Mardi s’ouvre un procès qui devrait permettre d’éclaircir la façon dont l’émir du Qatar procède, de prête-noms en sociétés-écrans, pour investir en France.Une drôle d’audience va se dérouler mardi 14 mai au tribunal de grande instance (TGI) de Paris.

Elle met en scène des personnages qui, d’ordinaire, restent discrets.

Contre toute attente, ils se présentent à visage découvert.

Leur objectif : réclamer de généreuses commissions – dont ils auraient été lésés – à la suite de la vente à l’émir du Qatar, le Sheikh Hamad Bin Khalifa Al Thani, du siège parisien de la banque HSBC.

Ils ont assigné la banque ou directement l’émir du Qatar et ses mandataires en France, à payer ce qu’on leur doit pour services supposés rendus.

Une première.

L’affaire remonte à 2006.

Cette année-là, l’émir du Qatar est informé de la vente possible du siège de la banque HSBC, qui avait été au début des années 1900 le prestigieux hôtel des Champs-Elysées.

Il est très intéressé.


L’ancien siège de HSBC sur les Champs-Elysées à Paris (APESTEGUY/SIPA)

Comment le Qatar acquiert de l’immobilier français

La vente aura finalement lieu le 25 février 2010 pour un montant de 400 millions d’euros. C’est officiellement l’agence CB Richard Ellis qui était chargée de trouver le potentiel acquéreur et négocier pour le compte de HSBC.

Mais plusieurs intermédiaires estiment avoir joué un rôle déterminant. Ceux-là même qui réclament aujourd’hui réparation.

En les réunissant, mardi, le tribunal devrait permettre de lever un coin du voile sur la façon dont l’émir du Qatar procède, de prête-noms en sociétés-écrans, pour acquérir des biens immobiliers en France.

Et sur ce système de commissions, souvent promises, souvent réclamées, mais pas toujours perçues.

Voici les principaux protagonistes de ce procès.

1
Chadia Clot Alias Sanbar Jihan

De son vrai nom Sanbar Jihan, née en Palestine en 1947, Chadia Clot est peut-être le personnage le plus intéressant de cette affaire. Proche de l’émir, elle serait le pivot de ses investissements immobiliers en France et en Europe.

Au cours de l’audience, devraient être évoquées les nombreuses sociétés françaises immobilières que Chadia Clot dirige (SCI Concorde, SCI Galaxie Vendôme, SCI Eldom Opéra – dont Rue89 s’est procuré les Kbis) et qui sont détenues par la société néerlandaise Mayapan BV, un des fonds d’investissement en Hollande de l’émir du Qatar (600 millions d’euros d’actifs), dont un certain Victor Agha serait le président.

Dans cette nébuleuse de sociétés françaises, luxembourgeoises, suisses, hollandaises, Rue89 a pu vérifier que c’est la société française Lys Holding Champs-Elysées 1 SAS qui a acquis l’immeuble HSBC.

Cette société, domiciliée au 23 rue François Ier (Paris VIIIe) comme toutes les autres SCI précédemment citées, est notamment détenue par une société luxembourgeoise, Lys Holding 1.

Comme pour les autres sociétés, la présidence de la société Lys Holding Champs-Elysées 1 SAS est assurée par la société French Properties Management, elle-même détenue entièrement par la société néerlandaise Mayapan BV.

Et French Properties Management est gérée par Chadia Clot.

2
Paul Mouchel

L’intermédiaire au passé trouble

Cet intermédiaire occulte prétend avoir mis directement en contact les représentants de l’émir du Qatar avec les responsables d’HSBC. Il aurait signé un contrat avec HSBC le mandatant pour faciliter la vente du siège.
Toutefois, n’ayant pas de carte d’agent immobilier, il aurait fait appel à la société JFB Immo, dirigée par Laurence Baratte, pour « légaliser » son intervention…

Paul Mouchel serait une sorte de « conseil » immobilier des représentants de l’émir du Qatar en France.

Ce que conteste Chadia Clot. Durant de nombreuses années, Paul Mouchel aurait réalisé avec Chadia Clot, main dans la main, des opérations d’acquisitions (il s’agirait du Crédit Foncier pour 250 millions d’euros, l’hôtel de Coislin, place de la Concorde, et plusieurs immeubles pour le compte du Qatar).

Chacun aurait perçu de juteuses commissions pour ces belles affaires.

Ce protagoniste, qui « n’a pas », selon certains, « les allures d’un homme d’affaires », aurait un passé un peu trouble…

3
La société JFB Immo

Une obscure entité lyonnaise

Il s’agit d’une petite société immobilière lyonnaise qui revendique une commission de plus de 10 millions d’euros à la HSBC pour non-respect de ses engagements et réclame des dommages et intérêts, soit 12 millions d’euros, correspondant à 3% du prix de la vente réalisée.

4
Creezy Courtoy

La dame aux parfums

Femme du monde, résidant en Belgique, présidente d’une société de parfums en Belgique, Creezy Courtoy prétend avoir contacté un des responsables de la HSBC, un de ses amis de longue date, Pierre Jammes, ancien président d’une filiale de HSBC France afin d’organiser une réunion au plus haut niveau du groupe HSBC avec les représentants de l’émir du Qatar.

Elle a assigné Chadia Clot et l’émir du Qatar.

Elle réclame 4 millions d’euros.

Quelles sont les véritables relations entre tous ces intermédiaires qui gravitent autour de l’émir du Qatar ?

Quels sont les véritables liens entre Sanbar Jihan, dit Clot, et l’émir du Qatar ?

Quels rôles ont pu jouer la présidente d’une fondation belge spécialisée dans les parfums dans la vente du siège social de HSBC et cette société immobilière située à Lyon, très loin du désert du Qatar ?

Et enfin, quels avantages juridiques et fiscaux tirent l’émir du Qatar et ses intermédiaires en passant par ces montages complexes ?

La réponse à ces questions, peut-être, mardi prochain.

Rue 89
Article original

TAGS : Qatar Al-Tani Paradis Fiscaux Champs Elysées Immobilier

Commissions Holding HSBC

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