À l’heure où l’Europe ferme ses frontières aux réfugiés, il est bon de se rappeler cet épisode de 1939 où un bateau de plus de 900 réfugiés juifs fut prié de retourner en Europe, sous le régime nazi.

Le 13 mai 1939, le Saint-Louis, paquebot transatlantique allemand, quitte le port de Hambourg. À son bord, 937 passagers. La grande majorité d’entre eux sont des juifs allemands fuyant le Troisième Reich.

Persécutés–quelques mois auparavant avait lieu la Nuit de Cristal, pogrom où une centaine de juifs furent assassinés, ils ont réuni l’argent nécessaire pour un visa et un aller simple sur le Saint-Louis dans l’espoir de trouver refuge en Amérique.

 

Réfugiés d’Allemagne nazie embarqués sur le Saint-Louis | US Holocaust Memorial Museum

 

Mais, alors que leur paquebot appareille dans le port de la Havane, les autorités cubaines ne les autorisent pas à débarquer. Hostile envers les juifs, «le pays souffrait en plus d’une dépression économique et beaucoup de Cubains n’appréciaient pas du tout le nombre relativement grand de réfugiés […], qui étaient perçus comme des concurrents pour les rares emplois», rapporte l’Encyclopédie multimédia de la Shoah. Seuls vingt-neuf d’entre eux sont autorisés à rester sur le sol cubain.

Quotas de réfugiés

Un câble est envoyé au président Franklin D. Roosevelt, lui demandant de leur accorder l’asile. Il ne reçut jamais de réponse

 Après Cuba, le Saint-Louis tente sa chance aux États-Unis. Le bateau navigue si près des côtes de la Floride que les passagers aperçoivent les lumières de Miami. Un câble est envoyé au président Franklin D. Roosevelt, lui demandant de leur accorder l’asile. Il ne reçut jamais de réponse.

Passagers bloqués au port de La Havane | via Wikimedia Common (domaine public)

 

À l’époque, la presse américaine s’est largement fait l’écho de la situation critique des passagers du Saint-Louis. Mais l’Acte d’immigration de 1924, mis en place aux États-Unis, limitait le nombre de réfugiés pouvant être admis chaque année. À l’été 1939, le quota était déjà atteint.

Les Américains, quoique compatissants vis-à-vis des réfugiés et indignés par la politique du régime nazi, soutiennent ces restrictions à l’immigration. La crise économique de 1929 venait de passer par là, laissant des millions d’Américains au chômage, et l’arrivée d’immigrés était vue comme une menace sur les derniers emplois disponibles.

Souvenir honteux

Le Saint-Louis a dû faire demi-tour pour l’Europe, alors sous la botte nazie. Beaucoup de ses passagers furent victimes des camps, comme les membres de cette famille, tous tués à Auschwitz, rapporte le site News:

Le Saint-Louis a dû faire demi-tour pour l’Europe, alors sous la botte nazie. Beaucoup de ses passagers furent victimes des camps

 

Une famille pose sur le pont du Saint-Louis | United States Holocaust Memorial Museum

Le souvenir honteux du paquebot Saint-Louis, désormais immortalisé dans les musées de l’holocauste à travers le monde, n’est pas sans rappeler la situation critique de l’Europe.

La Méditerranée est devenue un cimetière marin, avec plus de 30.000 migrants morts depuis 2000 lors du naufrage de leur embarcation, tandis qu’à Calais les réfugiés tentent de forcer l’entrée du tunnel sous la Manche au péril de leur vie. Pendant ce temps, les pays européens hésitent sur la marche à suivre pour gérer cet afflux de migrants et de réfugiés fuyant la guerre dans leur pays.

Faut-il leur ouvrir toutes grandes les portes de l’Europe? Faut-il se protéger avec encore plus de barbelés? L’opinion oscille entre bonne volonté utopique et xénophobie voilée. Il n’existe aucune solution simple, mais conclut le site Project Syndicate, «se rappeler du sort des juifs d’Europe dans les années 1930 devrait au moins nous obliger à ne pas faire preuve d’indifférence envers le sort de ceux qui n’ont nulle part où aller».

slate.fr

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