Un Bragard sur les traces de sa famille déportée à Marseille

Louis Vanthournout

https://i0.wp.com/jhm.fr/wp-content/uploads/2023/02/723117.hr-.jpg?w=696&ssl=1Pierre Rival et sa nièce (à côté du cube), entourés des lycéens de Marcel-Pagnol, à Marseille.

La Ville de Marseille a commémoré le 80e anniversaire de la rafle du Vieux-Port. Parmi les personnalités présentes, Pierre Rival, un Bragard dont la grand-mère et la tante font partie des 800 juifs déportés, tandis que sa mère a réussi à en réchapper. Un récit bouleversant (1/2).

Elles s’appellent Dora, Chaya et Tauba Minska. Juives d’origine polonaise, elles sont respectivement la mère, la tante et la grand-mère d’un Parisien de naissance, Bragard d’adoption bien connu : Pierre Rival. De leur histoire, « au début je ne savais rien », confie l’ancien journaliste aujourd’hui correspondant pour nos confrères de l’Union.

Rafle du Vieux-Port

C’est seulement à l’âge de 14 ans qu’il apprend qu’il est juif, car « ma mère l’était ». De fil en aiguille, il grapille des éléments pour mieux connaître ses origines. Et notamment pourquoi il n’a jamais connu sa grand-mère, ni sa tante. « Elles ont été déportées le 22 janvier 1943 (convoi 52) lors de la rafle du Vieux-Port. C’est la deuxième plus importante en France après celle du Vel d’Hiv ». Toutes les deux font partie des 800 juifs déportés au camp d’extermination de Sobibor (Pologne) où elles seront gazées en mars 1943.

Quant à sa mère, « elle a fugué en 1940. Elle a été arrêtée par le régime fasciste italien, incarcérée dans un camp de juifs étrangers. Elle a réussi à s’échapper et revenir en France en 1943. Jusqu’à la Libération, elle vivait dans la clandestinité avec des faux papiers », détaille Pierre Rival. Toutefois, Dora garde une part de mystère : « Elle a toujours voulu nous épargner mon frère et moi, pour qu’on ne se sente jamais considérés et persécutés comme elles l’ont été parce qu’elles étaient juives. Et comme beaucoup de survivants, elle restait très écliptique. »

Curiosité

Curieux de nature, Pierre Rival a longtemps vécu avec les informations partagées par sa mère en cette année 1978. Mais l’envie d’en savoir davantage le prend aux tripes. « Ce n’était pas une obsession, mais je m’interrogeais. Ce n’est pas anodin d’être le fils d’une femme qui a été pourchassée pendant sa jeunesse », partage celui qui a eu ce sentiment de « devoir faire quelque chose en leur mémoire ».

Dès lors, à chaque décennie anniversaire de cette rafle, l’ancien chroniqueur gastronomique se mobilise. En 1993, il publie un encart publicitaire hommage dans le quotidien Libération. Heureux hasard, il est alors contacté par Serge Klarsfeld, auteur en 1978 du livre “Mémorial de la déportation des Juifs de France” qui liste les 78 000 juifs déportés depuis la France (qu’on retrouve dans la bibliothèque du Bragard). « Il m’a donné l’adresse où habitaient ma grand-mère et ma tante : 12 rue du Baignoir à Marseille. » Dix ans après, en 2003, il profite d’un reportage pour se rendre sur place : « C’est devenu un square. Les numéros d’habitations passent directement du 8 au 16. »

En 2013, il se rend au Mémorial de la Shoah pour une lecture hommage aux victimes du convoi 52, avant donc de retourner à Marseille en janvier 2023. En face de la mairie, cent panneaux ont été installés pour les 80 ans de la rafle. L’un d’eux est consacré aux ascendances de Pierre Rival, avec des photos et un texte qui retracent leur histoire. Une histoire sur laquelle ont travaillé des élèves de Terminale du lycée Marcel-Pagnol de Marseille, dans le cadre de cet anniversaire. De ces échanges avec les jeunes et avec l’Association fonds mémoire d’Auschwitz (Afma), les découvertes ne vont pas s’arrêter là…

La seconde partie est à lire dans notre édition du mercredi 8 février.

Louis Vanthournout  jhm.fr

l.vanthournout@jhm.fr

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JUIFS

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