LE « GLATT » MORAL

 

De plus en plus , se répand la notion de «  viande glatt » et les juifs qui se proclament plus orthodoxes que les plus religieux, se targuent de ne manger que de la viande glatt, c’est -à-dire une viande obéissant aux critères les plus stricts de la kasheroute. Et la pression psychologique sur les fidèles devient chaque jour de plus en plus forte, à telle enseigne que les restaurants, les hôtels, les centres de vacances utilisent désormais comme argument de vente le «  glatt » pour qualifier la viande qui y sera consommée.

Essayons d’apporter quelques explications pour tenter d’y voir clair. Les juifs sont tenus à une alimentation kasher dont l’une des principales caractéristiques consiste à ne consommer que des animaux – sur une liste très précise – ayant été abattus selon des règles halakhiques parfaitement définies. Le sacrificateur rituel ( chohet ) procède  à l’abattage d’animaux ne présentant aucun défaut, sous le contrôle d’un inspecteur rituel. Mais l’opération n’est pas terminée, car il faut encore vérifier si l’animal abattu ne présente aucune maladie interne. Ce contrôle  d’une méticulosité extrême, se base sur l’examen des poumons du boeuf. L’animal est considéré comme kasher , même si l’on observe de très infimes défauts. Mais si la plèvre est trouée, l’animal n’est pas conforme. En revanche, lorsque la surface du poumon est absolument LISSE et sans le moindre défaut, l’animal est considéré dans ce cas,  comme parfait .

Lisse se dit en allemand  «  glatt » , d’où la terminologie appliquée à une viande  répondant à cette caractéristique. Cette recherche scrupuleuse ne peut nous manquer de faire un parallèle avec la période pascale, au moment où on effectue  la recherche du »  hametz «   la veille de la fête de Pessah, au cours de laquelle on effectue un contrôle très minutieux, dans les plus petits recoins de l’appartement, pour s’assurer qu’il ne subsiste aucune miette  de pain, symbole d’orgueil et de vanité. Dans le langage courant, et en particulier aux Etats-Unis, on fait souvent une relation entre l’alimentation et le psychologique. C’est ainsi, par exemple qu’on dit de quelqu’un considéré comme correct et honnête qu’il est «  kasher ». En poursuivant ce raisonnement, je  me demande pourquoi ce qualificatif de «  glatt » ne pourrait pas s’appliquer également au comportement d‘une personne. Doit être considéré comme  «  glatt moralement «  celui qui est droit, lisse, sans aucune dérive, aussi exigeant pour la nourriture que pour son propre comportement vis à vis des autres. A quoi bon proclamer qu’on ne mange que de la viande «  glatt », si on n’est pas irréprochable dans son comportement moral ! Ainsi la méticulosité dans cette recherche alimentaire devrait logiquement aller de pair avec une exigence éthique rigoureuse,  correspondant à une rectitude morale en toutes circonstances. Dès lors, il convient de souhaiter que ceux qui se prétendent «  plus kashers «  que les autres, s’attachent d’abord et avant tout, à être «glatt  moralement », c’est-à-dire à mettre leurs actes en conformité avec leurs paroles et à bannir toute tentation de se croire mieux et supérieurs aux autres. Vu sous cet angle, le «  glatt moral »  pourrait être perçu comme un équilibre parfait entre une pratique religieuse pointilleuse et une conduite irréprochable vis à vis de son prochain.

 

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Par Moise COHEN

Président d’Honneur du Consistoire de Paris

 

 

 

 

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BRAMI

Tout d’abord il faut dire que l’article est excellent. La réflexion de qualité.
On pourrait y rajouter que le CACHER GLATT peut être considéré comme une forme ou plus précisément comme un prolongement extrémiste du judaïsme traditionnel.
L’extrémisme se fonde sur un besoin sans cesse renouvelé d’aller toujours plus loin et malheureusement, d’aller dans un sens restrictif en termes de liberté et d’autonomie de la personne humaine.
Avec un peu d’audace, et des excuses à ceux qui pourraient en être offensés, il ne faut surtout pas manger CACHER GLATT car c’est une caution donnée à nos extrémistes religieux.
Il y a des produits simplement kasher, mais également autorisés. Cela suffit. Combattons les formes d’extrémisme dans notre religion, dans notre identité, et bien entendu laissons à chacune et chacun la liberté de pratiquer comme il l’entend. L’homme est libre. C’est ce qu’a indiqué très clairement le MAHARAL de Prague.