L’ancien patron du renseignement intérieur de Toulouse a passé plus de 5 heures à la barre, hier. L’occasion de solides mises au point, de convictions, de vrais regrets et même d’émotion, pour le commissaire Christian Ballé-Andui.

«Le clan salafiste toulousain», le commissaire Christian Ballé-Andui maîtrise. 90 minutes sans notes, précis. «Très intéressante conférence sur le salafisme», sourit Me Dupond-Moretti, habile aussi dans la mauvaise foi.

Cela a plongé la cour au cœur du «terreau, de la matrice» du jihadisme toulousain. Dans ce clan où s’est «construit idéologiquement» Mohammed Merah et où ses leaders ont forgé une culture salafiste jihadiste «qui les a conduits au plus haut niveau de l’Etat islamique», rappelle le témoin.

Les frères Clain, Sabri Essid, Thomas Barnouin… «Nous les avons vus grandir à Toulouse autour d’Olivier Corel au début des années 2000», prévient le commissaire, en retraite depuis 2013. Ses surveillances détectent Abdelkader Merah à partir de 2006. «Proche de Sabri Essid, sans doute une des personnalités du clan la plus violente, la plus dangereuse. Il se chargeait de recruter aux Izards», se souvient l’ancien patron du Service régional du renseignement intérieur. Bientôt Mohammed Merah «apparaît sur les radars».

Cette «recrue», très vite, inquiète les hommes du Renseignement. «Son profil d’ancien délinquant n’est pas nouveau. Son comportement, sa paranoïa, ses codes de sécurité pour déjouer les surveillances en revanche sont plus surprenantes», confie le témoin. «Notre expérience des milieux terroristes nous a très vite alertés parce que nous connaissions déjà le clan qu’il fréquentait. Ses voyages au Moyen-Orient, son arrestation en Afghanistan en 2010, pas du tourisme, appuient notre inquiétude.»

Les surveillances se sont alors accentuées en 2011. «Compliquées, très compliquées», affirme l’ancien chef du Renseignement.

«J’ai fait deux demandes de judiciarisation en juin 2011. Je n’ai jamais eu de réponse», regrette Christian Ballé-Andui. Le terroriste est lancé, rien ne l’arrêtera.

Après son séjour au Pakistan où le renseignement toulousain le repère depuis Toulouse (sa fiche S n’a pas sonné) et une rencontre à son retour le 14 novembre 2011, des «spécialistes parisiens» suggèrent mi-février 2012 «d’en faire une source». À Toulouse, on s’étrangle.

«C’est notre métier de recruter des sources. Elles apportent des informations fiables mais pas comme ça, pas sans un travail sérieux», s’emporte l’ancien patron. Poussé par la présidente, Christian Ballé-Andui lâche : «Lorsque je lis dans ce rapport qu’il n’a aucun contact avec un réseau terroriste, avec mon équipe, on se demande s’ils ont lu le dossier ! Ses contacts, on les constate depuis 2006 ! Et notre demande de judiciarisation ? Non seulement ils ne le considèrent pas dangereux mais ils se demandent s’il ne pourrait pas être recruté ! Pardonnez-moi mais…»

Un même silence, et même une voix soudain affectée, traduit son désarroi sur l’après-Montauban, et avant la tuerie de l’école juive (lire l’encadré). Quant à la question essentielle de la complicité d’Abdelkader Merah, Christain Ballé-Andui ne se défausse pas : «Les passages à l’acte de Mohammed Merah n’ont rien d’une lubie. Il existait chez lui un sentiment fort de vengeance mais aussi de reconnaissance. La question, c’est qui met le détonateur dans sa tête ? Les théoriciens installent ce détonateur idéologique. J’ai la conviction que tout le clan jihadiste toulousain connaissait la nature du projet. Pas les cibles précises mais les passages à l’acte. Après qui actionne ? Jean-Michel Clain ? Sabri Essid ? Abdelkader Merah ? Tous les trois ? Je n’ai pas la réponse.»

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Autopsie d’un échec
Christian Ballé-Andui parle de «fautes» dans la gestion post-attentat de Montauban. «Quand on m’a raconté la froideur mécanique des assassinats, j’ai tout de suite pensé à un crime religieux et à la mouvance salafiste». Il alerte Paris, veut participer à une réunion des enquêteurs de la PJ mais reste à la porte. «Quand mon chef opérationnel a vu les vidéos de Montauban et de l’école juive le lundi soir, il a identifié Mohammed Merah. L’adresse IP de la mère Merah est identifiée le dimanche en fin de journée mais je n’ai pas été prévenu…»

Relancé sur le sujet par Me Masliat, avocate de certaines victimes de l’école, Christian Ballé- Andui se bloque, la voix cassée. «Mon cœur, mon âme comme ceux des gens de mon service n’oublieront jamais ces enfants. C’est le coût de notre métier. Quand on va à la guerre, il faut être très rapide, l’information doit circuler. Il faut éclairer la police judiciaire, éclairer le magistrat parce que la crainte, c’est qu’il recommence. Notre organisation de l’époque n’a pas permis ces échanges. Ils croyaient à la piste de l’extrême droite. À Toulouse, elle n’a jamais été violente au contraire des salafistes jihadistes, mais ils ont cru que nous forcions le trait…»

Jean Cohadon

Source : www.ladepeche.fr

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Élie de Paris

Ce constat terrifiant et dedaigné par des incompétents nepotisés (commandés / intentionnels ?) montre pourquoi la France sombre si profondément dans ce suicide national, et pourquoi il n’a même pas été osé de réprimer la casse et le pillage des commerces de Paris et grandes villes de France, mises à sac par la « jeune » banlieue, désormais sous les manettes des auto-iman proclamés, des mouvements islamistes salafistes, formés et recrutés dans les…prisons!
On a même évoqué, aberration si loin des réalités sociologiques, de programmes de  » dé-radicalisation »! C’est dire à quel points l’incompétence aveuglée n’a absolument pas pris, jusqu’à cette seconde, l’ampleur du phénomène, hors de contrôle à ce jour.
À la prochaine gueguerre d’Ysraël contre ses exterminateurs déclarés_ceux avec qui la France, l’Allemagne et l’Angleterre tiennent tant à commercer et armer_ le million de Juifs répartis dans cette Europe suicidaire ne pourra certes pas être protégé. Quoique disent en coeur les 3 dirigeants de cette trinité sans enfants…