CHaVouoT: « Là où tu iras, j’irai..  » (Ruth) « là où tu iras, j’irai ; là où tu demeureras, je demeurerai.. »

Pourquoi lisons-nous le Livre de Ruth à Chavouot ? – l’histoire d’une femme moabite qui s’est convertie au judaïsme et a fini par épouser Boaz, juge d’Israël – à Chavouot, fête où nous célébrons le Don de la Torah au Mont Sinaï ?

Pourquoi lit-on le Livre de Ruth à Chavouot? Vidéo

Chavouot 2022
De la soirée du samedi 4 mai
À la soirée du lundi 6 mai

 

D’après Les Commentateurs, Ruth représente un modèle d’acceptation de la Tora. Sans elle l’Histoire juive n’aurait pas de continuité.

A première vue, cette approche semble très directe: Chavouoth commémore l’acceptation de la Torah par le peuple juif, et le Livre de Ruth décrit l’acceptation de la Torah par un individu isolé au moyen de la conversion.

Dans la mesure où nous étions tous des convertis au Mont Sinaï, l’expérience de Ruth vient nous rappeler que nous sommes juifs uniquement grâce à notre acceptation de la Torah. Le judaïsme n’est pas une caractéristique raciale et n’est automatique pour personne ; il se fonde à la base sur la conversion et l’acceptation de la Torah, même pour les enfants d’Abraham.

Ruth n’était pas une convertie ordinaire. Son nom nous apporte une indication sur sa véritable essence. En hébreu, le nom  » Ruth  » est composé des lettres resh, vav, tav,qui s’additionnent et donnent en valeur numérique le nombre 606.

Tous les êtres humains ont l’obligation de respecter les 7 Lois Noahides – ainsi nommées parce qu’elles furent données après le déluge – de même que Ruth l’avait dès sa naissance, en tant que moabite. Si vous ajoutez ces 7 commandements à la valeur de son nom, vous obtiendrez 613, le nombre de Commandements de la Torah. L’essence de Ruth, son énergie vitale, fut cette découverte et cette acceptation des 606 commandements qui lui manquaient.

Alors que cette approche semble très évidente de prime abord, après un examen plus approfondi, nous découvrons qu’elle présente en fait une difficulté majeure. Chaque personne qui lit l’histoire de Ruth est immédiatement frappée par la force de son dévouement pour sa belle-mère, Naomi.

Ce célèbre passage duquel le Talmud déduit de nombreuses lois de conversion (Yevamot 47b), exprime le refus obstiné de Ruth de se séparer de Naomi, dans les termes les plus forts. Mais Ruth dit : ‘N’insiste pas auprès de moi pour que je te quitte et que je m’en retourne sans te suivre, car là où tu iras, j’irai ; là où tu demeureras, je demeurerai ; ton peuple sera mon peuple et ton D.ieu sera mon D.ieu. Là où tu mourras, je veux mourir aussi et y être enterrée, que l’Eternel m’en fasse autant et plus, si toute autre chose que la mort me séparait de toi.’

Un tel amour et un tel souci pour le devenir d’une autre personne sont des qualités exceptionnelles mais qui ne sont aucunement liées à la foi en D.ieu et en Sa Torah. Celle qui est considérée comme le modèle parfait sur lequel nous devons calquer notre propre acceptation de la Torah, a commencé à s’attacher avec compassion, à une veuve, Naomi, pour accéder à la connaissance de H. qui percevant sa sincérité lui ouvrira les portes de sa conversion et de son adoption au sein du peuple Hébreu.

Qui a écrit le Livre de Ruth ? On ne mentionne pas le nom de son auteur de façon spécifique. D’après la tradition, Le Livre de Ruth aurait été écrit par le prophète Samuel.
La date exacte de rédaction est incertaine. Cependant, l’opinion la plus répandue est qu’il aurait été écrit entre -1011 et -931 avant le début de l’ère courante.

Synthèse d’un texte de Lamed. fr

A.Benchimol

 

Booz endormi, Victor Hugo

A l’approche de la fête de Shavouot durant laquelle on lit le Livre de Ruth, מגילת רות, j’ai eu envie de partager avec vous, ce magnifique poème de Victor Hugo tiré de « La légende des siècles » 

Booz s’était couché, de fatigue accablé ;
Il avait tout le jour travaillé dans son aire,
Puis avait fait son lit à sa place ordinaire ;
Booz dormait auprès des boisseaux pleins de blé.

Ce vieillard possédait des champs de blé et d’orge ;
Il était, quoique riche, à la justice enclin ;
Il n’avait pas de fange en l’eau de son moulin ;
Il n’avait pas d’enfer dans le feu de sa forge.

Sa barbe était d’argent comme un ruisseau d’avril,
Sa gerbe n’était point avare ni haineuse ;
Quand il voyait passer quelque pauvre glaneuse :
«Laissez tomber exprès des épis,» disait-il.

Cet homme marchait pur loin des sentiers obliques,
Vêtu de probité candide et de lin blanc ;
Et, toujours du côté des pauvres ruisselant,
Ses sacs de grains semblaient des fontaines publiques.

Booz était bon maître et fidèle parent ;
Il était généreux, quoiqu’il fût économe ;
Les femmes regardaient Booz plus qu’un jeune homme,
Car le jeune homme est beau, mais le vieillard est grand.

Le vieillard, qui revient vers la source première,
Entre aux jours éternels et sort des jours changeants ;
Et l’on voit de la flamme aux yeux des jeunes gens,
Mais dans l’oeil du vieillard on voit de la lumière.

***

Donc, Booz dans la nuit dormait parmi les siens ;
Près des meules, qu’on eût prises pour des décombres,
Les moissonneurs couchés faisaient des groupes sombres ;
Et ceci se passait dans des temps très anciens.

Les tribus d’Israël avaient pour chef un juge ;
La terre, où l’homme errait sous la tente, inquiet
Des empreintes de pieds de géants qu’il voyait,
Etait encor mouillée et molle du déluge.

***

Comme dormait Jacob, comme dormait Judith,
Booz, les yeux fermés, gisait sous la feuillée ;
Or, la porte du ciel s’étant entre-bâillée
Au-dessus de sa tête, un songe en descendit.

Et ce songe était tel, que Booz vit un chêne
Qui, sorti de son ventre, allait jusqu’au ciel bleu ;
Une race y montait comme une longue chaîne ;
Un roi chantait en bas, en haut mourait un Dieu.

Et Booz murmurait avec la voix de l’âme :
«Comment se pourrait-il que de moi ceci vînt ?
Le chiffre de mes ans a passé quatre-vingts,
Et je n’ai pas de fils, et je n’ai plus de femme.

«Voilà longtemps que celle avec qui j’ai dormi,
O Seigneur ! a quitté ma couche pour la vôtre ;
Et nous sommes encor tout mêlés l’un à l’autre,
Elle à demi vivante et moi mort à demi.

«Une race naîtrait de moi ! Comment le croire ?
Comment se pourrait-il que j’eusse des enfants ?
Quand on est jeune, on a des matins triomphants,
Le jour sort de la nuit comme d’une victoire ;

«Mais, vieux, on tremble ainsi qu’à l’hiver le bouleau ;
Je suis veuf, je suis seul, et sur moi le soir tombe,
Et je courbe, ô mon Dieu ! mon âme vers la tombe,
Comme un boeuf ayant soif penche son front vers l’eau.»

Ainsi parlait Booz dans le rêve et l’extase,
Tournant vers Dieu ses yeux par le sommeil noyés ;
Le cèdre ne sent pas une rose à sa base,
Et lui ne sentait pas une femme à ses pieds.

***

Pendant qu’il sommeillait, Ruth, une Moabite,
S’était couchée aux pieds de Booz, le sein nu,
Espérant on ne sait quel rayon inconnu,
Quand viendrait du réveil la lumière subite.

Booz ne savait point qu’une femme était là,
Et Ruth ne savait pas ce que Dieu voulait d’elle.
Un frais parfum sortait des touffes d’asphodèle ;
Les souffles de la nuit flottaient sur Galgala.

L’ombre était nuptiale, auguste et solennelle ;
Les anges y volaient sans doute obscurément,
Car on voyait passer dans la nuit, par moment,
Quelque chose de bleu qui paraissait une aile.

La respiration de Booz qui dormait
Se mêlait au bruit sourd des ruisseaux sur la mousse.
On était dans le mois où la nature est douce,
Les collines ayant des lis sur leur sommet.

Ruth songeait et Booz dormait ; l’herbe était noire,
Les grelots des troupeaux palpitaient vaguement ;
Une imense bonté tombait du firmament ;
C’était l’heure tranquille où les lions vont boire.

Tout reposait dans Ur et dans Jérimadeth ;
Les astres émaillaient le ciel profond et sombre ;
Le croissant fin et clair parmi ces fleurs de l’ombre
Brillait à l’occident, et Ruth se demandait,

Immobile, ouvrant l’oeil à moitié sous les voiles,
Quel dieu, quel moissonneur de l’éternel été,
Avait, en s’en allant, négligemment jeté,
Cette faucille d’or dans le champ des étoiles.

L’Été ou Ruth et Booz (1660-1664) de Nicolas Poussin

 

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