Grande synagogue de Strasbourg

Liberté de culte et « process d’ouverture »

par Evelyne Gougenheim 1 juin 2020 à 13:44

Suite à la décision du Conseil d’Etat et aux directives ministérielles, les lieux de culte ont obtenu, eux aussi, le droit de reprendre leur mission et leurs activités. Permettez-moi de remarquer que, quant à la liberté de culte, cette période aura donné lieu à l’expression riche de toutes les tendances et courants d’un judaïsme bien vivant, un véritable foisonnement !

On note que la réouverture des restaurants a été exclusivement limitée aux terrasses, avec de surcroît, distanciation et gestes barrières. Les cinémas, quant à eux réouvriront peut-être fin juin dans des conditions certainement très strictes propres aux espaces confinés, où les personnes passent plusieurs heures, à l’instar des synagogues, pourtant sans y chanter ou s’y déplacer.

Réouverture des églises, leur nef à dix ou douze mètres du sol rend ces espaces moins       » confinés » et pourtant il y est  prévu d’ouvrir une rangée sur deux, ainsi qu’un siège libre tout autour de chaque siège occupé, soit moins d’un tiers de leur capacité habituelle. Gel hydroalcoolique, sens de circulation et protocole sanitaire, toutes les églises ne rouvriront pas. Certaines mosquées annoncent, elles, des livrets d’accueil, des masques ainsi que du gel hydroalcoolique.

En Israël, après deux mois d’offices en plain air, des offices sont désormais autorisés avec un maximum de cinquante personnes. Il n’aura échappé à personne quelques différences structurelles : multiplicité des tests, identification, suivi et isolement des personnes contaminées et, point non négligeable, une population bien plus jeune etc…

Quant au Consistoire, il s’exonère, par avance, de toute responsabilité

Concomitamment aux paroles remplies de prudence, fut diffusé par le Consistoire Central vers le 20 mai un projet des conditions de réouverture, destiné aux Communautés de province ou l’art du message paradoxal

Puis, par une note diffusée en complément d’un Zoom, mercredi 28 mai, veille de Chavouot et donc avec quatre jours de prévenance, fut annoncée la possibilité d’ouvrir les synagogues franciliennes, dès le 4 juin. Sous la responsabilité des Présidents de Communauté et de leur Commission administrative – on peut dire « leur Commission administrative » car, faute d’élections, nombre de Présidents, eux-mêmes non élus, certains depuis plus de quinze ans, ont évidemment coopté leurs administrateurs et ainsi parleront tous, n’en doutons pas, d’une seule et même voix. En espérant que vu l’importance de leur choix, exceptionnellement, ils recouvreront leur sens des responsabilités. Bref, ces dites Commissions administratives, brutalement sorties de leur torpeur, se voient confier la lourde responsabilité du « process d’ouverture ». Alignant un chapelet de recommandations, certaines proposées par l’AMIF, tout en multipliant les règles à respecter, mais en sachant fort bien par avance, que ces règles ne seront pas respectées, le Consistoire s’exonère, par avance, de toute responsabilité.

Sur la méthode

A aucun moment, les Présidents de Communauté mis en demeure de faire respecter le plan imposé, n’ont été consultés ( lorsque le mot démocratie rime avec « Faîtes ce que je dis »). Il n’est guère douteux que celui qui n’a pas hésité à  organiser un mariage avec quatre-vingt invités le 17 mars au matin à la Victoire – la règle  d’un maximum de vingt personnes étant déjà fixée – et alors que le Grand confinement débutait ce même 17 mars à 12h, cette personne est vraisemblablement  la plus habilitée à fixer des règles, qui ne seront pas respectées. Quelle crédibilité encore ?

Pas le moindre budget n’a été débloqué pour les nécessaires produits spécifiques ou nettoyages supplémentaires nécessaires. La question du nettoyage et de la désinfection est envisagée sous la modalité « yaka, faukon » mais qui par exemple s’en chargera entre l’office du vendredi soir et du Chabbat matin ou peut-être est-ce le coeur de la mission non définie du « référent sanitaire » ? Le Consistoire sait ponctionner les comptes des Communautés mais ne sait pas les abonder, même en cas de nécessité ou de situation exceptionnelle. Pas de budget? Et la vente du 19 rue St Georges?

Nommer un « référent sanitaire », sa fonction ressemblera à celle de la Commission ad hoc annoncée il y a trois semaines, et qui ne fut jamais créée, le document transmis n’y faisant aucune référence. Quant à une éventuelle formation de ce référent ou la détermination réelle de son champ de reponsabilités entre Rabbin, Président de Communauté, Administrateurs et personnels en charge, pas un mot. Ou comment faire d’un amoncellement de mesures, un ensemble inopérant, et dans le cas présent, dangereux

La province, de surcroît, pourrait exiger une attestation sur l’honneur de non-contamination, voire des tests (à renouveler avant chaque office, je suppose) ainsi qu’une inscription préalable aux offices. Plus masques, bien sûr, distance, gel, ceinture et bretelles sans oublier le parachute.

Quel sens auront de tels offices qui abolissent la notion de Communauté et la remplacent par la notion de risque et de dangerosité ?

Pourquoi ne pas avoir choisi d’ouvrir prudemment quelques synagogues avec tous les moyens nécessaires pour assurer un niveau de précautions suffisant. Ce qui aurait permis d’affiner les conditions et les options possibles ?

Pourquoi ne pas avoir mis en place un module de formation dédiée, sur Zoom, par des spécialistes, ceux qui forment par exemple les responsables des différents types de lieux accueillant du public?  Ceci aurait permis aux « Référents » d’appréhender et de maîtriser les risques, les enjeux, les points délicats, les délais à respecter, etc…Pas de budget? et la vente du 19 rue St Georges?

Combien de synagogues ne rouvriront pas par prudence, se verront-elles opposer , en cas de difficultés, une fin de non-recevoir émanant du Consistoire: vous-n’aviez-qu’à-ouvrir! Donc, combien de synagogues risquent-elles de fermer définitivement, suite à cette crise, faisant la joie de certains mystérieux acheteurs, détenteurs de SCI ?

Comme si de rien n’était

Enfin, est-il pensable de faire à ce point « comme si de rien n’était », comme si nous n’avions pas été si lourdement frappés, comme si la surreprésentation de la Communauté ne nous obligeait pas à une prudence extrême. Plus que de la prudence, nous le devons à tous ceux qui ont été arrachés à leur famille, à la Communauté « les joyaux de la couronne communautaire ». Une Communauté amputée, meurtrie.

Représentant 0,7% de la population, sans surreprésentation, nous devrions compter 200 décès, soit 0,7% des décès annoncés. Revenant sur ses propres affirmations faites lors d’un Zoom, annonçant 7% des décès au plan national et 10% à Paris et Ile de France, le gérant de SCI, après avoir supprimé les élections et bafouant ainsi les statuts pour se dire président des Consistoires  annonce 580 décès sans préciser dans quelle zone ni à quelle date, ni selon quelles sources. Cette opacité restera une tache indélébile.

En raison de cette surreprésentation, la réouverture des synagogues exigerait dix fois plus de prudence.

En informant les Présidents de Communauté, avec seulement quelques jours de prévenance, sans les avoir préalablement consultés, sans le moindre test grandeur nature, sans formation, sans budget dédié, le Consistoire, son Président illégitime et son Conseil d’administration muet se comporte avec une indifférence scandaleuse. Il n’est même pas évoqué un quelconque geste de solidarité, de respect envers tous les disparus. Si ce n’est un Mémorial de bougies virtuelles qui, en coupant le lien avec les Communautés, permet de mieux masquer le nombre réel de victimes.

Chers Nissim (Z’l), Nino (Z’l),Claude, (Z’l), Ephraïm (Z’l), Maurice (Z’l) et horriblement tant d’autres, l’avenir sera toujours tissé avec les fils de lumière qui émanaient de vous et vous entouraient

Evelyne Gougenheim

PS : Si les synagogues sont incitées à ouvrir, aucune information, en revanche, sur une quelconque Assemblée générale, ni à Paris, ni au Central: le Consistoire est bel et bien pris en otage. Que deviendra d’ici là l’argent de la vente réalisée durant le confinement, en toute opacité, du 19 rue St Georges ? Mauvais placements, on le voit venir….

Quelques liens

Sans masque !        https://www.israelnationalnews.com/News/Flash.aspx/502038

Eglises et mosquées   https://www.leberry.fr/bourges-18000/actualites/fermees-en-raison-du-coronavirus-les-eglises-et-les-mosquees-du-cher-se-preparent-pour-le-retour-des-fideles_13790014/

Michel Onfray        https://www.i24news.tv/fr/actu/international/europe/1590955714-la-civilisation-juive-dure-parce-qu-elle-se-protege-m-onfray-a-i24news

Et enfin une analyse d’une totale actualité et acuité   http://judaisme.sdv.fr/perso/goetsch/mutations.htm  

Claude Barouch (Z’l) et Claude Goasguen ( Z’l), terrible photo ( photo : source Alain Azria, Fb)

 

La rédaction de JForum, retirera d'office tout commentaire antisémite, raciste, diffamatoire ou injurieux, ou qui contrevient à la morale juive.

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2 Commentaires
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Bonaparte

Nos deux fêtes qui avaient prévu le Coronavirus sont Souccoth ( cabanes sur le balcon comme à Tunis ) et Pourim ( masques ) .

Par contre nous n’arrivons toujours pas à nous débarasser de la muzzcorona cette nouvelle peste qui touche les Juifs et Israël ( pas seulement ) .

Et pourtant nous pensions être immunisés à la suite de la naziecorona .

Itsik

Les fidèles doivent prendre leurs responsabilités et ne pas se fier ni au Consistoire ni aux commissions trucmuch de leurs synagogues.

Ceux qui sont de nature fragile, ceux qui ont peur du virus, ceux qui sont prudents, ceux qui veulent prier tranquillement sans passer leur temps à scruter qui à droit et qui à gauche, qui a toussé ou qui a de la fièvre, et ceux qui veulent être sûrs de ne pas attraper quelque chose à la Syna, ont intérêt à rester chez eux. Hachem accepte toutes les prières du moment qu’elles sont sincères et viennent du cœur, même les prières faites individuellement chez soi sans le Minyan halakhique.

Il faut sur une affaire de vie et de mort savoir décider tout seul, et ne pas remettre sa décision à d’autres.