Le Prix Antoine Bernheim est remis ce soir au Théâtre du Vieux Colombier à Paris à trois créateurs pour récompenser l’apport de la culture juive à la culture universelle. Il peut distinguer des juifs ou des non-juifs, c’est important.
Jean-Claude Grumberg, Valérie Mréjen et Simha Arom récompensés à l’Institut des Lettres et Manuscrits à Paris. Chacun reçoit 5000 euros et un trophée créé par l’artiste Nora Herman © Erez Lichtfeld

Cette année, les trois lauréats étaient rassemblés tout à l’heure à 13 heures autour d’un cocktail dans le magnifique décor de l’Institut des Lettres et Manuscrits, au 12 rue Montalembert :

– la jeune plasticienne Valérie Mréjen, à la fois vidéaste, metteur en scène et romancière.

– Et deux « seniors », le dramaturge, scénariste et écrivain Jean-Claude Grumberg, 75 ans, et l’ethno-musicologue Simha Arom, 84 ans, spécialisé dans les musiques africaines au CNRS.

Paule-Henriette-Lévy

Les très sympathiques Paule-Henriette Lévy, journaliste et directrice de l’action culturelle du Fonds social Juif Unifié, et Patrick Chasquès, Directeur de la Fondation du Judaïsme français (qui chapeaute la Fondation du Prix Bernheim) © Catherine Schwaab

J’ai discuté un petit moment avec chacun d’eux, et j’avoue avoir été bluffée par la vitalité des deux papys, incroyablement verts ! Ils ont l’un et l’autre la déportation des juifs inscrite dans leur chair : Grumberg y a perdu son père et ses grands-parents. Arom en a réchappé avec son frère et y a perdu ses parents. Ils sont l’un et l’autre autodidactes : Grumberg était à l’origine tailleur. Et Arom a appris les musiques africaines sur le terrain, à Bangui, dans les années 1960.

Grumberg a publié fin 2013 « Pour en finir avec la question juive » où, sous forme de dialogues absurdes et drôles, il pointe pas mal de lieux-communs sur les juifs. Il sort aussi un livre pour enfants, « Les Vitalabri ». Une de ses pièces se joue ces temps-ci à 18 h 30 au Théâtre du Lucernaire, « Maman revient pauvre orphelin ». Facétieux : « Mon métier, maintenant ? C’est boire du thé dans les cafés ! » ironise-t-il. En clair : il observe ses concitoyens du 6ème arrondissement, de préférence au café Le Tournon (où l’on mange aussi très bien).


Des vues de cet Institut des Lettres et Manuscrits, superbe hôtel particulier rue Montalembert. © Catherine Schwaab

Simha Arom, lui, est corniste (joue du cor) quand il est envoyé (en 1963) par le gouvernement israélien en coopération en République centrafricaine pour y créer… une fanfare ! « Il y en avait déjà deux, ça suffisait. Alors je me suis plongé dans leurs chants et leurs musiques inimaginables. » Elles n’étaient transmises qu’oralement ; donc il a recensé, formalisé, classifié, et dans la foulée, a promu ces musiques sur les scènes internationales. Il raconte tout cela dans « La fanfare de Bangui ». Simha Arom a reçu moult distinctions et reste étonnamment modeste et plein d’humour.

Enfin, Valérie Mréjen est une modeste, elle aussi, alors qu’elle pourrait se pousser du col pour avoir réussi à percer dans ce monde de l’art contemporain passablement macho.


Valérie Mréjen. Erez Lichtfeld

Sa spécialité : les vidéos hilarantes qui parlent de nous. Tantôt elle filme et tend son micro aux gosses, irrésistibles, tantôt elle pointe nos tics de langage, nos doutes comiques, notre romantisme un peu nunuche et nos obsessions. C’est très drôle. Elle écrit des livres, le dernier, « Forêt noire », moins drôle, décrit « les fantômes qui gouvernent nos mémoires », en clair, sur la mort qui nous surprend, nous cloue, nous décale… Elle met aussi en scène un spectacle pour enfants (elle a une petite fille de 2 ans), « Trois hommes verts », avec deux acteurs et une actrice, de la musique, des vidéos. Il se joue au CDN d’Orléans mardi 13, vendredi 16 et samedi 17, puis en juillet à Paris, à la Fondation Cartier. Cette artiste qui figure au Centre Pompidou et dans les collections LVMH, n’a pas curieusement d’agent ! Comme beaucoup d’artistes français qui, s’ils en avaient un, atteindraient les niveaux de notoriété des Américains, c’est rageant. Ce métier est à inventer et à imposer en France, pour les artistes comme pour les écrivains qui pourraient s’exporter et se vendre aussi bien que les anglo-saxons !

Catherine Schwaab.

Le 12 mai 2014 | Mise à jour le 12 mai 2014.

parismatch.com Article original

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