L’histoire de la Solution Finale en France a connu une évolution parallèle à celle de la mémoire collective des Français. Le retour des députés, en avril 1945, constitue une première prise de conscience éphémère de ce qu’est le sort dans les camps de concentration. Celui des juifs n’émerge pas dans sa spécificité. Les rares survivants d’Auschwitz font partie de la vaste famille des « déportés politiques ». Une chape de plomb semble tomber sur le pays heureux de se retrouver dans le camp des vainqueurs. Le chef de la France Libre n’hésite pas à construire la mémoire dans le sens d’une unité nationale.


Dans les années cinquante et soixante le souvenir de Vichy est refoulé, aidé en cela par l’installation d’un mythe dominant celui du résistancialisme. Ce terme insiste fortement sur le rôle moteur joué par la Résistance. Certains groupes politiques, les gaullistes et les communistes, occupent entièrement le champ de la mémoire de cette période. Les associations de déportés jouent cependant leur rôle. Il faut signaler aussi la création de plusieurs lieux de la mémoire : « le tombeau du Martyr juif inconnu » en (1956), l’érection de petits mémoriaux dans les cimetières israélites et les synagogues.

A partir de 1971, après la mort du Général de Gaulle, le miroir s’est brisé et les mythes ont volé en éclats. Henry Rousso parle d’un « retour du refoulé ». Le documentaire de Marcel Ophüls, Le Chagrin et la pitié (1971) en est la parfaite illustration.

En 1973, Robert Paxton un historien anglo-saxon publie dans La France de Vichy une analyse très neuve sur la collaboration d’état dont il rappelle après les historiens Jackel, Yves Durand, Henri Michel et d’autres qu’elle est une initiative française et non allemande.

Le renouveau d’une mémoire juive et le procès Barbie ont entraîné le regain de très nombreuses études sur la participation de Vichy à la Solution Finale, celles de R. Paxton et de Marrus, Vichy et les Juifs 1981 de S. Klarsfeld, Vichy-Auschwitz 1983-1985. Il faut ici mettre en relief l’œuvre monumentale Shoah film réalisé par Claude Lanzmann

La résistance juive, elle aussi, devient un objet d’étude avec une véritable perspective historique. La question des camps d’internement français a déclenché une polémique assez vive entre universitaires.

A partir de quand a-t-on connu la vérité des faits ? Selon l’écrivain français François Poirot Delpech, âgé alors de douze ans, il n’y a aucun doute pour lui, il ne reverrait plus son ami juif de classe arrêté durant l’année 1942.

L’organisation du procès Papon a remis à l’ordre du jour cette question. Selon Henri Rousso, l’un des meilleurs spécialistes actuels de l’histoire du régime de Vichy, l’historiographie française manifeste un grand retard. Il existerait un syndrome de Vichy qui plane sur la vie politique de la nation. Les révélations sur l’amitié qui liait l’ancien président Mitterrand à l’un des artisans français de la Solution Finale, René Bousquet, ont semé le trouble et l’émoi.

La percée de l’extrême droite dans la vie politique française depuis 1984 nous oblige à garder notre vigilance contre toute forme de renaissance du négationnisme dans ce pays.

La Loi Gayssot punit les délits négationnistes. Ces mesures visent au développement de la mémoire du génocide en France. Le décret présidentiel du 2 février 1993 a institué une « journée commémorant les persécutions racistes et antisémites commises sous l’autorité de fait dite gouvernement de l’Etat Français (1940-1944). »

Le président Jacques Chirac a reconnu, en 1995, les responsabilités de l’État français dans la participation au génocide.

Cette reconnaissance a entrainé la création de commissions pour l’évaluation et l’indemnisation des biens spoliés durant la shoah. L’Église de France, engagée dans un processus de reconnaissance spirituelle réciproque, a fait acte de repentance vis à vis des Juifs français pour le silence coupable qu’elle a observé durant la Seconde Guerre mondiale. Les années 2000 sont marquées par une forte recrudescence des actes antisémites en France. Les attentats de Paris, en janvier 2015, ont ravivé les souvenirs de la Shoah. Le devoir de mémoire est-il le meilleur antidote contre l’essor du terrorisme ?

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