Médias/ La sémantique de Slate.

Comment détourner une analyse pro-israélienne de son sens véritable…

Directeur du Washington Institute for Near East Policy (Winep) Article original, un think-tank américain spécialisé dans les problèmes du Moyen-Orient, Robert Satloff vient de publier dans le magazine juif Moment un article sur le réalignement pro-iranien de l’addministration Obama, et ses conséquences éventuelles sur les relations entre les Etats-Unis et Israël.


Robert Satloff, directeur du Winep.

Le texte, qui conclut au risque d’une crise grave, sinon même d’une rupture, entre les deux pays, a été repris par le magazine en ligne Slate. Pour des raisons qui lui sont propres, et non sans quelques aménagements dans la présentation. Car si Satloff, le Winep et Moment (fondé en 1975 sous les auspices d’Elie Wiesel) n’ont jamais caché leur engagement envers la cause israélienne, Slate se réclame d’une sensibilité « libérale », au sens que ce mot revêt aux Etats-Unis : de centre-gauche et de gauche, et donc, au fil des années, de plus en plus pro-arabe ou pro-islamique.

Satloff n’évoque une rupture israélo-américaine que pour s’en inquiéter. Et il ne fait guère de doute à ses yeux que l’administration Obama, en faisant passer la décision d’un rapprochement avec l’Iran avant les engagements traditionnels américains envers Israël, en serait responsable. A la fin de son article, il écrit, non sans humour noir : « Espérons que la diplomatie américaine sera capable, en 2014, de tirer de son chapeau un lapin nucléaire – un accord avec l’Iran qui répondra aux préoccupations israéliennes … »

Mais si Slate reproduit le texte de Satloff, c’est peut-être dans un autre esprit. Qu’un analyste pro-israélien pense l’impensable, et prophétise « le pire pour Israël », cela justifie, a contrario, la ligne « politiquement correcte » : Israël doit se soumettre aux injonctions de la « communauté internationale » et de l’administration Obama en matière de « processus de paix ». , et se plier peu à peu à toutes les exigences de Mahmoud Abbas, du retrait aux « frontières de 1967 » à l’abandon de Jérusalem et au « retour des réfugiés de 1948 » ;

Je veux bien croire que les rédacteurs en chef de Slate ne sont pas radicalement anti-israéliens, ou ne mesurent pas les conséquences inévitables du « processus de paix », version Obama-Kerry. Je veux bien croire qu’ils n’ont pas entièrement saisi ce qu’impliquent les exigences « minimales » de Mahmoud Abbas et des organisations palestiniennes : le « retrait sur les frontières de 1967 », le rattachement de « Jérusalem-Est » à la « Palestine », et le « retour des réfugiés de 1948 ». Mais dans leur façon de présenter l’article de Satloff, il y a deux détails révélateurs.

Le titre, dans Slate, est le même que dans Moment : Will Israel and the US break up over Iran ? (Israël et les Etats-Unis vont-ils rompre sur l’Iran ?). Mais pas le « chapeau » : la courte introduction qui suit. Dans Moment, on lit : Different approaches to Iran’s nuclear program do not bode well for Israel in 2014 (La différence entre les approches face au programme nucléaire iranien n’est pas un bon signe pour Israël en 2014). Dans Slate : Tel-Aviv and Washington disagree about Iran’s nuclear program. That may be very bad news for Israel. (Tel-Aviv et Washington ne sont pas d’accord sur le programme nucléaire de l’Iran. Ce sont peut-être là de très mauvaises nouvelles pour Israël ).

Le ton, dans Moment, est plus nuancé, plus « diplomatique » (ce qui correspond au style de Satloff et au contenu de son article). Dans Slate, il est brutal (ce qui constitue, pour Satloff, une trahison ).

Et puis, il y a, dans Slate, ce « Tel-Aviv » – censé être la capitale d’Israël – qui ne figure pas du tout dans Moment . Parler de Tel-Aviv dans ce sens, cela signifie qu’on ne reconnaît pas Jérusalem (pas même « Jérusalem-Ouest »), comme la capitale d’Israël, ne serait-ce que de facto. Et donc qu’on s’est rallié à l’essentiel des thèses anti-israéliennes .

PAR MICHEL GURFINKIEL.

© Michel Gurfinkiel, 2014

Michel Gurfinkiel est le fondateur et président de l’Institut Jean-Jacques Rousseau. Il est également Shillman-Ginsburg Fellow au Middle East Forum.

www.michelgurfinkiel.com Article original

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