Une stratégie en mutation : le Hezbollah face à une crise politique et militaire

Confronté à une pression croissante sur les fronts politique et militaire, le Hezbollah semble adopter une approche plus mesurée pour préserver son influence au Liban. Entre tentatives de démonstration de force et ajustements stratégiques, l’organisation cherche à maintenir son contrôle dans un contexte où les critiques internes et externes se multiplient.

Une démonstration de force controversée
Dans le cadre des célébrations du « Jour de la Libération », le Hezbollah a orchestré une mobilisation populaire dans la bande frontalière avec Israël, incitant des villageois à retourner dans leurs foyers largement détruits. Cette initiative, qui visait à réaffirmer son autorité, a malheureusement viré au drame, avec 22 civils tués et une cinquantaine de blessés. Cette tragédie a provoqué une vague d’indignation nationale. Les médias libanais et les personnalités politiques, notamment Samir Geagea, l’une des figures chrétiennes les plus influentes, ont vivement critiqué l’organisation, remettant en question sa légitimité en tant que partenaire politique.

Face à cette controverse, le Hezbollah a rapidement ajusté sa posture. Il a suspendu les déplacements des civils vers certaines zones sensibles et a assuré qu’il ne s’opposerait pas aux interventions de l’armée libanaise pour saisir des armes au sud du Litani. Ces gestes visent à apaiser les tensions tout en préservant une marge de manœuvre pour ses activités au nord du fleuve.

Une coopération prudente avec la FINUL
Dans un contexte de surveillance accrue par la FINUL (Forces intérimaires des Nations unies au Liban) et l’armée libanaise, le Hezbollah a fait preuve d’une relative retenue. Il n’a pas contesté la présence prolongée de Tsahal dans plusieurs villages stratégiques, tout en exigeant la libération de ses combattants capturés. Cette position pragmatique reflète une volonté de limiter l’escalade militaire tout en maintenant une présence symbolique dans des zones clés, comme Tel Avida et Marun a-Ras, autrefois des bastions stratégiques.

Crise de leadership et pression politique interne
Sur le plan politique, le Hezbollah est confronté à une situation délicate. De plus en plus de membres de la communauté chiite réclament une représentation indépendante, éloignée de l’influence du Hezbollah et du mouvement Amal. Ces revendications mettent en lumière une fracture croissante au sein de sa base traditionnelle, exacerbée par l’hostilité envers le nouveau président, le général Joseph Aoun, et le Premier ministre désigné, Nawaf Salam. Ce dernier, en opposition directe avec le Hezbollah, refuse de céder à ses exigences concernant la répartition des portefeuilles ministériels, notamment celui des Finances.

La perte d’une majorité au sein du futur gouvernement oblige le Hezbollah à composer avec des adversaires historiques, tels que les alliés de Samir Geagea et de Sami Gemayel. Cette nouvelle configuration politique compromet sa capacité à diriger de manière unilatérale et accentue les divisions internes.

Une réorganisation stratégique en cours
Face à ces défis, le Hezbollah semble concentrer ses efforts sur une réorganisation interne. Tandis que la branche militaire a été confiée à de nouvelles figures comme Haitham Tabatbai et Abu-Ali Haider, la direction politique reste marquée par une absence de leadership fort. Le secrétaire général adjoint, le cheikh Naim Qassem, peine à inspirer la même autorité que ses prédécesseurs, laissant le mouvement sans figure charismatique pour le guider dans cette période critique.

L’évolution actuelle du Hezbollah reflète une tentative de survie dans un environnement de plus en plus hostile. Son choix de réduire les confrontations directes avec Israël et de collaborer, même partiellement, avec l’armée libanaise et la FINUL pourrait signaler un changement stratégique. Toutefois, ces ajustements ne suffiront pas à dissiper les divisions internes ni à apaiser les critiques croissantes de la classe politique libanaise.

Alors que le Hezbollah tente de resserrer ses rangs, son avenir semble incertain, pris entre l’érosion de son influence populaire et la montée de forces politiques opposées à son hégémonie.

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Franck DEBANNER

Situation bien entendu, temporaire, comme d’habitude. Différée une fois de plus, la destruction totale des déchets infestant le Liban est toujours aussi indispensable. En France les gens ont déjà cinq poubelles pour trier leurs ordures. Au Liban il faudrait en rajouter le double.