Johanna Afriat. Le bonheur à l’israélienne

C’est officiel, Israël est désormais le quatrième pays au monde où l’on vit le plus heureux. A en croire l’enquête réalisée par un bureau onusien, on y est même de plus en plus heureux: le pays est passé de la 12e place en 2021, à la neuvième en 2022 pour finalement se hisser dans le top 5.

Si ces données font toujours leur lot de dubitatifs dans l’Etat hébreu, le classement 2023 fait figure de véritable pavé dans la mare. Et pour cause. L’atmosphère du pays, alourdie depuis des décennies par la situation sécuritaire ou le coût de la vie, est aujourd’hui plombée par une fracture politique et sociale sans précédent, générée par le projet de réforme judiciaire. A tel point que l’on n’hésite plus à brandir le spectre d’une guerre civile et que de nombreux Israéliens songent pour la première fois à quitter le pays, invoquant le besoin « de respirer ». Fait révélateur, les lignes d’écoute et de soutien psychologique se disent submergées d’appels.

Des Israéliens pique-niquent sur la place Dizengoff à Tel Aviv, car tous les restaurants, cafés et bars sont toujours fermés, 20 mai 2020. Miriam Alster / Flash90

 

On peut d’abord évoquer la fierté nationale, un facteur incontournable parmi les sondés israéliens : alors que leur pays est régulièrement boycotté et vilipendé à l’international, ses habitants mettent un point d’honneur à le défendre et à le valoriser, a fortiori s’il est question d’établir une hiérarchie entre nations.

Mais il y a plus que cela. Pour le comprendre, il faut regarder du côté des pays scandinaves qui depuis des années caracolent en tête du classement des pays les plus heureux. A première vue, peu de choses rapprochent Israël de l’Islande (3e), du Danemark (2e) ou de la Finlande (1ère). Bien que l’Etat hébreu se caractérise comme ces pays scandinaves par un régime démocratique, une économie performante et un niveau de richesse élevé, il ne peut certainement pas se targuer, à l’instar de ses voisins de liste, de faibles inégalités sociales, d’un bas niveau de pauvreté, de gratuité des études, ni même de généreux congés payés : tous ces éléments qui forment un tissu socio-économique particulièrement favorable et qui jouent un rôle indéniable dans la qualité de vie.

Israël, où la notion d’Etat-providence n’existe pas, apparaît même comme une sorte de miroir inversé par rapport aux nations scandinaves : aux inégalités sociales et à la pauvreté qui se creusent, s’ajoutent des études qui coûtent cher et des semaines de travail parmi les plus longues au monde, ponctuées de rares congés payés. Sans compter le terrorisme…

Pour autant, Israël et les pays nordiques partagent des éléments culturels susceptibles d’expliquer le niveau de satisfaction de leurs citoyens, évalué, rappelons-le, à l’aide d’une échelle selon que la situation de ces derniers dans des domaines donnés correspond à leurs attentes les plus hautes. La mesure du bonheur sur laquelle repose le classement se fonde ainsi sur la perception individuelle – et donc on ne peut plus subjective – des personnes interrogées.

Outre le fait qu’on trouve au sein de toutes ces nations un très fort sentiment d’appartenance et la conviction d’être soutenu – par sa famille, sa communauté ou l’Etat -, on y décèle surtout une certaine « aptitude au bonheur ». Dans les pays scandinaves, l’état d’esprit est marqué par un héritage luthérien qui fait que leurs habitants n’ont pas d’attentes irréalistes et sont globalement satisfaits de ce qu’ils ont. Simplicité et absence d’excès sont leurs maîtres-mots. Ceci est particulièrement frappant avec la Finlande – première au classement depuis six ans – alors que tout n’y est pourtant pas rose, entre les salaires relativement bas face à un coût de la vie et des impôts élevés, les appartements exigus, sans compter les hivers longs et rigoureux marqués par une obscurité quasi-permanente.

Si les Israéliens sont loin de partager la même sobriété dans leur état d’esprit et leur mode de vie, ils savent, tout comme les Finlandais, apprécier ce qu’ils ont. Le fait d’avoir bâti un Etat après le pire, en partant de rien ou presque, leur permet d’en apprécier chaque avancée, tel l’artisan qui s’émerveille de l’ouvrage qui naît progressivement sous ses doigts. Et le fait d’être confrontés à des guerres et des attentats leur permet d’apprécier la vie, dans ce qu’elle a de plus simple et de plus précieux. Autant d’éléments combinés qui leur donnent une capacité à relativiser, ainsi qu’une force de résilience singulière.

Au total, Israéliens et Finlandais confirment cette vérité universelle que l’on oublie trop souvent : le bonheur est essentiellement une affaire de perspective, une question de point de vue. Une manière de considérer le verre à moitié plein.

Johanna Afriat www.i24news.tv

SourceTRIBUNEJUIVE.INFO

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