« L’espérance s’est évanouie,, il ne reste au communisme que le mensonge »

Ce sont les mots de l’historien Thierry Wolton, qui vient de recevoir le Prix Aujourd’hui 2018 pour sa trilogie: « Une histoire mondiale du communisme ».

Quand il passe devant les grilles de la fac de Tolbiac, où sa fille étudiante est empêchée comme tant d’autres d’étudier, l’historien Thierry Wolton ne manque pas de s’arrêter devant les pancartes et les affiches placardées par les étudiants grévistes.

Certaines, comme celle qui lance aux passants « Vous êtes à l’Est! » perpétuent l’humour de mai 68. D’autres, qui affirment vouloir « se réapproprier la fac et les moyens de production de l’éducation » ou encore « Instaurer un rapport de forces global » sortent tout droit des bréviaires du vieux communisme qu’il connaît si bien pour l’avoir exploré sous toutes ses formes depuis trente ans.

Tourists visit the Forbidden City in central Beijing, China, on China’s 68th National Day October 1, 2017. REUTERS/Jason Lee

Le PC, qui pesait encore en France 21,3% des voix avec Jacques Duclos à la présidentielle de 1969 qui vit Georges Pompidou succéder au Général de Gaulle, ne serait donc pas mort aujourd’hui, comme on l’a tant répété? Certes, « la perspective radieuse vers laquelle il entraînait ses croyants a disparu, constate Wolton. La grande espérance qui l’animait au début du XXIe siècle s’est évanouie. Ne restent que la haine et le mensonge. »

Le système communiste, d’ailleurs, ne règne plus à travers le monde. Il n’impose plus son régime totalitaire dans 27 pays. Six pays seulement désormais s’en réclament –au premier rang desquels l’immense Chine, qui inquiète Wolton: « les instruments dont dispose le nouvel Empereur à vie Xi Ping pour établir son pouvoir par une propagande nationaliste diffusée du matin au soir et une surveillance de tous les réseaux de communication et de tous les esprits sont sans commune mesure avec ceux dont disposait Mao Tsé Toung. Que se passera-t-il si la nouvelle classe moyenne aspire à prendre sa part de pouvoir? »

Mais l’inquiète tout autant la survivance –ou la renaissance- d’une idéologie qu’il n’hésite pas, en montrant « le caractère intrinsèquement criminel de la lutte des classes » et en pointant un discours qui désigne jusqu’à l’obsession la bourgeoisie occidentale et le capitalisme coupables de tous les maux de la planète, à comparer au nazisme.

« Comme le nazisme, le fascisme et l’islamisme, le communisme totalitaire hait la social-démocratie autant que le libéralisme. Il ne supporte pas une société ouverte –une société où l’on a l’amour de la liberté, une société où l’amour peut s’épanouir… »

N’est-ce pas, d’ailleurs, dans le lit du communisme que l’islamisme radical s’est propagé le plus vite? Wolton cite l’Iran, dont le Shah fut haï comme un symbole du capitalisme occidental, l’Egypte, où le régime laïc de Nasser, allié à l’URSS, allait préparer le terrain des Frères musulmans… On songe aussi à l’Algérie.

Dans tous les cas, on a pu observer, chez les intellectuels des pays libres et singulièrement chez les Français qui se réclament le plus de « l’Esprit des Lumières » et croient régulièrement revivre 1789, le même phénomène, saisissant, de « cécité volontaire ».

Dans le Tome III intitulé « Les Complices » de sa trilogie monumentale dont les deux premiers tomes (« Les Bourreaux » et « Les Victimes ») ont été publiés en 2015, Wolton dépeint tour à tour « militants aux ordres, intellectuels aveuglés, politiciens de toutes obédiences ».

Peu d’hommes politiques de la IIIe République en sortent grandis, à l’exception de Léon Blum qui dénonce au Congrès de Tours (1920) « la conquête du pouvoir par un coup de force, le terrorisme comme moyen de gouvernement ». Mais c’est « le silence des clercs –pire, leurs voix mêlées au chœur des assoiffés de sang » qui inspirent à l’auteur ses meilleurs portraits. On savait que « le grand poète » Louis Aragon, que Dany Cohn-Bendit, pourfendeur des « crapules staliniennes » chassa de Nanterre en mai 1968 car Aragon avait, accusait-il « du sang sur ses cheveux blancs », avait écrit « Feu sur les policiers, feu sur les bourgeois, camarades! » Mais savait-on que le Nobel de littérature Romain Rolland, auteur de « Jean-Christophe » et tant admiré d’hommes de gauche comme François Mitterrand qui se rendait en pèlerinage dans sa maison de Vézelay, avait été accueilli comme un prince à Moscou par Staline et en était revenu ébloui?

Savait-on que, informé de la loi criminelle imposée par « Le Petit Père des Peuples » et qui prévoyait de tuer les enfants de douze ans coupables d’ « entêtement religieux », Rolland avait écrit à son ami Staline une lettre l’implorant de démentir l’horrible rumeur? Cécité volontaire. Adoration de la force brutale. Et passion de la soumission.

Pour avoir dépeint ces maux français, Wolton fut longtemps au ban de l’intelligentsia parisienne. Presque trente ans après la chute du « rideau de fer », on lui rend enfin justice.

Le Jury du Prix Aujourd’hui* –un prix littéraire, désormais doté de 45.000€, et qui récompense chaque printemps depuis 1955 une œuvre historique ou philosophique et compte à son palmarès des noms aussi prestigieux que Hélène Carrère d’Encausse, René Girard, Mona Ozouf et Patrick Boucheron –vient de lui décerner le Prix 2018. Pour faire connaître un passé ignoré du plus grand nombre. Et comme un appel à la clairvoyance.

(*Christine Clerc préside le jury du Prix Aujourd’hui. Celui-ci est composé de douze journalistes dont Christophe Barbier, Raphaëlle Bacqué, Albert du Roy, Alain Duhamel, Bruno Frappat, Franz-Olivier Giesbert, Laurent Joffrin, Hélène Jouan, Elisabeth Quin, Alain-Gérard Slama et Philippe Tesson)

 

GRASSET

 

Thierry Wolton, « Une histoire mondiale du communisme », éditions Grasset

Christine Clerc Journaliste, grand reporter et auteur

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Bonaparte

Ils ont soutenu le pacte germano soviétique .

Ils ont hurlé  » vive Staline  » aprés les discours de Maurice Thorez quand l’Occident était au bord de la guerre contre la Russie de Staline .

Comment auraient ils agi si la France entrait en guerre contre la Russie ?

Des traitres qui ont enfanté des fachos comme Jacques Doriot , cette ordure antisémite et collabo pur et dur .