Le triste retour de l’israélitisme

« Seule la prise en compte du passé, et même du passé ancien, permet de comprendre le style particulier de la citoyenneté des juifs français et la manière spécifique dont ils conjuguent aujourd’hui fidélité au judaïsme et loyauté du citoyen, tentation du repli religieux et ambitions d’intervenir dans le monde politique en tant que juifs.
Le fait que la Révolution ait été la première à accorder l’égalité des droits politiques aux juifs donnait à l’ «israélitisme» français une tonalité particulière. Ce n’est pas par hasard si un proverbe yiddisch, malgré l’affaire Dreyfus, disait : « Heureux comme Dieu en France »         (extrait de la Condition juive en France, 2009)… Les noms ne manquent pas qui ont marqué leurs époques, israélites ou juifs mais avant tout français. Vint la période de Vichy, cette période où, selon l’expression, consacrée «la France n’était plus la France », puis le retour, et, envers et contre tout, la reconnaissance envers la France qui s’était égarée. La création de l’État d’Israël, sa renaissance refit briller l’espoir.

D’israélite à juif

Avec l’arrivée des juifs séfarades, à la pratique religieuse largement répandue, contrairement aux ashkénazes, plus frileux, le mot juif s’impose et prend la place d’israélite qui semble désormais désigner des juifs pas assez juifs. Puis, il y eut le grand élan après 1967, Israël s’est emparé du cœur des juifs avec son histoire, son miracle et ses merveilles. Ce furent aussi l’époque des grandes mobilisations : les 24h pour Israël, les manifestations pour Sharansky, le cimetière de Carpentras, la Communauté s’engageait, vibrait. Puis 1995, le discours de Chirac. Il n’efface pas tout, mais apaise les cicatrices qui ne se referment jamais.

Vinrent les années de repli

Au fur et à mesure que la propagande anti israélienne gagnait du terrain, la Communauté, tout en disant que cela n’avait pas d’importance, se fit plus discrète. Les dirigeants des institutions communautaires aux « élections » contestables encouragèrent la modération, l’attentisme voire le renoncement, dans une forme d’asservissement au pouvoir politique, régulièrement dénoncée. Quelques déclarations et photos leur suffisaient à maintenir l’illusion d’une quelconque influence et de leur représentativité. Pendant ce temps, les BDS et leurs officines s’implantaient dans le paysage français, en le défigurant insensiblement par des chiffres bien connus: ceux de la hausse de l’antisémitisme. La hausse de l’antisémitisme, qui donnait lieu à de longs colloques, sans suite concrète, explose. Ilan Halimi ouvrit la trop longue liste des français tués parce que juifs. L’affaire Sarah Halimi son opacité, son silence, les délais à réagir, l’incompréhension devant l’inaction de la police puis l’incompréhension devant la décision de la justice, tout cela crée plus qu’un malaise, la défiance. Défiance également à l’égard des dirigeants communautaires occupés à choisir ou le menu ou la couleur des revêtements de sol. Les départs vers Israël s’accélèrent, plus de 100 000 personnes.

L’identité en berne

Entre l’antisémitisme, les recommandations du type «pas de kippa dans la rue » et les attaques permanentes contre le seul État juif, les juifs se recroquevillent. Sortis de l’école publique par obligation sécuritaire, les jeunes ne se retrouvent plus guère dans les mouvements de jeunesse. Plus d’amitié forte, plus de groupe prêt à s’engager, les écoles juives n’y prédisposent pas vraiment et l’enseignement concernant Israël, le pays, son histoire, ses fondateurs etc…a des marges d’amélioration. Les jeunes juifs sont absents et les tentatives de mobilisation restent bien faibles. La dernière grande manifestation pour Israël date de 2016 (photo UPJF, ci-dessus) menée par le regretté Claude Barouch qui manque cruellement, ainsi que la voix de celui qui fut un très grand ami d’Israël, Claude Goasguen.  La dernière grande mobilisation fut celle pour Sarah Halimi au Trocadéro, un vrai succès, mais avec un retard de quatre ans.

2022 :  l’année du silence ou du coma et le retour de l’israélitisme

Entre les attentats en Israël où des attaques barbares ont tué 19 personnes en un mois, l’assassinat de René Hadjaj où il fut recommandé selon la formule institutionnalisée «  d’attendre les résultats de l’enquête », le rapport indigne d’Amnesty International ou les résolutions abjectes de l’ONU, difficile d’entendre un bruit quelconque venant des institutions. Dans une newsletter venue d’Alsace, certains crient « Ils sont devenus fous » et appellent au retour de Jacques Kupfer (Z’l) ce grand sioniste, ce grand militant, ce grand mobilisateur. De temps un temps un Tweet vient témoigner que le corps n’est pas encore totalement mort. Les élections qui ont donné lieu à quelques cris sur les différents variants de l’extrême-droite, restent bien muets sur l’extrême gauche dont les dernières affiches avec slogans en arabe donnent la couleur. Les manifestations BDS se multiplient partout en France, dans des villes grandes, moyennes et même de petites villes, répandant la haine d’Israël, sans rencontrer d’opposition. Comme le disait ce sinistre dirigeant communautaire «  je souhaite éviter l’amalgame juif et sioniste ». Plus personne ne fait la différence. Mais c’est bien le lien avec Israël qui est menacé. Nombreux sont ceux qui préfèrent dissimuler un lien avec Israël pour continuer à vaquer. L’israélitisme est de retour, une variante moderne du marranisme. Là ce n’est pas seulement le judaïsme qui doit rester à la maison, mais Israël aussi. Il ne reste que des fantômes.

Evelyne Gougenheim

La rédaction de JForum, retirera d'office tout commentaire antisémite, raciste, diffamatoire ou injurieux, ou qui contrevient à la morale juive.

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Martin que font les politiques israéliens pour attirer les juifs de France ? Pour l’Ukraine ou la Russie ça fonctionne, logement travail etc…les juifs de France donc pour la plupart ne trouvent pas de quoi se loger à un bon prix , tout est très cher et doivent se débrouiller seuls , alors c’est bien beau de dire ce qu’il faut faire mais en attendant l’aide matérielle bien encadrée ne vient pas comme il se doit , c’est la double peine , le Crif se fiche complètement de ses coreligionnaires la c’est le problème !

martin

c’est une situation normale, si je puis dire;
quand comprendrez vous que dieu a ramené son peuple dans sa terre, pour lui devoiler son salut, vous devriez normalement vous précipiter, vous hater, comme a la sortie d(egypte.
pendant des siecles on disait « l’an prochain a jerusalem » et aujourd’hui que c’est possible, certains trainent des pieds et croient pouvoir renverser le courrant de haine anti juive dans les nations. cela n’arrivera pas.
dans les prophetes hachem annonce qu’il enverra les pecheurs pour israel dans les nations, et ensuite les chasseurs. alors n’attendez plus, pour que les chasseurs ne trouvent pas leurs proies.
hachem a un grand projet pour israel, qui il est vraie ne se fera pas sans douleurs tant l’oposition est forte comme nous le constatons depuis des decénies.
il est la solution a tout, abandonner toutes ces abominations telles que la gai pride et saglorification, et toutes ces mode mauvaises qui viennent de l’occident souvent des etats unis.l’ adn d’israel c’est la torah,sans torah israel ne resistera pas a ses ennemis.
shabbat shalom qu’hachem bénissent ceux qui entendent.
nous avons besoin d’israel…..