Le député de Paris Claude Goasguen est mort du Covid-19
VIDÉO. Ce grognard parisien, libéral et partisan d’une droite décomplexée, ex-maire du 16e arrondissement, fut ministre éphémère de Jacques Chirac en 1995.
Par Valérie Peiffer
Ancien maire du 16e arrondissement de Paris, le député parisien Claude Goasguen est décédé à l’âge de 75 ans. « C’est mon dernier mandat. C’est sûr. Je tiens à avoir une vie après celui-ci », confiait-il en 2017, le soir de son élection à l’Assemblée nationale. La mort l’a emporté avant. Le décès soudain de cette figure de la vie politique parisienne, réputée pour sa grande gueule et son tempérament éruptif, laisse orphelin le plus chic des arrondissements parisiens. Libéral et partisan d’une droite décomplexée, le vieux lion, qui avait soutenu – à la surprise générale – Rachida Dati lors de la campagne municipale pour la mairie de Paris, ne rugira plus.
Rien ne prédisposait Claude Goasguen à faire de la politique : ce natif de Toulon, dont la famille est d’origine bretonne, rêvait d’une carrière d’officier de marine. C’est son père fonctionnaire qui l’envoie à Paris en internat dans le prestigieux lycée Henri-IV pour passer un bac de philo. Il ne gardera pas un bon souvenir de ses premières années dans la capitale. « J’avais l’impression de vivre au pôle Nord. Je me suis senti très seul », avait-il confié au Point en 2012. Ce qui ne l’a pas empêché d’y rester pour faire ses études de droit et bien plus tard de s’y faire élire comme conseiller de Paris avant de devenir député et maire du 16e arrondissement.
Président de la Corpo
Contrairement à ses amis politiques Alain Madelin, Gérard Longuet ou encore Patrick Devedjian – qui vient lui aussi de mourir emporté par le coronavirus –, Claude Goasguen a toujours nié avoir été membre d’Occident, groupuscule d’extrême droite des années 1960. Il a cependant été à la Corpo des étudiants de droit qu’il a présidée en 1967 et 1968. À cette époque, l’étudiant défendait l’Algérie française et soutenait Jean-Louis Tixier-Vignancour, candidat d’extrême droite à l’élection présidentielle de 1965. « La Corpo n’était pas mieux qu’Occident. Elle était toute aussi violente. Je me suis trop souvent battu… » confiait-il, y voyant « une erreur de jeunesse ».
Goasguen débute dans le 14e
La politique le rattrape un peu plus tard, au début des années 1970 : lors d’un dîner chez des amis, il fait la connaissance d’Eugène Claudius-Petit, qui sera son premier mentor en politique. Il accepte d’aider l’ancien ministre de la Reconstruction et de l’Urbanisme (1948 à 1953), qui se présente aux législatives de 1973 dans le 14e arrondissement. C’est donc dans cet arrondissement populaire et non dans le 16e que Claude Goasguen mène ses premiers combats électoraux. Il est battu aux législatives de 1978 alors qu’il était le suppléant d’Eugène Claudius-Petit. Ce dernier l’a entre-temps introduit dans la famille centriste. Dès 1977, il devient secrétaire national du Centre des démocrates sociaux (CDS).
Doyen de la faculté de droit et de sciences politiques de Paris-Nord, il est finalement élu pour la première fois conseiller de Paris du 14e en 1983. Sa carrière politique est lancée : il devient conseiller régional d’Île-de-France en 1986. La même année, il entre comme conseiller technique au cabinet de René Monory, alors ministre de l’Éducation nationale. Cela lui vaudra d’être nommé inspecteur général de l’Éducation nationale en 1987, puis recteur et directeur du Cned la même année. Suppléant de Jacques Toubon aux législatives de 1988, il devient député pour la première fois en 1993, quand Jacques Toubon est nommé ministre de la Culture dans le gouvernement Balladur.
« Chirac m’a tout appris »
Mais c’est Jacques Chirac, rencontré aux débuts des années 1980, qui lui met véritablement le pied à l’étrier. Son deuxième pygmalion en politique fait de lui son adjoint en charge des Relations internationales. Élu et réélu conseiller de Paris du 14e jusqu’en 1995, Claude Goasguen a accompagné Chirac avec une grande fidélité. Il répétait souvent que l’ancien président de la République lui avait « tout appris de la pratique politique et que personne n’était plus fort que lui sur le terrain ». Les deux hommes, qui partageaient le même amour des femmes, s’entendaient bien. Claude Goasguen est d’ailleurs le premier centriste à soutenir Jacques Chirac contre Édouard Balladur lors de la présidentielle de 1995.
Parachuté dans le 16e en 1995
Un soutien apprécié puisqu’il est nommé ministre de la Réforme de l’État et de la Décentralisation dans le premier gouvernement d’Alain Juppé. L’aventure est de courte durée (6 mois), les deux hommes ne s’appréciant guère. Susceptible et fort en gueule, Claude Goasguen agace le Premier ministre d’alors. Qu’importe, entre-temps, il a réussi son parachutage dans le 16e arrondissement où il a été élu conseiller de Paris. Jean Tibéri, alors maire de la capitale, lui confie les questions relatives aux affaires scolaires et universitaires. Là encore l’association ne tient pas : élu député du 16e avec plus de 70 % des voix, Claude Goasguen a le malheur de participer au putsch orchestré par Jacques Toubon pour renverser Tibéri. Très fâché, ce dernier lui retire sa délégation à la mairie de Paris.
Les querelles se multiplient et l’homme peaufine sa déjà solide réputation de grognard. Ainsi, en 1998, il rompt avec François Bayrou et son parti Force démocrate pour rejoindre Alain Madelin, qui a fondé en 1997 son propre mouvement baptisé Démocratie libérale (DL). « DL me correspondait mieux. Mais c’était un capharnaüm incroyable : nous étions 50 députés à vivre en autarcie », expliquait Claude Goasguen au Point en 2012. Certains disent que le centriste élevé dans le sérail chiraquien n’a jamais pardonné à son ancien ami Bayrou de lui avoir barré la route du ministère de l’Éducation en 1995.
Ce qui ne l’empêche pas de s’engager à nouveau derrière Jacques Chirac au moment de la présidentielle de 2002. Cette fois, on ne lui proposera aucun maroquin… Une blessure ? Sans doute… En 2012, il disait encore qu’il aurait bien repris le chemin d’un ministère ou même d’un secrétariat d’État « dont personne ne voudrait, comme celui de l’Immigration ou de la Réforme scolaire ».
Il rêve de la Mairie de Paris en 2006
Devenu avocat en 2003, Claude Goasguen se prend à rêver de la Mairie de Paris. Il se porte candidat à l’élection primaire pour l’investiture de l’UMP aux élections municipales de 2008. Avec 23,43 % des voix, il arrive en deuxième position derrière Françoise de Panafieu (40,69 %) et devant Jean Tibéri et Pierre Lellouche. En situation délicate face à la favorite soutenue par les deux autres candidats, il choisit de se retirer au second tour. Durant la campagne municipale, Claude Goasguen n’aide guère la candidate UMP… Il se fait cependant élire maire UMP du 16e arrondissement, évinçant sans le prévenir le sortant Pierre-Christian Taittinger, qui pensait conserver son siège.
Cette trahison ne nuit pas à sa réélection à la tête de la mairie du 16e en 2014 : il est en effet largement réélu dès le premier tour avec 63,04 % des voix. Loi sur le cumul des mandats oblige, il choisit de quitter son siège de maire du 16e quand il est réélu député en juin 2017. Ce dernier combat électoral est le plus difficile de sa longue carrière politique. Après un premier tour qui l’a mis en ballottage défavorable contre la candidate LREM, il l’emporte finalement à l’arraché en battant le pavé sans relâche, comme Chirac lui avait appris.
Jessica et Marilyn
Reste que derrière l’animal politique rugissant se cachait un amoureux du cinéma et de la littérature. Comme en témoignait son bureau dont les murs étaient couverts d’affiches, lorsqu’il était maire. Il vénérait Federico Fellini, Luchino Visconti et Bernardo Bertolucci, « les grands maîtres transalpins ». Il était littéralement fou de Jessica Lange. « Elle est belle et extrêmement intelligente », s’émerveillait-il. Mais son idole dont la photo trônait sur son bureau n’était autre que Marilyn Monroe.
Au-delà du septième art, cet helléniste et latiniste adorait aussi lire. Il relisait régulièrement L’Odyssée, son livre de chevet. Ulysse était son héros, « car il est celui qui renonce philosophiquement à être un dieu pour demeurer simple mortel ». Dans ses moments de blues, il confiait même que l’un de ses plus grands regrets était de ne pas être écrivain. Est-ce la carrière qu’il envisageait après ? Pas sûr ! Grand voyageur, le député amoureux d’Israël et de Jérusalem, qui avait fait le tour du monde quand il était adjoint aux Affaires étrangères à la Mairie de Paris, aurait sans doute volontiers repris ses périples lointains.
Un grand merci pour votre talent oratoire, votre finesse d’analyse, votre joie de vivre que l’on ressentait lorsque vous étiez invités sur les plateaux télé, quelle personnalité politique talentueuse, les mots en tant que littéraire et votre formation juridique laissaient entrevoir une rare capacité à être visionnaire, lucide, et humain avant tout.
Merci d’avoir soutenu la communauté juive, merci pour votre amour pour la ville éternelle qu’est Jérusalem, nous vous remercions pour votre qualité d’humain, nous ne vous oublierons pas, vous êtes dans notre, cœur pour toujours, franc, direct, vous étiez un humaniste, l’esprit avant tout c’est ce qui manque à cette société dans laquelle nous vivons.
Merci pour tout.