Après « Borat » et « Brüno », Sacha Baron Cohen se réincarne en tyran oriental à amazones.

Toute ressemblance…Avant de faire le clown antisémite, raciste, misogyne et homophobe, Sacha Baron Cohen étudiait l’histoire à Cambridge où il écrivait de graves dissertations sur des thèmes comme « le rôle des juifs dans le mouvement américain des droits civiques », poussant la vertu universitaire jusqu’à se recueillir devant la tombe de Martin Luther King, à Atlanta.

Dans « The Dictator », comédie dédiée à la mémoire de Kim Jong-il, Cohen incarne l’insane dictateur Aladeen et ses sosies.

Il règne sur les champs pétrolifères et les infrastructures nucléaires de l’Etat de Wadiya, un immémorial pays d’Afrique du Nord, qui existe « depuis que les sionistes ont exterminé les dinosaures ».

Autocrate, Aladeen organise ses propres jeux Olympiques : il revolvérise ses concurrents tout en courant le 100-mètres. Mégalomane mais minimaliste, il a remplacé une bonne partie du vocabulaire national par son propre prénom.

Pour dire négatif ou positif, on dit « aladeen » : ce qui complique la tâche du médecin quand il doit annoncer au patient le résultat de son test HIV.

Malheureusement, ce sont peut-être là les deux meilleurs gags du film, et ils éclatent dans les premières minutes.

« The Dictator » rompt, c’est dommage, avec le protocole esthétique qui a rendu célèbre Sacha Baron Cohen, génial idiot de profession et intrépide humaniste trash.

« The Dictator » n’est pas un documentaire, c’est une fiction empâtée d’une méchante intrigue sentimentale (le tyran bonifié par l’amour d’une épicière bio aux dehors de « Hobbit lesbien »).

Jusqu’ici, Cohen, activiste du canular, excellait à confronter son personnage, non à des comédiens, mais à des personnes réelles, à la manière des Yes Men.

Sous les moustaches de Borat, reporter kazakh né du viol de sa mère à 9 ans, il démontrait à des doyennes du féminisme américain que le cerveau de la femme est plus petit que celui de l’homme.

Sous le costume de Brüno, journaliste de mode gay et autrichien, il recevait quelques minéraux lancés par des juifs hassidiques de Jérusalem, marris de le voir exhiber une version microshort de leur redingote réglementaire.

On le voyait demander ingénument à un de ces « convertisseurs de gays » de l’Amérique fondamentaliste s’il devait renoncer à jouer de la clarinette pour devenir hétérosexuel.

Parent isolé, il comparaissait dans un talk-show, devant un parterre d’Américains noirs, avec son bébé subsaharien qu’il venait d’acheter, prétendait-il, en échange d’un iPod, et auquel il avait donné un « prénom traditionnel africain » : O. J.

Dans « The Dictator », Cohen reste un formidable comédien.

On le savait depuis « Ricky Bobby, roi du circuit », où il incarnait Jean Girard, pilote de rallye français sponsorisé par Perrier, amateur de jazz germanopratin esseulé au milieu des rednecks d’Alabama, qui, dans un plan inoubliable, conduisait d’une main sa voiture sur un circuit de stock-car, tout en lisant
« l’Etranger » de Camus.

Dans « The Dictator », le véritable opprimé, c’est peut-être l’art de Cohen.

Son cinéma avait quelque chose de tauromachique, avec la réalité documentaire dans le rôle de la corne.

Ici, rien de réel.

Cette irréalité vient contaminer l’intrigue même.

Symboliquement, on découvre assez vite que le despote sanguinaire n’en est pas un : tous les sujets qu’il fait égorger sont épargnés par son bienveillant bourreau.

Loin, donc, très loin de Chaplin.

Et si ce Cohen-là n’était qu’un sosie ? ■

Fabrice Pliskin/ Nouvel Obs
Article original

© 2012 Paramount Pictures.

Tags : Sacha Baron Cohen Ali G Bruno Borat The Dictator Humour

Chaplin Agit Prop Yes Men Cinema Aladeen

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