Journée internationale de commémoration de l’Holocauste: rompons le silence du deuil
Alors que nous nous apprêtons à célébrer la Journée internationale dédiée à la mémoire des victimes de l’Holocauste, nous pouvons difficilement nous recueillir dans le calme.
Plutôt que d’observer le silence, sous prétexte que le deuil le plus profond s’exerce dans la solitude, nous avons envie de crier.
Comment se peut-il que l’antisémitisme ne soit pas mort, ni en Europe, ni même aux États-Unis ? Comment se peut-il qu’en France, l’année dernière, une survivante de la Shoah ait été poignardée à mort avant d’être brûlée dans son appartement ?
Comment se peut-il que l’année précédente, à Paris, une institutrice retraitée, Sarah Halimi, ait été assassinée puis jetée de son balcon ?
Paris. Toulouse. Malmö. Copenhague. Berlin. Bruxelles. Notre humanité souillée par du sang innocent.
Un phénomène dont le retour nous semblait inimaginable vient nous hanter de nouveau.
Il a été conseillé aux Juifs d’Allemagne d’arrêter de porter la kippa par crainte d’attentats.
En France, on a déconseillé à des enfants juifs de fréquenter une école de quartier, décrite comme antisémite.
S’ajoutent à cela les profanations de cimetières, les svastikas peintes sur des synagogues et des écoles, les rassemblements anti-israéliens où les Juifs sont traités de « singes » et de « porcs ». L’Europe montre à nouveau un visage laid et inhumain.
Pendant des siècles, les Juifs ont été persécutés en tant que minorité religieuse.
Au siècle dernier, ils ont été considérés comme une menace pour l’État, d’où la volonté de les exterminer à travers l’Holocauste.
Aujourd’hui, les Juifs sont pris pour cible principalement en raison des événements du Proche-Orient, même si certains sentiments antisémites demeurent liés au négationnisme.
Près d’un tiers des Juifs d’Europe tendent à éviter toute participation à des événements liés au judaïsme ou à visiter des sites juifs car ils ne se sentent pas en sécurité.
Selon un sondage publié par la Commission européenne en décembre 2018, neuf Juifs européens sur dix pensent que l’antisémitisme a augmenté au cours des cinq dernières années.
Pour 89 % des participants à cette enquête, laquelle a été réalisée auprès de 16 300 personnes en Autriche, en Belgique, au Danemark, en France, en Allemagne, en Hongrie, en Italie, aux Pays-Bas, en Pologne, en Espagne, en Suède et au Royaume-Uni – soit les 12 pays qui rassemblent 96 % des Juifs d’Europe – l’antisémitisme s’exprime de la manière la plus grave et la plus problématique sur Internet et les réseaux sociaux.
Nous ne pouvons pas laisser cette horreur revenir. Il convient de lutter contre les crimes de haine et les comportements hostiles et violents à l’égard des Juifs et des minorités.
Si les États membres de l’UE ou la communauté internationale ne sont pas capables d’agir, et d’agir rapidement, nous risquons de connaître un retour aux atrocités du passé et à la contamination de nos sociétés.
Comme cela a été largement rapporté, trois jours seulement avant l’assassinat de Paweł Adamowicz à Gdańsk, un programme satirique à caractère antisémite a été diffusé à la télévision, à une heure de grande écoute.
Dans cette satire, l’organisation caritative qui avait invité M. Adamowicz à la manifestation au cours de laquelle il a trouvé la mort était dépeinte comme étant gérée par des forces obscures.
Paweł Adamowicz était un ardent défenseur des droits des minorités, en cette période d’augmentation du nombre de crimes inspirés par la haine.
En tant que progressiste, il critiquait ardemment la politique anti-immigration du parti conservateur au pouvoir. Son assassinat vient nous rappeler que nous devons en finir avec les discours de haine si nous voulons éviter de tomber dans le piège de la haine.
Se souvenir des victimes de l’Holocauste et des atrocités commises par le régime nazi est d’autant plus important aujourd’hui.
L’Holocauste est un héritage marquant de l’histoire européenne et entretenir la mémoire de la Shoah constitue un moyen important de prévenir l’antisémitisme.
Comme l’ont souligné certains historiens, le moment est venu d’instaurer une culture européenne du souvenir, avec un regard critique, plutôt que de cultiver une mémoire nationale individuelle.
À défaut d’entretenir cette mémoire qui nous est commune en tant qu’Européens, nous risquons de revivre les erreurs du passé.
Plus nous tarderons à bannir les propos haineux et à assumer notre passé, plus il nous sera difficile de construire une véritable mémoire collective européenne et de nous forger une identité nouvelle, fondée sur la diversité, le sentiment de partager une histoire commune, l’appartenance commune et, enfin, un destin commun.
Comme l’a écrit dans son dernier opuscule Primo Levi, l’auteur de Si c’est un homme et de l’article posthume Trou noir d’Auschwitz : « C’est arrivé, cela peut donc arriver de nouveau ».
Luca Jahier est président du CESE, le Comité économique et social européen.
L’article de la « libération du camp de la honte humaine » n’existe plus…
Toutefois voici le com que j’y manifestais. Il vaut bien pour cet anniversaire là.
.
« Oÿ !
Si « Le travail rend libre », avaient inscrit les démons, comment, nous, nous aurions pu dire que le camp avait été « libéré », employant cette funeste métaphore ?
Hé quoi ! le camp était-il prisonnier, lui-même pour qu’il fût libéré, ou n’était-ce plutot ces ombres rayées, hébétées, celles-là, que le Seigneur par Son profond mystère, avait gardées en vie…
Même la Parole était restée prisonnière, indicible, alors le camp ? Ou la honte des Nations, qui recoltaient le résultat de leur haine bimillenaire, impliquée dans cet enfer ?
C’était la Vie, furieuse et détenue, qui seule avait été libérée.
La responsabilité reste, à jamais. Et nous n’oublierons pas, jamais aussi .
Et le Pardon, vraiment, l’ont-elles vraiment jamais, encore , demandé, alors qu’elles continuent, obstinées, à nous condamner, nous seuls, plus que mille fois le reste de l’humanité réuni ? »
.
» Je me défends, donc je suis. » Herbert Pagani z’l