VOIR LES CARICATURES PLUS BAS

Charlie et l’Hyper Cacher de Vincennes ont été victimes d’un complot. Complot de jihadiste, évidemment. Mais cela ne convient pas à certains. Trop évident, trop banal. Ils préfèrent imaginer un complot ourdi par le gouvernement, les services secrets, et forcément Washington et Israël en arrière-plan. Personne n’a encore pensé aux Martiens, mais cela viendra. La logique conspirationniste peut sembler délirante, mais elle obéit à des codes immuables. Linguistes et sociologues nous aident à les décrypter pour mieux les combattre.


Selon un sondage réalisé par l’Ifop pour le journal
Sud Ouest, 70 % des Français jugent «cer­tain que ces attentats ont été planifiés et réalisés par des terroristes islamistes ». Large majorité, certes. Et « seulement» 2 % des sondés sont convaincus qu’il ne s’agit pas d’un attentat islamiste… Mais cela fait quand même 3o% qui en doutent à des degrés divers. C’est énorme après les attentats, il n’aura pas fallu long­temps pour voir fleurir les théories du complot. Dès le 7 janvier, Thierry Meys­san développait une brochette d’arguments, plus farfelus les uns que les autres (voir encadré), pour affirmer que «la mission de ce commando n’a pas de lien avec l’idéologie jihadiste », mais serait plutôt «le premier épisode d’un processus visant à créer une situation de guerre civile ». Quant aux responsables, suivez mon regard, vu que «la stratégie du « choc des civilisations » a été conçue à Tel-Aviv et à Washing­ton». Le même genre de discours a été relayé par Le Pen senior, pour qui l’attentat «porte la signature des services secrets ». Dans un registre qui se veut plus subtil, Tariq Ramadan — tout en se défen­dant de parler de complot — laisse entendre qu’il y a « des questions en suspens », et Alain Soral croit voir d’« étranges coïncidences» dans le déroulé des événements. Au-delà de ces clowns médiatiques, des centaines d’internautes anonymes relaient aussi ce genre de théories.

PSEUDOSCIENCES ET VRAIE RELIGION

Bien sûr, rien de nouveau là-dessous. On sait que n’importe quel événement mondial est matière à théories conspirationnistes : le tsunami de 2004 en Asie et le trem­blement de terre de 2010 à Haïti (conséquences d’expérimentations militaires américaines, selon certains), le sida et Ebola (prétendument concoc­tés par des laboratoires occidentaux), la mort de Lady Diana, bref, rien n’y échappe… N’empêche, le fonctionnement mental des conspirationnistes laisse toujours pantois.

Pourtant, à la base, le doute est, par prin­cipe, légitime. Soumettre les versions dites «officielles » à la critique citoyenne, rien de plus normal. D’autant qu’on ne peut pas exclure la possibilité de véritables complots, et que l’on a déjà vu des gouvernements sciemment mentir à leurs citoyens (voir la fable des armes de destruction massive en Irak…). Le problème, c’est qu’avec les conspirationnistes ce bon principe part vite en vrille. Ils sont nombreux, derrière leur écran d’ordinateur, à jouer au détective décortiqueur de vidéos dénicheurs d’« indices». Ils vont jusqu’à revendiquer une forme de scientificité. L’ennui, c’est qu’ils font l’impasse sur ce principe élémen­taire de l’argumentation : la charge de la preuve revient à l’accusation. Plutôt que de prouver leur théorie, ils renversent la logique en demandant à leurs détracteurs de fournir les preuves : qu’il s’agit bien là d’un attentat, que des tours peuvent effectivement s’effondrer après avoir été percu­tées par un avion, que telle catastrophe est bien naturelle, etc. À la manière des pseudosciences, le conspirationnisme se pare d’un vernis qui n’a de rationnel que l’apparence.

Un autre de ses principes, c’est le refus systé­matique de toute explication réaliste. Il faut une raison « cachée » à toute chose. Cette obsession d’une vérité forcément «ailleurs» est du même registre que la pensée ésotérique ou religieuse. Ce n’est pas un hasard si les théories conspira­tionnistes ont ce point commun avec les religions : elles peuvent rassurer, en apportant du sens à des événements apparemment inexplicables. À la limite, on peut comprendre que les victimes d’une catastrophe naturelle, tremblement de terre ou épidémie, aient besoin de trouver une logique à l’absurde. Mais, dans le cas « des attentats, l’évidence s’impose, implacable, et de surcroît revendiquée par ses auteurs. Or cela ne suffit pas aux obsédés du complot. En niant ainsi le réel, ils font le jeu des ter­roristes. Avec ces derniers, il n’y a qu’une seule stratégie : leur tenir tête, droit dans les yeux. Tout le reste — et notamment chercher à les dédouaner, comme le font les conspirationnistes — leur per­met de gagner du terrain.

Antonio Fischetti – CHARLIE HEBDO

 

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PLANÈTE CONPLOTISTE

 

 A peine quelques heures après l’attentat contre Charlie, Thierry Meyssan affirmait qu’il ne pouvait pas être le fait d’islamistes… car ceux-ci auraient détruit toutes les archives du journal. Argu­ment loufoque, qui ne pouvait naître que dans la cervelle de cet ami du Hezbollah. Dans le registre « regardez comme c’est étrange », les internautes n’ont pas manqué d’imagination : il y a eu les couleurs prétendument changeantes des rétroviseurs de la Clio (en réalité dues à des reflets lumineux…), les gilets pare-balles des journalistes réfugiés sur le toit (journalistes voisins de Charlie et habitués des terrains de guerre, qui en possédaient dans leurs locaux…), la prétendue absence de sang s’écoulant du policier à terre (absence fantasmée, et qui d’ail­leurs n’a rien d’obligatoire…), la carte d’identité perdue (qui peut s’expliquer par la précipitation, ou par le fait que les assaillants étaient dans une logique suici­daire et non de dissimulation…), et même un selfie pris par Fran­çois Hollande devant les locaux de Charlie (grossier et pitoyable montage photo…).

L’attaque de l’Hyper Cacher a aussi été analysée par les oonspirationnistes. A coups de ralentis et d’arrêts sur image sur les vidéos de surveillance du magasin, des internautes (sur le site quenelplus.com par exemple) y ont vu un certain «homme à la casquette» qui n’au­rait «pas du tout l’attitude d’un otage» et serait parti «en toute tranquillité à l’écart des autres otages», ce qui suggère que «c’est lui qui donne les ordres».

La numérologie n’a évidemment pas été oubliée. Certains ont remarqué (chaos­controle.com) que la date du 7 janvier correspond aux chiffres 1 (pour le mois) et 7 (pour le jour), ce qui fait 17… soit le numéro de la police. Par ailleurs, le 11 septembre donne 9 pour le mois, et 11 pour le jour, soit 911… ce qui correspond au numéro de la police américaine. Preuve, n’est-ce pas, que les forces de l’ordre sont derrière tout ça. D’autres ont relevé que le Charlie d’après l’attentat porte le numéro 1178… et que 1 + 1 + 7 + 8 = 17. C.Q.F.D., donc! (En revanche, personne n’a encore signalé qu’il y a aussi 7 lettres dans Charlie: bizarre, non?) Il y en a aussi qui ont trouvé que le parcours des défilés parisiens du 11 janvier, entre République et Nation, dessinait, tenez-vous bien… la carte d’Israël. Fallait y penser. Personne n’a encore osé dire que les Juifs de Charlie Hebdo étaient absents des locaux le jour de la fusillade… Pour le coup, ce serait facile à contredire, vu que, malheureusement pour eux, il y en avait parmi les victimes.   

Antonio Fischetti – CHARLIE HEBDO

 

 

 

 

 

 

 

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Armand

Mais comment feraient ils tous si Israël et les juifs n’existaient pas ?

Ils ne nous lâchent pas la jambe .