“J’accuse“, l’affaire Dreyfus magistralement vue par Roman Polanski

Culture BY Cathie Fidler LE 12/11/2019

 

 

 

 

 

 

 

La scène d’ouverture de J’accuse, réalisé par Roman Polanski, vous saisit à la gorge dès la première minute : une file d’hommes en uniforme traverse l’écran, de la droite vers la gauche, dans l’immense cour de l’École Militaire, en direction d’une cible que l’on découvre bientôt pour être l’un des leurs : le Capitaine Dreyfus, qui va être dégradé pour « haute trahison ».

Avec une brutale précision, ses insignes lui sont arrachés un à un ; son sabre, rompu. Ces attributs reposent au sol en un petit tas emblématique de la honte infligée à un innocent devant quatre mille soldats et une foule immense, haineuse, et antisémite, bien sûr. Une image reprise pour clore le film, afin que nul ne l’oublie.

Affiche du film J'accuse de Roman Polanski Jewpop

Un défi magistralement relevé par Polanski

Voilà un drame historique dont on ne risque pourtant pas de spoiler la fin, puisque chacun la connaît. Pas de danger non plus d’en dire trop sur le sujet, puisque chacun (plus ou moins) en a entendu parler, sans pour autant en avoir saisi les circonvolutions. Et c’est bien là le défi qu’a magistralement relevé Roman Polanski en réalisant ce film remarquable sur « L’Affaire », ainsi qu’a été nommée en son temps celle du procès du Capitaine Alfred Dreyfus : il a su rendre limpide un sujet qui a dérouté en cours d’Histoire nombre de lycéens. Et même leurs enfants. Et même leurs parents, du reste. (C’est quoi déjà un bordereau ?)

Carte postale Affaire Dreyfus Jewpop

Pour y parvenir, Roman Polanski s’est appuyé sur « D. », un roman du britannique Robert Harris, avec qui il nous avait déjà donné le magistral « The Ghost Writer », en 2010.

Dans J’accuse, le réalisateur s’attache à montrer le point de vue du Lieutenant-Colonel Picquart – un antisémite de bon ton, comme il en existait tant alors dans la société française « de souche » –, qui pourtant se rebelle face à une injustice dont il considère qu’elle risque d’entacher l’institution à laquelle il a dévoué sa vie : l’Armée française.

Mis face à des preuves qui innocentent le Capitaine Dreyfus, ce militaire, devenu responsable du renseignement, met en péril sa carrière, et même sa vie, pour le sauver en révélant les coupables, eux-mêmes des très haut-gradés. Ceux-ci, on le sait, ont fabriqué les faux documents qui ont mené Dreyfus à l’Île du Diable.

Le film de Polanski suit l’enquête du Colonel Picquart, jusqu’à ce que celle-ci aboutisse à la réhabilitation du condamné dégradé. En filigrane, ainsi que l’a souhaité son réalisateur, on perçoit le tragique d’une société paranoïaque, vouée à sa chasse aux sorcières ; le tout sur fond de secrets militaires, d’espionnage, et de presse engagée. Ainsi, le spectateur ressent lui-même la détresse de celui qui subit l’opprobre de ses concitoyens.

Un époustouflant Jean Dujardin

Photo de jean Dujardin dans J'accuse de Roman Polanski Jewpop

Jamais de fausse note dans ce long-métrage – très peu de musique, d’ailleurs –, jamais de facilités ; jamais de gros plans sur une famille éplorée – seuls deux plans rapides montrent l’épouse de Dreyfus lors du procès –, jamais de jeu d’acteurs autocentrés, comme l’on en voit tant dans des films qui ravissent le public en ce moment. Au lieu de cela, de la sobriété chez tous et, bien entendu, chez le magnifique, l’époustouflant Jean Dujardin. Côté réalisation, cela implique une totale maîtrise de la direction d’acteurs. Lire la suite 

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