Lorsqu’on parle, en Israël, de quelqu’un qui n’est pas tout-à-fait irréprochable, on dit qu’il n’est pas « Talith shékoula tekheleth » un talith entièrement de couleur azur.

L’origine de cet adage dans le midrash. En effet, à la fin de la parashat shelah lekha, figure la mitsva des tsitsioth qui doivent se trouver nouées aux quatre coins de chaque vêtement. Et, la mitsva est de mêler aux trois fils à nouer un fil d’azur : le quatrième fil.

Tout de suite après, Korah, empreint de jalousie envers ses cousins Moïse et Aharon, et désireux d’avoir un poste honorifique au sein du peuple, apparaît en contestant tout et rien, il apparaît en tournant les mitsvoth en ridicule et en amoindrissant aux yeux du peuple le rôle de Moïse et d’Aharon en les traitant pratiquement d’imposteurs !

Korah s’étonne : « quoi, un talith qui serait tout bleu devrait aussi avoir un fil d’azur à ses quatre coins ? » sous entendant en quelque sorte que Moïse ne comprend goutte aux mitsvoth qu’il a ordonnées.

Tout dans cette sidra va nous emmener vers des sentiments de jalousie, de colère, d’ambition injustifiée, qui vont atteindre des sommets desquels il est difficile de revenir.

Le premier mot de la péricope est « vayikah » qui signifie « il a pris ». Le verbe prendre en hébreu est : lakahat לקחת dont la racine trilittère est LKH ou לקח. De cette racine, nous allons extraire d’autres mots tels que HLK חלק (les mêmes lettres de לקח mais posées dans un autre ordre et ce mot helek (חלק) signifie partie ou part et un autre mot est dérivé de cette même racine : מחלוקת divergence (de vue) ou controverse.

Le deuxième mot est Korah קרח et les lettres qui forment ce nom vont nous emmener très loin ……. En effet, loin se dit « rahok » רחק mais aussi חקר rechercher, enquêter, fouiller.

Que va-t-on pouvoir comprendre en ce cas grâce à la méthode d’inversion des lettres ?

C’est que Korah, de la tribu de Lévy et cousin germain d’Aharon, Myriam et Moïse s’est mis à part mû par sa jalousie, et a voulu contester la décision divine de confier à Aharon et à ses fils tout ce qui concerne la prêtrise avec les sacrifices et le culte et la prophétie à Myriam et à Moïse, il l’exprime clairement par ces mots : « rav lakhem » רב לכם c’en est trop pour vous ! (Pourquoi avez-vous toutes ces responsabilités sur nous ) et il continue dans sa harangue : כי כל-העדה כולם קדושים car toute cette communauté est composée de gens saints ; autrement dit : vous n’êtes pas les seuls à être dignes : nous sommes ici 250 personnes et nous sommes tous saints ; autrement dit : vous n’êtes pas les seuls à être dignes : nous sommes ici 250 personnes et nous sommes tous saints.

La revendication n’est pas des moindres car, Korah pousse la méchanceté jusqu’à colporter des bruits sur Tsipora la digne épouse de Moïse, et sous-entend qu’Aharon serait soudoyé et ne pourrait exercer ses fonctions correctement. Le texte de la Torah montre que Moïse formule une prière pour qu’HaShem ne reçoive pas les offrandes d’encens de ces hommes.

Le Midrash ainsi que le Sforno et le rav Haïm Benattar expliquent que la demande de Moïse de ne pas agréer les offrandes de ces fauteurs de trouble est légitime de plus, de par son esprit prophétique, Moïse sut que la punition de ces impies aurait lieu par le fait que la terre s’entrouvrirait pour les engloutir !

C’est à la suite d’autres récriminations que D. a ordonné à Moïse de placer une branche d’amandier sans feuille ni fleur ni fruit par tribu dans la Tente d’Assignation. L’Eternel demanda à Moïse d’inscrire le nom de chacun sur son propre bâton en signalant que le bâton de celui qui sera choisi pour la fonction sacerdotale fleurirait.

Le lendemain, lorsque Moïse pénétra dans la Tente d’Assignation, seul le bâton d’Aharon avait fleuri : il présentait des fleurs, des feuilles et même des amandes et Rashi explique que l’amandier étant l’arbre le plus rapide à fleurir et à présenter ses fruits il rassemble donc les qualités de disponibilité, de serviabilité et de célérité que doivent avoir les Cohanim et les Léviim pour le service divin.

Qui, en dehors de Korah, composait ce groupe qui est venu chercher dispute à Moïse et à Aharon ? Datan et Aviram qui s’étaient déjà tristement distingués auparavant et dont le principal intérêt était de semer la discorde mais, se trouvait aussi Onn fils de Pelet.

Or, l’ambition de Korah était d’obtenir une fonction honorifique telle que la Prêtrise, tout simplement en mettant en balance les liens familiaux qui relient Korah à Moïse et Aharon.

Cette parenté sert encore de base à la controverse soulevée par Datan et Aviram qui descendent de Réouven ainsi qu’Onn ben Pélet en mettant l’accent sur le fait que Réouven était l’aîné des frères et qu’en conséquence la Prêtrise devrait plutôt revenir à la tribu de Réouven (en vertu du droit d’aînesse)….

Mais,….. l’épouse d’Onn dotée d’un esprit brillant et dirons-nous aujourd’hui « pacifiste » fit valoir son raisonnement en disant à son mari : pourquoi te joins-tu à cette controverse ? Qu’as-tu à y gagner ? Si ce sont Moïse et Aharon qui continuent à nous diriger tu ne seras qu’un disciple ! Si Korah l’emporte : tu ne seras qu’un disciple, si ce sont Datan et Aviram tu resteras disciple alors…. Comme on dirait en hébreu actuel : למה לך ? אז, (az, lama lekha) ou : qu’as-tu à gagner ?

Avant que ne se présente l’heure de l’examen, cette femme donna à son mari du vin à boire tant et tant qu’il s’endormit.

Voyant ceci, elle le recouvrit et quant à elle, voici le stratagème qu’elle employa : elle s’assit devant l’ouverture de la tente et découvrit ses cheveux de telle sorte que son apparition découragea les plus téméraires à vouloir entraîner Onn avec eux dans leur chute n’osèrent entrer dans la tente pour l’éveiller et l’emmener avec eux.

Cette intervention sauva la vie d’Onn ! Pelet est un nom qui vient de פלאות ou prodige, merveille….

En effet, lorsque D. soumit Korah, Datan et Abiram, ainsi que tous les autres nessiim au total 250 personnes, les uns et les autres devaient présenter pour « l’examen » les uns saisissant les « mahatot » pour les sacrifices et les autres avec l’encens.

Datan et Abiram refusèrent de se prêter à l’épreuve et furent engloutis par la terre et les autres furent brûlés vifs par le feu qui brûla l’encens…..

Certains miracles surnaturels ont été créés nous apprend-on dans les Pirké avoth juste avant que ne commence le premier shabbat de l’humanité.

Entre ces miracles on compte « פי הארץ » la bouche de la terre : pi ‘haaretz. Cette terre qui est dotée de signes humains et de réactions humaines ainsi qu’il en est question dans la parasha des explorateurs (shelah lekha) où les explorateurs pour affoler les foules déclarent : « une terre qui dévore ses habitants » et dans d’autres occasions il est dit que la terre : CETTE terre d’Israël, cette terre rendue femme s’était déjà vue attribué une autre faculté au moment du meurtre de Caïn sur la personne de Caïn : elle avait bu le sang de cet homme………

Lorsque les explorateurs se sont rendus en Canaan, D. avait suscité une épidémie qui fit que les Cananéens étaient occupés à enterrer leurs proches plutôt qu’à s’apercevoir que des hommes d’Israël avaient pénétré sur leur territoire.

Dans cette péricope donc, la terre s’est entrouverte pour engloutir ceux qui ont blasphémé.
A propos de blasphème la question se pose de savoir quel lien y a-t-il entre la parasha précédente dite des explorateurs et parashat Korah où il est question à la fois de D. et de la terre d’Israël: pourquoi dans Shelah lekha D. décide-t-IL de punir par 40 ans de pérégrinations dans le désert cette génération coupable et pourquoi les 250 personnes formant la « communauté de Korah » ont-ils été décimés sur le moment et pourquoi de deux façons différentes : engloutis ou brûlés.

La réponse est la suivante : les explorateurs (sauf Caleb et Yéhoshoua) ont été coupables de médisance (ou plutôt de calomnie) vis-à-vis de la terre ce qui a provoqué la décision divine de na pas laisser pénétrer dans ce pays qu’ils ont méprisée.

Et, tant il est vrai que l’on ne peut pardonner que lorsque nous avons-nous-mêmes été les victimes, D. n’a pas pardonné une faute qui avait été commise contre la Terre.

Les explorateurs se sont comportés comme des êtres ne faisant aucune confiance en leur D .et même si D. a un « mouvement d’humeur » cela n’est pas comparable au fait que Korah en « prenant » tout et en se prenant lui-même comme quelqu’un à part, comme quelqu’un qui controverse les arrêts, les décisions divines, Korah donc, a allumé par son orgueil la colère de D. et comme Nadav et Avihou qui s’étaient conduits légèrement et ont été brûlés par le feu de D., Korah et ses partisans ont eux aussi été décimés et brûlés vifs.

Caroline Elishéva REBOUH

LE FIL D’AZUR « PETIL TEKHELET »

Lorsqu’on étudie l’Histoire médiévale, on apprend que les artisans d’alors étaient en possession d’un secret pour la coloration du verre et surtout pour la coloration du bleu….

Parallèlement à ceci, nous savons que pendant de longs siècles le bleu qui servait à colorer les tsitsioth n’était pas en usage et les talitoth étaient vendus selon la couleur naturelle de la laine.

Pourtant depuis quelques décennies on aperçoit des hassidim surtout arborant fièrement des franges bleues de ce bleu qu’improprement on traduit par bleu ciel mais qui en fait se rapproche du bleu de coeruleum c’est-à-dire d’un bleu profond et lumineux alliant une légère nuance de vert.

Selon les opinions, il est encore trop tôt pour mêler aux tsitsioth ce fil bleu car certains pensent que le « secret » de la fabrication de ce bleu sera délivré par le Messie. En revanche, l’ancien Grand Rabbin de Jérusalem Itshak Herzog (le grand-père du leader du Camp Sioniste) avait consacré des années de recherche à la fabrication de ce bleu si particulier.

La Tradition nous a toujours enseigné que le ver (shamir) qui avait aidé à construire le Temple avait disparu  à la destruction du Temple ; d’après les midrashim, il suffisait que l’on pose ce ver sur un bloc de pierre pour que, seul, il transperce des montagnes. De même, les teintes de pourpre et d’écarlate étaient fabriquées par un procédé particulier dont la matière première était un ver (tolaât shani).

D’après le texte biblique, cet azur provenait d’un escargot (hilazon) qui vivait en colonies et se reproduisait au bord des côtes maritimes. Les pêcheurs les ramassaient avec toute la boue, le varech et les algues qui les entouraient ; dans un deuxième stade, il fallait extraire les glandes digestives de ces coquillages avant de les broyer et de les faire bouillir pour en obtenir aussitôt une teinture verdâtre. Puis, selon un processus particulier, il était possible à partir de ce bain d’obtenir d’autres gammes de nuances allant du bleu profond jusqu’à l’écarlate !

Parmi les nombreux interdits imposés aux Juifs par les Romains figurait celui de l’interdiction absolue de fabriquer ce bleu azur dont l’usage était réservé à la caste royale et noble ! Peu à peu cette tradition orale sur les secrets de fabrication s’effaça jusqu’à disparaître complètement.

La plupart des groupes hassidiques pensaient que ce secret, parmi tant d’autres, trouverait sa solution aux temps messianiques. Mais, en Pologne, le Rav Mordékhay Yossef Leiner, disciple du Rabbi de Kotzk, quitta la cour de ce grand tsadik pour fonder sa propre dynastie qui s’intitula désormais la Radziner Dynastie en 1839.

Son siège était Izbica-Radzin et, le troisième Rebbe de la lignée, Rebbe Guershon Henoch Leiner de Radzin insista et démontra que rien ne s’opposait à insérer dans les tsitsioth le fil d’azur. Encore fallait-il savoir comment obtenir ce bleu profond. Il entreprit d’étudier comment y parvenir en se rendant sur l’une des côtes méditerranéennes susceptible d’abriter le hilazon (mollusque) en question et avec l’aide d’un professionnel, et, après plusieurs essais peu probants ils réussirent à obtenir un bleu profond comme celui convoité. Cette fois, le secret de fabrication noté, et ne risque plus d’être perdu. Depuis la fin du XIXème siècle, les Radziner mêlent à leurs tsitsioth le « petil tékhelet » bientôt imités par d’autres hassidim.

Le Rav Herzog poursuivit ses recherches et les approfondit jusqu’à parfaire la formule à partir du hilazon se trouvant sur les côtes nord d’Israël.

Les archives du Rebbe Leiner furent détruites lors de la seconde guerre mondiale mais à partir de bribes de lettres retrouvées et avec l’aide du Rav Herzog, la formule pour la fabrication du bleu des tsitsioth fut remise au point et depuis, les personnes désirant porter des franges de ce bleu intense sont de plus en plus nombreuses.

Caroline Elishéva REBOUH

le HILAZON ou MUREX TRUNCULUS
PETIL TEKHELET OU FRANGE BLEUE

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