Aux origines de la «start-up» nation

Une saga juive qui raconte l’autre histoire d’Israël.

« Ce sont les vainqueurs qui écrivent l’histoire » : ce dicton est tout aussi vrai s’agissant de l’histoire mondiale, que de l’histoire intérieure des États. Dans le cas d’Israël, l’histoire a ainsi été le plus souvent écrite par le courant majoritaire, celui du parti travailliste d’obédience sioniste-socialiste, qui a exercé son hégémonie pendant les trente premières années de l’État (1948-1977).

C’est ainsi que l’histoire de l’épopée sioniste connue de tous relate comment des pionniers juifs, venus de Russie et de Pologne, ont défriché la terre et fondé des kibboutz, construisant en même temps la nouvelle patrie juive et le « Nouveau Juif », conforme à leur idéologie d’inspiration marxiste. Mais on ignore généralement qu’aux côtés du sionisme socialiste, il y eut aussi des sionistes révisionnistes, des sionistes religieux et aussi des sionistes… capitalistes !

Les fortunés

C’est à ce dernier pan méconnu de la préhistoire d’Israël qu’est largement consacré le dernier livre de Hamutal Bar-Yosef, paru en hébreu en 2017 et qui vient d’être traduit en anglais, sous le titre The Wealthy (Les fortunés). L’auteur, poète, traductrice et spécialiste de littérature hébraïque, a adopté la forme du roman pour relater cette histoire. Son livre est une véritable saga qui s’étend sur plusieurs générations et raconte l’histoire d’une famille juive en Allemagne, en Angleterre et en Palestine mandataire. A travers le destin de cette famille de pauvres colporteurs qui va s’élever socialement – jusqu’à atteindre les rangs de la noblesse britannique – c’est un aspect souvent ignoré de l’histoire moderne du peuple juif qui est dévoilé au lecteur.

La saga de la famille Heimstatt – inspirée d’une histoire réelle – illustre ainsi le phénomène souvent décrit dans la littérature et le cinéma de l’ascension sociale, génération après génération, dont les moteurs principaux sont l’ambition personnelle et l’aspiration à contribuer au bien de l’humanité. Meyer, fondateur de la « dynastie », est un simple marchand ambulant. Son fils Albert devient un commerçant aisé, et le petit-fils Gotthold étudie la chimie à l’université de Heidelberg. Plus tard, il s’installe en Angleterre, où se déroule la deuxième partie du roman. La découverte de plusieurs procédés industriels assure la fortune de la famille, et son fils Richard se lance dans la politique et parvient à être élu au Parlement au sein du parti libéral.

Déclaration Balfour

La troisième et dernière partie de la saga des Heimstatt commence lorsque le jeune Ralph, fils de Richard, est envoyé en Palestine mandataire (« Eretz-Israël ») pour y combattre dans les rangs de l’armée britannique, après avoir participé à la campagne désastreuse de Gallipoli, dans le cadre du bataillon juif mis sur pied par Jabotinsky et Trumpeldor. A travers le destin du dernier rejeton de la famille d’origine allemande, c’est tout un pan de l’histoire du sionisme politique qui est ainsi relaté : la participation des « bataillons juifs » – premiers soldats se battant sous un drapeau juif à l’époque moderne – dans la Première Guerre mondiale, puis la Déclaration Balfour et le mandat britannique sur la Palestine, et le développement de l’implantation et de la colonisation juive en terre d’Israël.

Le grand talent de Hamutal Bar-Yosef est précisément de parvenir à mêler la grande et la petite histoire, en évoquant des événements importants de l’histoire, sans jamais perdre le fil de l’épopée familiale. On y croise ainsi, outre les membres de la famille Heimstatt sur cinq générations, des figures illustres comme celles de Haïm Weizmann, Lloyd George ou encore Amin al-Husseini. Les commerçants et industriels qui – à l’instar de la famille Mond dont s’inspire le roman de Hamutal Bar-Yosef – ont pris part à l’aventure sioniste, ont joué un rôle crucial dans l’édification d’un pays moderne, devenu aujourd’hui une puissance économique de premier plan. Son livre se lit avec un intérêt qui ne diminue pas, au fil des quelque quatre cents pages, et on imagine facilement comment il pourrait être adapté à l’écran. Il mériterait certainement d’être traduit en français.

Source : causeur.fr

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