Les similitudes entre le monde des années 1930 et le nôtre, après le Brexit et l’élection de Trump, sont bien plus nombreuses, pertinentes et inquiétantes qu’on pourrait le croire.
Rejet des élites, des partis politiques traditionnels, des médias, de la démocratie représentative. Déclassement, replis identitaires, inégalités. Protectionnisme, nationalisme, autoritarisme, racisme. Choc technologique, montée des périls extérieurs.
Non, il ne s’agit pas d’une description du monde du début du XXIe siècle, mais de celui des années 1930…
Les comparaisons historiques ont leurs limites. Elles sont par nature réductrices. Les forces à l’œuvre dans les années 1930 sont différentes de celles qui agissent aujourd’hui. Des masses enrégimentées ne défilent plus au pas en tendant le bras la main ouverte ou le poing fermé.
Mais l’exactitude n’est pas toute la vérité. Et les similitudes entre le chaos de notre époque et les années 1930 sont à la fois nombreuses, pertinentes et inquiétantes.
Erreurs tragiques
Sans la grande dépression née du krach de 1929, la plus grande crise que le capitalisme ait connue, et l’effondrement social et moral qu’elle a créé, les démocraties n’auraient pas été aussi affaiblies. Hitler n’aurait sans doute jamais pris le pouvoir en Allemagne. La Seconde Guerre mondiale n’aurait sans doute pas eu lieu. L’URSS de Staline ne serait sans doute pas devenue la superpuissance qu’elle a été jusqu’en 1989.
Sans la crise financière de 2008 et ses conséquences économiques et sociales, il n’y aurait sans doute pas eu de Brexit. Donald Trump serait sans doute resté un promoteur immobilier new-yorkais et une vedette de télé-réalité. Les partis populistes ne seraient pas aussi puissants un peu partout en Europe. L’Union européenne ne serait pas aussi menacée. Les régimes autoritaires de la Russie, la Turquie, l’Iran et la Chine ne seraient pas aussi sûrs de leur force.
L’enchaînement des faits est évidemment différent… Après le krach de Wall Street en 1929, la récession devint générale en 1931 avec la faillite en chaîne de banques des deux côtés de l’Atlantique, des mesures d’austérité dans des économies déjà effondrées et la mise en place de barrières douanières et de contrôle des changes. Les dirigeants politiques ont alors commis des erreurs tragiques, notamment le fait de ne pas tenter de limiter le chômage de masse qui a fourni des arguments imparables aux adversaires de la démocratie.
Il a seulement fallu deux ans à Hitler et au parti national socialiste allemand pour commencer à exister sur le plan électoral, en 1930, et rallier 37% des suffrages aux élections législatives de 1932.
À Paris, le 6 février 1934, l’extrême droite réunit un million de personnes dans les rues et la même année l’insurrection des mineurs des Asturies en Espagne est sévèrement réprimée par l’armée. L’Allemagne commence à réarmer en 1935. La guerre civile espagnole éclate en 1936, l’année du Front Populaire en France et l’année d’une vague d’occupation des usines par les ouvriers aux États-Unis. C’est en 1936 que Staline lance les grandes purges, notamment dans l’armée. En résumé, les années 1930 voient plusieurs démocraties s’effondrer et la guerre devenir de plus en plus certaine.
Nous n’en sommes aujourd’hui évidemment pas là. La plus grande différence tient au fait que le système économique mondial est beaucoup plus interdépendant. Tous les pays comprennent que l’autarcie est un suicide. Cela ne veut pas dire que le repli sur soi n’est pas une tentation générale.
Crise de civilisation
Comme dans les années 1930, les partis politiques établis ont perdu la confiance d’un grand nombre d’électeurs. La croissance est faible, le chômage a augmenté dans les pays les plus fragiles, le pouvoir d’achat stagne ou baisse et l’avenir fait peur. Deux chiffres résument cette stagnation. La production industrielle française est aujourd’hui à son niveau de 1994. Aux États-Unis, entre 1985 et 2000, les heures de travail payées ont augmenté de 35%. Entre 2000 et 2015, elles ont augmenté de 4%.
Cela reste sans commune mesure avec une crise, qui il y a quatre-vingt-dix ans avait réduit de moitié la production industrielle des deux premières économies du monde, les États-Unis et l’Allemagne, et mis au chômage dans ces deux pays un tiers des salariés. Comme l’explique l’économiste John Kenneth Galbraith: «Des gens avaient faim dans les années 1930, 1931 et 1932. Et les autres étaient tourmentés par la crainte qu’ils pourraient bientôt avoir faim.»
La France des années 1930 a subi, mais moins fortement que les États-Unis et même que ses voisins anglais, italien ou allemand, la répercussion de la crise mondiale. Elle le doit à une industrialisation limitée et au fait d’être un pays encore largement rural (35% de la population active en 1931), Cela ne l’empêche pas d’être contaminée par «l’esprit des années 30» comme l’explique l’historien Serge Berstein (La France des années 30). Refus du libéralisme, constat d’une crise de civilisation, attirance vers d’autres modèles, communiste, monarchique, fasciste…
D’autant plus facilement que les affaires discréditent la classe politique. «À bas les voleurs!», c’est le slogan de la manifestation antiparlementaire monstre du 6 février 1934 à Paris, où se mêlent anciens combattants, camelots du roi et forces pré fascistes. Ils dénoncent les politiques impliqués dans l’affaire Stavisky, qui venait de «se suicider d’un coup de revolver qui lui a été tiré à bout portant». Avec les affaires Bettencourt, Tapie, Cahuzac et le «Penelope Gate», pour n’en citer que quelques-unes, notre époque n’est pas plus reluisante.
Les peuples choisissent la passion plutôt que la raison
L’insécurité, économique, identitaire, sociale est la marque des années 1930 et des années 2010. En réaction, la société se désagrège en groupes sociaux et ethniques antagonistes. La force des populistes d’hier et d’aujourd’hui, (les Trump, Farage, Le Pen, Orban…) est d’avoir identifié les fractures sociales, la profonde défiance envers les institutions et d’y apporter des réponses simplistes. C’est la faute, au choix et selon les époques, des élites mondialisées, du parti de l’étranger, des immigrés, des apatrides, des juifs, de l’Islam, des Mexicains, de l’Europe, de la ploutocratie internationale, de l’anti France…
«Les peuples ne peuvent pas vivre sans espoir. Quand la crise s’éternise, quand la sécurité est menacée, quand l’horizon semble bouché, ils aspirent à changer de destin»
Jean-Marc Vittori
Une partie grandissante des classes moyennes des pays occidentaux a aujourd’hui le sentiment d’avoir été trompée et trahie par les élites politiques et d’être les laissés pour compte de la mondialisation. Elle est prête à toutes les aventures pour que cela change y compris à se détacher de l’Europe ou à élire à la tête du pays le plus puissant au monde un personnage dont l’équilibre mental est incertain. «Les peuples ne peuvent pas vivre sans espoir. Quand la crise s’éternise, quand la sécurité est menacée, quand l’horizon semble bouché, ils aspirent à changer de destin», écrit l’éditorialiste Jean-Marc Vittori à propos des leçons oubliées des années 1930. Et ils répètent les mêmes erreurs.
Ainsi, on ne peut pas s’empêcher de faire un parallèle entre le Brexit et la décision prise dans la panique par le Royaume-Uni en septembre 1931 d’abandonner l’étalon or, le premier grand pays alors à quitter le système monétaire international.
La France n’est pas épargnée par ces tentations. Selon un sondage réalisé à la fin de l’année 2016 par l’Institut Ipsos Mori, pas moins de 80% des Français souhaitent l’arrivée d’un «leader fort» qui «transgresse les règles»… Comme l’écrivait Raymond Aron: «entre la passion et la raison les peuples choisissent toujours la première»
Le retour du ressentiment
On pourrait croire qu’une des grandes différences avec les années 1930 tient à la nature des ruptures technologiques. Il y a 90 ans, c’était la production industrielle de masse et une nouvelle forme d’organisation du travail, le taylorisme, et d’aliénation. Tout cela illustré par Les Temps Modernes, le film de 1936 de Charlie Chaplin.
La technologie a également altéré la vie publique. Internet et plus précisément les réseaux sociaux ont effacé les contraintes sociales et institutionnelles sur: ce qui peut être dit dans l’espace public, quand cela peut-être dit, où cela peut être dit et par qui. Les institutions indispensables à la vie d’une démocratie représentative, les partis politiques et les grands médias, qui servaient jusque-là de médiateurs, ont ainsi perdu une bonne part de leur pouvoir et de leur légitimité.
Le débat démocratique recule. Les opinions contradictoires sont de moins en moins tolérées. Quand les gens sont confrontés à des idées différentes, ils se sentent offensés. Le ressentiment de classe et le ressentiment ethnique, religieux et culturel sont devenus des forces presque irrésistibles. Ainsi, 57% des Américains blancs ont voté pour Donald Trumpet 66% de ceux qui n’ont pas fait d’études universitaires. Ils croient aux vieilles recettes des années 1930 recyclées par Donald Trump: le protectionnisme et l’isolationnisme.
Quel effet d’entraînement
Les États-Unis, comme le Royaume-Uni il y a quatre-vingt-dix ans, refusent désormais d’assumer le rôle qui est le leur depuis 1945, celui d’assurer la sécurité et la prospérité du monde libre. Comme dans les années 1930, l’Occident semble faible, indécis, impuissant.
Le plus grand danger aujourd’hui, comme dans les années 1930, est celui de l’effet d’entraînement. Le repli sur soi a déjà ébranlé les démocraties occidentales les plus anciennes perçues pourtant comme les plus solides: celles du Royaume-Uni et des États-Unis. S’il se transforme dans les prochaines années en guerre commerciale planétaire, les conséquences en seront incalculables. Le monde a mis trente ans à commencer à se remettre des années 1930…
Eric Leser
Pénible à plus d’un titre, l’article n’est pas digne de J.Forum.
Du politiquement correct, genre le Monde ou Libération.
Je suis désolé de constater que vous ne lisez pas les articles que vous poster sur votre site !
Je viens souvent lire vos pages et m’informer,
C’est pour cela que je me permets de vous critiquer aujourd’hui. Surtout après la lecture de l’article ci-dessus.
Cet article n’est ni fait, ni à faire. Il n’explique rien du tout.
Faire porter la décision et les conséquences du BREXIT sur l’Angleterre seule, est une faute journalistique.
Parler du BREXIT sans mettre en cause l’Europe et sans critiquer le Parlement Européen, c’est avoir des œillères.
Mettre en cause Donald TRUMP alors qu’il n’est là que depuis même pas deux mois. Surtout sans parler du désastre OBAMA, et de l’OBAMA CARE, que les Américains rejettent dans leur grande majorité. En passant sous silence que OBAMA, loin d’être un homme de Paix a laissé se décomposer le Moyen-Orient tout en soutenant les « Frères Musulmans ». Il soutenait particulièrement « Mohamed MORSI », il a ignoré le Général Abdel Fattah Al-SISSI. Il a pactisé avec l’IRAN qui a du mal à cacher ses velléités pour l’obtention de l’arme atomique.
Il faut dire aussi que l’auteur de ces lignes « Eric LESER » sort tout droit du moule du journal « Le MONDE » qu’il y a travaillé pendant 16 ans, de 1992 à 2008 – Le MONDE qui n’est pas un exemple d’objectivité, loin de là !
Que le Journal SLITE dirigé par « Eric LESER » n’attire pas plus de monde qu’un simple BLOG. Que ses pertes sont abyssales (– 930 000€ en 2008 / 2009).
Enfin, rien d’intéressant !
Par contre, le désastre économique est devant nous. Pour la simple raison qu’on souhaite que les « Taux bancaires » remontent. Sauf que l’économie de repart pas.
Si les « Taux bancaires » remontent trop vite, l’endettement des pays explosera à la hausse. Ce qui aura pour effet de mettre sous pression les populations concernées en les appauvrissants. Mis à part une fuite en avant, il est très difficile de voir comment le monde va s’en sortir.