Du fond de ma détresse, j’ai invoqué D-ieu. Par Rav Adin Even Israël (Steinsaltz)

Le Rav Adin Even-Israël (Steinsaltz) s’est adressé à ses élèves à plusieurs reprises dans des moments de détresse, notamment lors d’événements tragiques, comme le décès d’un de ses élèves et l’assassinat de trois jeunes élèves de sa Yéchiva Mekor ‘Haïm enlevés par des terroristes palestiniens.

Nous publions ici des extraits de ses interventions en trois parties avec l’espoir que le lecteur y trouvera inspiration en cette période difficile d’épidémie mondiale que traverse Israël et le monde entier.

Traduit et adapté de l’hébreu par Michel Allouche, Jérusalem

Première partie

Le bras de l’Éternel est-il trop court ? 

L’on raconte qu’une personne se rendit un jour chez le Magguid de Mézeritch pour lui demander sa bénédiction afin qu’il guérisse de sa maladie au plus tôt. Le Magguid, en guise de réponse, lui conseilla d’aller consulter un grand professeur à Anipoli.

Or Anipoli était une toute petite ville et lorsque cette personne y arriva pour rencontrer le professeur, tous les habitants se moquèrent de lui : « Nous n’avons même pas un seul médecin ici, a fortiori ne pourras-tu trouver aucun professeur ! ».

De retour chez le Magguid, notre malade, désemparé, lui conta sa déception. Et le Rabbi de l’interroger : « Que font donc les gens qui tombent malades à Anipoli, alors qu’aucun médecin n’est là pour les soigner ? Tout simplement, ils se tournent vers D-ieu et placent leur confiance en Lui ! ».

Certes, dès lors que des moyens naturels sont à notre disposition, nous avons l’obligation de les utiliser, mais lorsqu’il n’existe plus aucun recours, nous devons prier pour une intervention d’En-Haut.

En vérité, prier ne ressemble en rien à se rendre chez un docteur, fût-il un grand professeur…d’Anipoli : chaque prière n’est autre qu’une demande à D-ieu de procéder à un miracle. Et peu importe la raison pour laquelle on se tourne vers D-ieu. S’il s’agit de notre propre subsistance, nous devons bien sûr entreprendre nos meilleurs efforts et travailler dur, mais, in fine, prier pour notre gagne-pain signifie aussi attendre un miracle divin. Il en va de même pour notre réussite dans l’étude, comme l’atteste l’un des passages de la prière quotidienne de la Amida : « Accorde-nous sagesse, compréhension et connaissance issues de Toi » ; et cela est aussi vrai lorsqu’on prie pour la tombée de la pluie.

Guérir d’un rhume constitue un petit miracle alors que la naissance d’un enfant revêt, elle, un grand miracle, un miracle qui demeure la plupart du temps voilé, tant nous y sommes habitués.

Dans tous les cas, et même s’il n’est pas donné à chacun de vivre des miracles dévoilés, notre devoir est de rappeler à D-ieu sa promesse à Moïse (Nombres XI, 23) : « Le bras de l’Éternel est-il trop court ? ».

Un certain docteur juif portant le nom de Barnhard, devint Baal téchouva et l’un des disciples du Voyant de Lublin. Sa téchouva était entière, sans compromis. Il imagina que, dès lors, il pourrait passer son temps à étudier la Torah et laisser de côté sa profession de médecin. Mais son maître l’enjoignit de ne pas abandonner.

Médecin réputé pour ses succès, il se rendait souvent chez les seigneurs non-juifs de la région qui, pourtant, le considéraient comme un peu fou, le voyant arriver avec sa barbe et ses papillotes. Ainsi, il lui arriva un jour de signifier à l’un de ses patients qu’avant de prononcer son diagnostic et de lui proposer un traitement, il devrait d’abord consulter « un petit livre de médecine ».

Et de se retirer pour étudier le livre du Zohar… Au crépuscule de sa vie, les gens le considéraient comme un demi Rabbi et lui apportaient des demandes de bénédictions, bénédictions qu’il écrivait sur l’ordonnance à leur intention. On lui attribue un commentaire édifiant à propos de l’un des passages de la prière du matin, avant Chéma Israël : tout d’abord se tourner vers Boré réfouot, « Celui qui forge les guérisons », puis vers Nora téhillot, « Celui qui est redoutable, car Il transcende toutes les louanges » – il faut alors néanmoins réciter des Psaumes de David – et si, malgré tout, aucun résultat n’est obtenu, il faut alors s’en remettre au Adon haniflaot, le Maitre des merveilles.

Si miracles et merveilles se produisent au plus tôt, à nous de nous en réjouir. Cependant, que notre prière soit exaucée ou non, il est toujours possible de continuer à prier pour la guérison complète.

Autre anecdote. Un ‘hassid se rendit chez le premier Rabbi de Belz pour lui confier l’état misérable dans lequel il se trouvait : bien qu’il fût un jour très riche, ses affaires étaient complètement tombées en totale faillite ; trop c’était trop, il ne parviendrait même pas à marier sa fille. Lorsque le Rabbi lui accorda sa bénédiction pour qu’il puisse désormais largement gagner sa vie, il osa lui demander conseil. L’État venait de lancer deux appels d’offre, l’un exigeant un investissement d’un million et demi de roubles, le deuxième trois millions.

Et le ‘hassid ajouta : « Sachant que le Rabbi ne m’a pas béni de devenir un mendiant empli de succès mais bien de faire des affaires fructueuses, je souhaite que la bénédiction du Rabbi se réalise le plus abondamment possible ! Le Rabbi sourit et lui conseilla de choisir le deuxième appel d’offres…

S’il faut être prêt à ce que notre prière ne soit pas exaucée et que le décret divin soit sans appel, il ne nous appartient pas pourtant de fixer les choses.

Sachons nous souvenir de l’interrogation en forme d’affirmation : « Le bras de l’Éternel est-il trop court ? »

Rav Adin Even Israël (Steinsaltz)

Photo : Dana Bar Siman Tov

La rédaction de JForum, retirera d'office tout commentaire antisémite, raciste, diffamatoire ou injurieux, ou qui contrevient à la morale juive.

S’abonner
Notification pour
guest

Ce site utilise Akismet pour réduire les indésirables. En savoir plus sur comment les données de vos commentaires sont utilisées.

0 Commentaires
Commentaires en ligne
Afficher tous les commentaires