Accueil France Natalie Portman : « L’hébreu m’a donné confiance en moi »

Natalie Portman : « L’hébreu m’a donné confiance en moi »

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Parisienne depuis l’automne, elle est en harmonie avec son image d’égérie du parfum Miss Dior, dont la nouvelle campagne est signée Anton Corbijn. La star réalise aussi son premier film, d’après un roman d’Amos Oz, où elle joue en hébreu. Et vient de tourner dans Knight of Cups, de Terrence Malick. Deux expériences intenses. Rencontre.

 Mutine et rebelle, en un mot : libre. Dans la dernière campagne du parfum Miss Dior, signée Anton Corbijn (L’Américain, avec George Clooney), l’éternelle tanagra joue les filles de l’air au moment de passer devant monsieur le maire… Après deux campagnes parfum Miss Dior tournées à Los Angeles avec Sofia Coppola, le millésime 2015, mis en scène à l’Hôtel du Cap-Eden-Roc à Antibes, marque symboliquement l’installation en France de Natalie Portman avec son mari, Benjamin Millepied, et leur fils de trois ans, Aleph.

L’actrice, oscarisée en 2011 pour Black Swan, a suivi son cœur et son époux frenchy, nommé directeur de ballet de l’Opéra de Paris en octobre. Un déménagement que l’ex-baby doll, découverte à 12 ans par Luc Besson pour incarner sa lolita vengeresse de Léon, a opéré avec sa proverbiale discrétion. Star de Thor, le monde des ténèbres, bientôt à l’affiche du très attendu Knight of Cups, de Terrence Malick, miss Portman a accepté de partager ses impressions de Parisienne d’adoption.

Madame Figaro.– Dans le dernier clip de la campagne du parfum Miss Dior, signé Anton Corbijn, la jeune femme que vous interprétez refuse la civilité « madame », lui préférant « miss ». Serait-ce l’essence de la femme Dior ?
Natalie Portman.
 Cette campagne célèbre l’indépendance et la liberté, la volonté d’aller à l’encontre des étiquettes et des contraintes. Rester soi, ne pas se laisser redéfinir ou dompter, en dépit de qui l’on aime. Et c’est effectivement, je crois, une séduisante direction que le personnage choisit.

Costume Dior. 
 

Vous avez débuté dans Léon de Luc Besson il y a… vingt et un ans déjà. Les années semblent glisser sur vous. À 33 ans, vous sentez-vous plutôt « miss » ou « madame » ?
– Je préfère l’intermédiaire américain Ms. (prononcé miz, NDLR ), plus neutre, que l’on attribue à une femme indépendamment de son statut marital. Je ne crois pas que le fait d’épouser quelqu’un, d’avoir une famille ou d’atteindre un âge particulier vous change vraiment, du jour au lendemain. L’immaturité ne s’envole pas d’un coup ! Cela s’est opéré pour moi au fil de nouveaux rôles, de nouvelles responsabilités, de nouveaux centres d’intérêt. J’ai l’impression de me retrouver en permanence au cœur d’un cycle. Une évolution de chaque minute, de chaque jour, de chaque humeur presque ! Mais souvent, vous ne réalisez le changement que dans la façon dont les autres vous perçoivent.

Israélienne de naissance, américaine depuis l’âge de 3 ans, vous viviez à Los Angeles jusqu’à la rentrée dernière. Qu’avez-vous ressenti au moment de déménager à Paris ?
Forcément beaucoup d’enthousiasme ! Qui n’a pas rêvé de vivre un jour à Paris ? Je m’estime chanceuse de me sentir chez moi dans ces deux villes très complémentaires. J’adore Los Angeles pour sa jeunesse, son côté un peu adolescent, constamment en mouvement. La lumière, l’espace y sont uniques au monde. C’est un lieu idéal de création pour les artistes de tous domaines, car sans réelles institutions. À l’opposé, Paris est une ville historique, ancrée dans son classicisme et ses institutions. Sa beauté est une inspiration quotidienne. L’art et la culture s’y trouvent à tous les coins de rue. Le simple fait, par exemple, de pouvoir pousser la porte d’une librairie indépendante dans chaque quartier, par opposition à New York, où je serais en peine d’en trouver ne serait-ce qu’une seule, m’émerveille toujours.

Vous avez passé trois mois en région parisienne pour Léon. Auriez-vous pu imaginer venir vous installer un jour en France ?
Il y avait peut-être une forme de prédestination, dès ma naissance. C’est en hommage à la chanson de Gilbert Bécaud que mon père m’a prénommée Natalie. Fan de culture française, il m’en a naturellement imprégnée. Mes parents m’ont permis de tourner mon premier film avec un réalisateur français. J’ai commencé à apprendre la langue, je suis souvent revenue à Paris au fil des années pour la pratiquer. Je reprends quelques cours depuis mon arrivée ici. J’ai une énorme motivation pour l’améliorer aujourd’hui !

En tant que Parisienne d’adoption, qu’avez-vous pensé de l’ouvrage coécrit par Caroline de Maigret How to Be Parisian Wherever You Are * ?
Je suis amie avec Sophie Mas, l’une des auteures. Le guide se révèle très drôle et j’y ai puisé quelques astuces ! C’est une radiographie assez exacte de l’esprit des Parisiennes. Ce sont des êtres à part. Je les observe tout le temps, j’ai beaucoup à en apprendre. Je n’ai toujours pas vu une Parisienne se promener en short, en vêtement de sport ou en tongs dans la rue. Ici, même les enfants sont chics ! Toute ma vie, au quotidien, j’ai privilégié le confort plutôt que le style ou la mode. Désormais, je fais davantage d’efforts pour m’habiller, aussi bien quand je travaille que quand je m’occupe de mon fils, en famille ou avec mes amis. Il suffit d’un rien, pas besoin de se maquiller pendant des heures, mais je me suis découvert un vrai goût pour cette élégance décontractée typiquement française.

Six ans après avoir réalisé une partie de New York, I Love You, vous venez de signer votre premier film, adapté d’Une histoire d’amour et de ténèbres, de l’intellectuel israélien Amos Oz, tourné à Jérusalem. Un choix militant ?
Comme tous les Israéliens, je n’ai pas choisi de naître dans telle ou telle nation, et cela a pourtant fatalement des répercussions sur nos vies. Ces Mémoires m’ont parlé dès que je les ai lus. Ils détaillent l’enfance d’Oz en plein conflit israélo-palestinien. À 75 ans, il est un fervent partisan de la solution d’un double État. Mais mon film n’est pas particulièrement politique. Je l’ai axé sur la dimension familiale du récit, à laquelle on peut tous s’identifier. Le livre a été traduit en arabe notamment, parmi les vingt-huit langues dans lesquelles il a été publié. Je pense fondamentalement que tous les êtres humains sont curieux de connaître la vie de leurs voisins. Mon espoir est que l’art contribue à ce début d’ouverture et de dialogue avec l’autre, au-delà des identités ethniques, religieuses ou nationales.

Vous y incarnez la mère d’Oz, qui s’est suicidée quand il avait 12 ans. Vous jouez en hébreu pour la première fois de votre carrière. Cela fait-il jaillir des émotions particulières ?
Il y a un côté assez primal, car c’est le langage de mon enfance. Mais comme je ne le maîtrise pas totalement, cela limite l’improvisation. Le côté positif ? Cela m’a donné une confiance en moi que je n’avais pas, celle de jouer dans d’autres langues que je ne parle pas couramment. Je suis prête à essayer en français pour le réalisateur qui me fera suffisamment confiance !

Vous faites partie de la distribution chorale du très attendu Knight of Cups, de Terrence Malick, en compétition au prochain festival de Berlin. Christian Bale y joue un play-boy en pleine crise existentielle… Quelle a été votre expérience de la « méthode Malick », réputée hors normes ?
Tourner avec lui, juste avant de réaliser mon film, a été un vrai cadeau. Il est toujours en phase de recherche et d’expérimentation, dans l’improvisation. Il ne suit aucun des rituels qu’ont certains réalisateurs et m’a rappelé qu’on a le droit de suivre son propre chemin et son instinct. Et, surtout, de ne jamais cesser de s’amuser sur un plateau.

* Éd. Doubleday.

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