La campagne présidentielle en France: entre un amont et un aval

Une fois de plus, l’activité politique, pourtant indispensable à la vie en société, exhibe un visage des plus laids et des plus repoussants.

Des politiciens qui se disaient d’accord et s’étaient rangés derrière François Fillon, lui tournent aujourd’hui le dos, se précipitent vers un éventuel remplaçant et quittent le navire par groupes compacts.

Comment expliquer cette attitude ? Comment comprendre que la politique ne coïncide jamais avec un comportement réellement éthique ?

Voilà un gouffre que nous n’arriverons jamais à enjamber, un gouffre, celui de l’opportunisme et de l’intérêt égoïste, deux choses qui prennent le pas sur tout le reste, et notamment sur les valeurs et les vertus.


Résultat de recherche d'images pour "meute"Pourquoi cette organisation en meute où le chef est mis à mort dès que l’on décèle dans son comportement le moindre signe de faiblesse ?

Mais ces deux termes ne figurent dans aucun programme de parti politique, quel qu’il soit. Mais pourquoi ? Pourquoi cette organisation en meute où le chef est mis à mort dès que l’on décèle dans son comportement le moindre signe de faiblesse ?

Il est étrange de constater que l’organisation politique au sens propre, c’est-à-dire le système qui fait que des êtres humains puissent vivre ensemble dans l’harmonie, tire sa force des aspects les plus sombres du psychisme humain – je ne dis même pas de l’âme car l’on se demande parfois si ces hommes et ces femmes qui nous gouvernent – ou ambitionnent de le faire, en ont vraiment une.


Au fond, le spectacle que donne notre pays à la face du monde, n’est pas si inhabituel mais on pensait qu’avec le temps, les mœurs politiques auraient évolué, laissant un peu plus de place à l’éthique.

Au fond, le spectacle que donne notre pays à la face du monde, n’est pas si inhabituel mais on pensait qu’avec le temps, les mœurs politiques auraient évolué, laissant un peu plus de place à l’éthique.

Risquons une brève analyse susceptible de nous éclairer dans cette lutte politique presque souterraine.

Il y a encore quelques semaines, le candidat qui semblait devoir être élu dans un fauteuil – une véritable élection de maréchal – est pris dans une tourmente sans fin, fait l’objet de quolibets et cette défiance a même fini par contaminer ses amis et ses collaborateurs les plus proches.

Résultat de recherche d'images pour "hegel phénoménologie de l'esprit"Tout le monde sait ce que signifient la vérité, l’authenticité, la fiabilité, la constance, bref tout ce que Hegel, dans La phénoménologie de l’esprit, nomme la belle âme (die schöne Seele), pour un philosophe.

Il n’est plus permis de penser que la politique n’a rien à voir avec la philosophie puisqu’il existe bien une philosophie politique et cette expression ne constitue pas une alliance de mots, ce n’est pas un oxymore. La preuve, c’est que Hegel lui-même a développé une philosophie politique et même une philosophie de l’histoire : et qu’est-ce que l’Histoire sinon une succession de décisions ou d’actes de nature politique ?

Nous vivons une expérience absolument inédite où le juge, volontairement ou involontairement, vient se mettre en travers du suffrage populaire.


Nous vivons une expérience absolument inédite où le juge, volontairement ou involontairement, vient se mettre en travers du suffrage populaire.

On parle même d’actions ou d’initiatives qui bafouent les institutions… C’est excessif.

L’ancien procureur général Eric de Montgolfier a confié sur un plateau de télévision que jadis, le ministère de la justice avait ordonné de ralentir la marche de la justice lorsque des candidats à l’élection présidentielle présentaient quelques symptômes appelant instamment à la prudence…


L’amont est préférable à l’aval. Il fallait agir ou légiférer avant.

C’est pour cela que je dis que l’amont est préférable à l’aval. Il fallait agir ou légiférer avant.

Résultat de recherche d'images pour "marine le pen"Ce qui donne, soit dit en passant, raison à Marine Le Pen lorsqu’elle affirme ne vouloir se rendre à la convocation de la justice qu’après l’élection. Et si elle venait à être élue ? Eh bien, elle rendrait des comptes après, au terme de son mandat. Cela reste une cote mal taillée.

Une chose demeure incontestable : le politique et la politique – telle qu’elle se pratique depuis au moins la fin de la guerre -, ne satisfait plus personne.

On déplorait l’abstention, premier parti politique de France, mais qui a encore envie de voter ?

Je sais que la déploration, à elle seule, ne peut rien. Notre époque est orpheline d’un Ernest Renan du XXIe siècle pour nous donner une nouvelle Réforme intellectuelle et morale de notre pays.

Au risque de se voir taxer d’angélisme et de naïveté par des politiciens cyniques (et même pas au sens philosophique de ce terme), répétons que mieux qu’une petite dose de proportionnelle, c’est une grande dose d’éthique et de probité qu’il conviendrait d’instiller en urgence dans un système qui n’inspire plus personne.

Il faudra aussi s’occuper de rénover le fondement même de notre société, la justice et son fonctionnement.

Maurice-Ruben HAYOUN in La Tribune de Genève du 4 mars 2016

Le professeur Maurice-Ruben Hayoun, né en 1951 à Agadir, est un philosophe, spécialisé dans la philosophie juive, la philosophie allemande et judéo-allemande de Moïse Mendelssohn à Gershom Scholem, un exégète et un historien français.

 
 

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