Dans le chaos généré par la guerre civile libyenne, appuyée par l’OTAN, l’énorme arsenal d’armes n’attendait que de se faire cueillir par les pires mouvements terroristes de la planète. 

Comment le Wilayat Sinaï de l’Etat Islamique (Daesh) – qui est le produit de l’allégeance d’une autre organisation terroriste, l’Ansar Baït Al Maqdis – mène sa propre guerre contre une Armée égyptienne qui a reçu des renforts massifs au cours des trois dernières années? La plupart des commentateurs pensent que les forces égyptiennes sont trop mal équipées pour s’occuper sérieusement des méthodes de guérilla de ce groupe dans les zones urbaines, montagneuses et désertiques.

Pour marquer son désagrément à la suite du renversement du Président Mohammed Morsi et du régime des Frères Musulmans,le Président Obama a suspendu une partie de l’assistance militaire américaine à l’Egypte et refusé d’aider le Président Abdel Fattah al-Sisi  à mettre sur pied des unités commandos spéciales et de fournir d’autres équipements dont les Egyptiens avaient cruellement besoin. En outre, à la suite de la chute des Frères Musulmans, toutes les organisations djihadistes du Sinaï se sont regroupées pour former ce fameux Ansar Baït  Maqdis (puis le Wilayat Sinaï de Daesh).

Mais pour le quotidien populaire Al-Masri al-Yom, qui a consacré son thème du 2 février à ce problème, Daesh doit son succès continuel à la facilité avec laquelle il continue d’acquérir des armes à capacités supérieures, en se transformant « d’une petite organisation ayant un armement léger à quelque chose d’assez proche d’une milice régulière disposant d’un armement sophistiqué et une puissance de feu avec laquelle il faut compter ».  Dans le chaos qui a fait suite à la guerre civile libyenne des années  2011-2013, d’énormes stocks d’armement de l’armée libyenne ont été disponibles pour tous les pillages.

 Bientôt, un flux régulier a été transféré clandestinement par un nouveau groupe djihadiste, Ansar al-Sharia, apparu dans la partie Est du pays, bien avant le meurtre de Muhammad Kadhafi. Certains de ses dirigeants sont devenus membres du Conseil National Transitionnel (intérimaire) qui a dirigé le pays, ce qui leur a, en outre, donné un accès libre et « légitime »à tous les dépôts d’armes de l’armée. Ce groupe a des liens avec Al Qaïda au Maghreb Islamique, très actif en Afrique du Nord et les pays du Sahel, et certaines de ces armes ont frayé leur chemin par là ; mais la quantité la plus vaste est allée vers l’Egypte, alors en pleine tourmente et est tombée entre les mains des organisations terroristes dans la Péninsule du Sinaï et à Gaza.

Des officiers corrompus ont aussi touché leur part du pactole de l’argent des armes clandestinement en circulation.

Selon le quotidien égyptien,en 2012, l’arrivée du Kornet russe dans le Sinaï, qui est un missile antitank guid, a changé complètement la donne.

Utilisé pour la première fois contre une position de l’armée égyptienne près de Rafah, il a, depuis, fait des dizaines de victimes autant parmi les forces armées que les civils et cela reste un réel pouvoir de dissuasion, à cause de sa portée de cinq kilomètres, sa précision et son impact meurtrier.

Ce n’est pas la seule arme sophistiquée à être transférée clandestinement de Libye vers les positions de daesh et du Hamas dans le Sinaï. Il y a aussi eu des missiles Grad (du type tiré récemment sur Eilat), des roquettes-grenades à propulsion, des missiles Strela de défense anti-aérienne, les derniers types de fusils d’assaut Kalachnikov, les mitrailleuses lourdes russes DShK et ainsi de suite. Tout ce qu’on a cité ci-dessus provient des stocks pillés de Kadhafi.

 

Entre les mains des organisations fanatiques, ils ont un impact dévastateurs.

Selon Al-Masri al-Yom, les enquêtes menées parles institutions internationales surveillant les contrats d’armement à travers le monde montrent que les numéros de séries des armes saisies en Egypte dans le Sinaï correspondent aux armes acquises par Kadhafi en Union Soviétique, puis ensuite en Russie. D’autres pays comme la France, l’Italie, la Grande-Bretagne et même la Corée du Nord ont vendu avec avidité des armes à Kadhafi, mais la Russie restait son fournisseur principal.

Les équipes d’enquête envoyées par le quotidien égyptien dans le Nord du Sinaï ont entendu, de la part des anciens des tribus et d’autres citoyens que, dès le début 2011, alors que la situation sécuritaire empirait dans la Péninsule, conséquence de la tourmente en Egypte et en Libye, on apercevait les terroristes djihadistes ramenant des armes avancées qu’on n’avait jamais vu auparavant dans la région.

A la même époque, des djihadistes de Gaza et de Libye, dont la plupart étrangers, sont arrivés pour inculquer aux djihadistes locaux l’usage de ces nouvelles armes et les entraîner, non seulement à la guérilla urbaine, mais aussi au combat dans des zones entourant les villes de Sheikh Zuweid, Rafah et El Arish. En moins de quelques mois, alors que le Conseil Suprême de l’Armée dirigeait l’Egypte, ils ont réalisé victoires après victoires. Il n’y avait personne pour répliquer à la menace de façon décisive : les membres des forces de sécurité avaient abandonné la Péninsule en masse pour retourner au Caire, sentant que la îne de commandement avait cessé d’exister.

Les terroristes d’Ansar Bait al Maqdis attaquaient les barrages routiers et les patrouilles de l’armée ; les soldats étaient confrontés à des armes dont ils ne soupçonnaient même pas l’existence. En 2014, une tentative de déferler dans le commissariat de police stratégique d’El Arish a presque failli réussiret il ne revient qu’au courage extraordinaire et à l’ingénuité des officiers et des policiers présents qu’ils aient fait avorter ce désastre.

Le pipeline transportant le gaz égyptien vers Israël a été saboté à chaque fois que possible (plus d’une douzaine de fois) jusqu’à l’interruption complète des exportations.

L’élection de Morsi n’a même pas signalé une fin quelconque à la contrebande d’armes et aux attaques, au contraire.

Le nouveau Ministre de la Défense désigné par le Président,  Abdel Fattah al-Sissi, a réorganisé l’armée et était sur le point de lancer une contre-offensive dans la Péninsule afin d’éliminer les terroristes avant qu’ils ne puissent se retrancher et s’enraciner encore plus, mais il en a ét »é empêché par Morsi. Mais, le temps de renverser le Président du moment et Ansar Bait al Maqdis était devenu encore mieux organisé et entraîné.

Le fait qu’il prête allégeance à Abu Ba al Baghdadi et à l’Etat Islamique lui a rapporté d’autres financements et une assistance tactique supplémentaire. En juillet 2015, après l’élection de Sissi comme Président, le mouvement a lancé un assaut de grande envergure contre Sheikh Zuweid, où il espérait fondé un Etat Islamique. Les forces de sécurité l’ont emporté le lendemain, après des combats intensifs : 21 policiers et hommes de troupes et plus d’une centaine de terroristes y ont laissé la vie.

Comme rapporte le quotidien égyptien, les terroristes de l’Ansar al-Sharia, assistés par des officiers libyens qui avaient « libéré « les dépôts d’armements et de munitions de l’armée, les ont fait passés en contrebande à travers toute la frontière poreuse de plus de 1200 kms, parfois même par le point de passage terminal d’El-Saloum.

Ils attendaient en transit dans des dépôts souterrains le long de passages frontaliers et dans les oasis de iwa et Farafra ; ces dépôts sont assez profonds pour abriter des jeeps équipées de mitrailleuses lourdes.

Certaines de leurs armes étaient ainsi dispersées à ts toute la Haute-Egypte – Assiut et Beni Souef et ensuite, de là vers le Sinaï. Mais le noyau dur passait à travers les pistes désertiques de l’Ouest et peu utilisait les routes vers la Péninsule du Sinaï et Gaza.

Des points de rencontres avec des terroristes locaux étaient mis sur pied grâce aux téléphones satellitaires. Des alertes précoces nt envoyées concernant les barrages routiers de l’armée et des voitures civiles semblant tout-à-fait innocentes étaient envoyées avant les camions transportant les armes de contrebande pour prévenir et localiser les barrages routiers disposés au hasard, de façon à leur faire prendre des routes alternatives.

Le Conseil Suprême de l’Armée, occupé à tenter de diriger tant bien que mal le pays, n’était pas suffisamment conscient de ce qui se passait et Morsi a apparemment choisi de ne pas le voir pour des raisons idéologiques assez évidentes. Sissi, cependant, a saisi l’étendue de la menace et après s’être emparé du pouvoir,il a ordonné à l’armée de mettre un terme à cet approvisionnement régulier d’armement avancé à Daesh dans le Sinaï.

La tache n’avait rien de facile. La frontière est située le long de zones désertiques et montagneuses. Des renforts ont bien été envoyés, mais les contrebandiers ont répliqué, harcelant les patrouilles et les positions de l’armée. Dans l’oasis de Farafra, une attaque-surprise contre un avant-poste de l’armée, en juillet 2014, a fait 27 morts parmi les soldats. En avril 2015, les avions de chasse de l’armée ont confondu une caravane de touristes avec des contrebandiers et ont ouvert le feu, tuant 12 touristes mexicains.

Cependant, la coopération s’est accrue avec la Nouvelle Armée Libyenne, dirigée par le Général Khalifa Haftar, débouchant sur un resserrement de la frontière, par laquelle la contrebande s’est poursuivie à un rythme plus bas.

Les forces égyptiennes ont encore découvert des dépôts souterrains de temps en temps.

Le Président Sissi a récemment annoncé la saisie de suffisamment de matériaux pour produire 1.000 tonnes d’explosifs! De l’autre côté de la frontière, les forces libyennes ont découvert un dépôt souterrain contenant 70 sacs d’explosifs pe près d’une demie-tonne ; suffisamment, selon un Commandant local, ^pour détruire 20 immeubles de 2 étages dans un rayon 4.000m2.

Le combat est loin d’être terminé et Daesh dans le Sinaï obtient toujours des livraisons régulières d’armes de premier choix venant de Libye, en transfère un certain nombre au Hamas à Gaza, dans le cade de leur coopération renforcée et mutuellement bénéfique.

Selon Al-Masri Al-Yom, les officiers libyens ajoutent que la contrebande s’effectue aussi le long de la frontière commune avec le Soudan, la Libye et l’Egypte et que ces armements trouvent leur chemin vers les organisations terroristes islamistes actives à Alger, en Tunisie,au Niger, au Mali et même jusqu’en Syrie.

Il n’y a pas de données fiables concernant l’extension de ces différents types d’armes qui ont « disparu » des stocks de Kadhafi. Un porte-parole de l’armée libyenne a déclaré qu’on les estime à 21 millions d’articles différents.

La plupart d’entre eux a été transférée hors du pays – essentiellement en Egypte – ou détruites lors de la guerre civile qui ravage la Libye. Cela constitue un désastre stratégique de proportions stupéfiantes avec des conséquences à long terme pour l’Egypte et pour Israël.

On peut seulement s’interroger sur l’incroyable manque de prévision d’Obama et de l’Union Européenne – conduite par la France et la Grande-Bretagne – agissant dans le but de renverser Kadhafi, le seul facteur unificateur du pays constitué d’une mosaïque de tribus.

Dans le chaos qui s’en est suivi, les tribusont mis sur pied leurs propres milices privées afin de poursuivre leur propre agenda.

Bien que les puissances occidentales étaient bien au courant des quantités vertigineuses d’armement acquis par le dictateur libyen, au cours de ses logues années au pouvoir, ce n’est certainement pas ce fait indéniable qui les aurait arrêtées.

Elles auraient mieux fait d’y repenser à deux fois, si elles avaient compris qu’un flot de réfugiés allait finir par débarquer sur leurs rivages.

Par 
21 février 2017 05:21
jpost.com

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