom de Rachel, puis celui de ses frères Bernard et Jacques, écoliers eux aussi et celui de leur grande sœur, élève au collège technique de Poitiers. Tous déportés et assassinés à Auschwitz en 1943.

L’histoire de Rachel

Patricia Duchadeuil a mené les recherches sur Rachel.

Patricia Duchadeuil a mené les recherches sur Rachel.
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Quatre noms qui se retrouvent depuis vendredi soir, gravés sur une plaque mémorielle, apposée dans la cour de l’école. Quatre noms qui sont également inscrits à jamais dans la mémoire des élèves de Patricia Duchadeuil qui, pendant plusieurs semaines, ont travaillé avec elle à la reconstitution de la courte vie de Rachel et de sa famille. Des travaux qui ont abouti à un petit livre et à un film documentaire. À l’écriture de poèmes, aussi, que les enfants ont lus lors de la cérémonie vendredi soir, après avoir planté un cerisier dans la cour et dévoilé la plaque.
L’histoire de Rachel, ils peuvent tous la raconter. Les Friedmann, une famille juive qui fuit la Tchécoslovaquie, où l’antisémitisme fait rage après la Première Guerre mondiale. Elle trouve refuge en Moselle. Rachel y naît le 26 mai 1934, à Metz. Une autre guerre approche, il faut encore partir, vers le Poitou cette fois, à Saint-Jean-de-Sauves d’abord, puis rue de la Croix-Rouge, à Poitiers. Elle va à l’école Cornet, celle des filles. Ses deux frères vont à Coligny, l’école des garçons. La famille est arrêtée une première fois en octobre 1942 et enfermée au camp de la route de Limoges (1). Sous l’impulsion du rabbin Élie Bloch, les enfants quitteront le camp et seront hébergés quelques semaines rue de la Cathédrale, avant une nouvelle rafle, en mars 1943 (1). Ils seront transférés à Drancy, puis déportés dans le convoi 55 vers Auschwitz, en juin 1943.

Le registre de présence. Rachel est bien inscrite. Plus bas, les noms de deux élèves tsiganes arrêtés sont rayés.Le registre de présence. Rachel est bien inscrite. Plus bas, les noms de deux élèves tsiganes arrêtés sont rayés. © Radio France – William Giraud

Marthe Cohn-Hoffnung en sait quelque chose. Âgée de 101 ans, elle habite à Poitiers de 1939 à 1942. Elle vit directement l’arrestation de sa sœur Stéphanie et son internement au camp de la route de Limoges. Marthe a vu de ses propres yeux le camp en activité, la misère et la dureté des conditions de vie. Elle se souvient de tout, y compris de l’interpellation de sa sœur par un membre de la SIPO, la « police de sureté » du IIIème Reich.

Une histoire que les écoliers de 2021 pourront désormais transmettre. « Merci d’avoir mis votre cœur dans la reconstitution de cette histoire, pour comprendre comment la haine a pu atteindre des enfants jusque dans une école », les a félicités la maire de Poitiers, Léonore Moncond’huy, vendredi.
Tout comme ils ont été remerciés par Paul Lévy, président du consistoire israélite du Sud-Ouest, qui a aidé l’enseignante et les écoliers dans leurs recherches: « Soyez fiers de vous, votre geste est porteur de sens. Surtout quand certains voudraient réécrire l’Histoire, cet arbre et cette plaque témoigneront pour longtemps. »

Philippe Bonnet  www.centre-presse.fr 22/11/2021 06:48 | Poitiers
Un cerisier a été planté dans la cour de l’école en mémoire des élèves juifs déportés.
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(1) 449 enfants des cinq départements de la région de l’époque ont été déportés depuis Poitiers, a rappelé Paul Lévy lors de la cérémonie

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