Platon, Apologie de Socrate. Gallimard, 2023.

Livre : Apologie de Socrate écrit par Platon - Gallimard

Ce texte compte parmi les plus commentés de l’histoire de la philosophie et fait partie des archives les plus anciennes de notre discipline. En outre, il marque le premier martyr de cette dernière, Socrate, le maître de Platon qui tient à honorer celui qui l’a formé à l’art de la spéculation, en l’éloignant des redoutables sophistes dont le souci majeur a toujours été non point la recherche de la vérité mais d’emporter la conviction de gens faibles et des esprits crédules… Pour parvenir à leurs fins, les sophistes soignent les présentations et usent d’un langage en apparence vrai car ils savent déjouer les pièges de l’art oratoire.

Et là, assez subtilement, Socrate s’en prend à ceux qui portent contre lui des dénonciations calomnieuses : par un adroit renversement des rôles, Socrate impute les mêmes fautes à ses accusateurs qui préviennent les juges contre les talents oratoires de ce célèbre accusé. Socrate répond qu’il a le droit de se défendre, même si ceux qui se muent en procureurs sont absents, le condamnant à pourfendre des ombres. Cette situation ne favorise pas la défende dont les droits sont pourtant reconnus par les tribunaux athéniens. On le voit, Socrate, accusé de travestir la vérité rejette le même reproche et en accuse à son tour, ses propres accusateurs. Ce qui distingue Socrate des sophistes, c’est qu’il a un seul objectif en vue, rétablir la vérité, sans la maquiller afin que des concitoyens d’Athènes le croient sans peine. Il est vrai que les deux chefs d’accusation sont très lourds et l’issue peut se révéler fatale, comme ce fut effectivement le cas : corruption de la jeunesse et mécréance… Les juges devront trancher en fonction de ce qu’ils voient mais aussi en fonction de l’accusation.

On a reproché à Socrate de s’être autoproclame spécialiste des choses physiques, ce qu’il n’a jamais fait. Il interpelle ses concitoyens et les met au défi de prouver les allégations de certains. De même, ses détracteurs l’ont accusé de monnayer ses services en se faisant l’instituteur intéressé de ses concitoyens ; c’est louable de contribuer à l’éducation des gens mais Socrate ne l’a pas fait, et en tout cas pas pour de l’argent… L’accusation, conclut Socrate, ne tient pas debout

… L’existence chez moi d’une certaine sagesse… Telle est la réponse de Socrate quand on lui demande à quoi il consacre ses jours et ses veilles. Et ce serait pour cette raison, avoir une telle occupation, contrairement à la majorité de ses concitoyens, qu’on lui a adressé de tels reproches au point de le faire comparaître devant une cour de justice !

Mais de quelle sagesse s’agit-il et quel est son impact dans la vie social ?. Et c’est là que commencent les difficultés de la vie politique ; Socrate juge que cet homme dont on lui vante les qualités set dit sage mais qu’il ne l’est pas vraiment. Et c’est ainsi qu’il se rendit odieux aux yens de cet homme et de ses partisans. Socrate n’a pas eu d’intelligence politique, en défiant des autorités politique bin enracinées…

Les poètes et les phraseurs ne trouvent pas grâce aux yeux de Socrate qui jette son dévolu final sur ceux qu’il nomme, les gens de métier. Et c’est dans ce prolongement qu’il aborde le plus délicat des sujets et qui lui valut sa comparution devant une instance pénale : En outre, c’est spontanément que s’attache à moi la jeunesse , celle qui a le plus de loisir, celle des familles les plus riches, heureuse d’entendre soumettre des gens à un examen, m’imitant maintes fois, et s’essayant par la suite, à examiner d’autres gens.

Socrate résume en une phrase la violence des accusations portées contre lui : Socrate, à ce qu’ils disent, est une souillure sans pareille et il corrompt la jeunesse.

Socrate souligne aussi la faiblesse de ces mêmes accusations puisque les accusateurs sont incapables de tenir un discours cohérent à leur sujet. Ils se contentent de dire, sans la moindre preuve, que l’accusé a donné un enseignement sur des matières qui échappent à la sagesse humaine : les choses d’en haut et les choses d’en bas, sans plus de précision.

Face à ses accusateurs, Socrate s’’engage dans un long plaidoyer montrant qu’il ne tombe sous aucun interdit qu’il aurait, volontairement ou involontairement, enfreint. Il prend maintes fois les Athéniens à témoin, les adjurant de ne pas condamner un innocent et de ne pas se priver eux-mêmes ni leur cité d’un homme comme lui, Socrate.

Il évoque l’existence d’un démon intérieur qui lui dicte la conduite et le discours à tenir . Mais en règle générale, Socrate affirme se fier à la foi en les dieux et en la justice de sa cité. En résumé , il rejette l’injustice et l’impiété. Ce qui ne le protégera pas d’une inculpation pour les deux chefs d’accusation cités plus haut.. Il sera donc déclaré coupable.

Pour clore cette Apologie d’un homme condamné par des lois injustes, le plus grand procès de l’histoire mérite de rendre la parole aux texte platonicien :

Voila pourtant que l’heure est déjà venue de nous en aller, moi pour mourir dans quelque temps, vous pour continuer à vivre !. Qui de vous ou de moi va vers le meilleur destin ? C’est pour tout le monde la chose inconnue, sauf pour la Divinité.

Maurice-Ruben HAYOUN
Le professeur Maurice-Ruben Hayoun, né en 1951 à Agadir, est un philosophe, spécialisé dans la philosophie juive, la philosophie allemande et judéo-allemande de Moïse Mendelssohn à Gershom Scholem, un exégète et un historien français. il est également Professeur à  l’université de Genève. Son dernier ouvrage:

 

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