Georges Loinger, grand résistant juif, est décédé. — AFP

Le grand résistant juif Georges Loinger, qui avait sauvé des centaines d’enfants juifs pendant la Seconde Guerre mondiale en France, est mort vendredi à l’âge de 108 ans, a annoncé samedi la Fondation pour la mémoire de la Shoah sur son site internet.

« Avec lui s’éteint un homme d’exception dont les combats resteront dans les mémoires », a écrit la Fondation dans un bref communiqué.

M. Loinger, né à Strasbourg (nord-est de la France) en août 1910, commandeur de la Légion d’honneur, titulaire de la médaille de la Résistance et de la Croix de Guerre, a présidé l’Association de la Résistance juive de France (ARJF).

Il avait fait passer de nombreux enfants en Suisse.

AFP

 

 

Georges Loinger

Georges Loinger – © Archives familiales/DR

 

Comment avez-vous perçu la montée du nazisme outre-Rhin ?

Je suis né en 1910 à Strasbourg où vivait ma famille : je suis donc né allemand. Puis durant mon adolescence, j’ai appartenu au mouvement de jeunesse sioniste Hatikwah (Espoir), fondé par Théodore Herzl, et dont j’étais un des chefs.

Vivant dans une ville universitaire et cosmopolite comme Strasbourg, et membre d’un mouvement de jeunesse, j’étais très à l’écoute du monde et particulièrement de l’Allemagne. Dans les années 1925-1930, à la radio allemande, nous avons commencé à entendre une voix étrange, puissante, redoutable… une voix faite pour convaincre. Celle-ci annonçait un drame : « Les Juifs, je vais les exterminer » hurlait Hitler. Et il se préparait à prendre le pouvoir…

Nous savions dès lors que l’avenir s’annonçait difficile. À Strasbourg, nous étions nombreux à l’entendre et nous nous sommes préparés au pire. D’autant que nous avons commencé à voir des réfugiés affluer qui fuyaient les persécutions.

Abandonnant mes études d’ingénieur, je me suis tourné vers l’enseignement de l’éducation physique – j’étais déjà très sportif – avec l’intention de préparer et de former la jeunesse juive aux épreuves qui l’attendaient. Par ailleurs, je travaillais comme éducateur dans les œuvres sociales de la baronne Edouard de Rothschild. Aux termes de longues négociations, celle-ci, s’inquiétant du sort d’enfants juifs dont les parents avaient été internés en Allemagne, avait réussi à acheter à prix d’or 123 enfants aux nazis. Ma femme s’était chargée de s’occuper des petits réfugiés au château de la Guette, en Seine-et-Marne.

Puis la guerre éclate…

J’ai alors 29 ans et je suis mobilisé. Peu après, je suis fait prisonnier avec mon régiment en Bavière, où je suis enfermé au stalag 7. Je parviens à m’évader à la fin de 1940 : je traverse l’Allemagne et reviens en France. Je me mets au service de l’Œuvre de secours aux enfants (OSE), qui cachait et protégeait près de 1 500 enfants juifs répartis dans quatorze maisons. Mais, à partir de l’été 1942, notre stratégie a changé : face aux menaces grandissantes et après l’invasion de la zone libre par les Allemands, le regroupement d’enfants dans des maisons devenait trop dangereux. Il a alors été décidé de disperser les enfants dont nous avions la charge et de les envoyer à l’étranger, dans des zones où ils seraient à l’abri de la déportation. Il s’agissait dès lors d’organiser la filière d’exfiltration.

Comment cela se passait-il ?

Nous faisions passer les enfants par petits groupes de France en Suisse. Les premiers temps, les choses se passaient bien. Les Italiens surveillaient la frontière franco-suisse et étaient assez bienveillants. En fait, ils fermaient les yeux ou regardaient ailleurs. Mon rôle consistait alors à aller chercher des groupes à la gare d’Annemasse. J’emmenais les enfants dans un centre d’accueil de la municipalité. Le maire, Jean Deffaugt, était l’un de nos soutiens. Les enfants y logeaient pour la nuit et le lendemain matin, nous faisions appel à des passeurs qui, moyennant finance, guidaient les enfants de l’autre côté de la frontière. Ce voyage prenait une heure environ. Au final, nous en avons fait passer près de 350.

En 1943, les Allemands remplacent les Italiens. Quel impact cela a-t-il sur votre activité ?

Après la capitulation de l’Italie fasciste, en septembre 1943, les troupes italiennes et notamment celles surveillant les frontières, se retirent. Immédiatement, les Allemands arrivent. Et de fait, les choses ont changé. Nous avons continué nos activités, mais très difficilement. J’ai alors appris que j’étais recherché par les Allemands et, en février 1944, la Gestapo a fait une descente dans les locaux de l’OSE, à Chambéry. Nous avons alors échappé de peu à l’arrestation. Une fois ma famille à l’abri, je suis retourné à Annemasse où j’ai continué mes activités auprès de l’OSE jusqu’à la Libération.

Après la guerre, il œuvrera pour faciliter le passage des rescapés du nazisme en Palestine et jouera un grand rôle dans l’affaire de l’Exodus lorsqu’il fera escale en France. Celui qui était le doyen de la Résistance juive en France a aussi participé à la création de « la Fraternité d’Abraham » qui prône le rapprochement des trois religions monothéistes.

Il a écrit plusieurs livres racontant son expérience, notamment: Les Résistances juives pendant l’occupation; L’odyssée d’un résistant : témoignage d’un centenaire, enfant d’Alsace.

Source principale

autre

 

 

 

La rédaction de JForum, retirera d'office tout commentaire antisémite, raciste, diffamatoire ou injurieux, ou qui contrevient à la morale juive.

S’abonner
Notification pour
guest

Ce site utilise Akismet pour réduire les indésirables. En savoir plus sur comment les données de vos commentaires sont utilisées.

2 Commentaires
Le plus récent
Le plus ancien Le plus populaire
Commentaires en ligne
Afficher tous les commentaires
Aaron le Rachid

Que sa mémoire soit bénie et qu’il repose en paix dans l’intériorité de Dieu, d’où son âme est fut soufflée, c’est ainsi que le Juif qui a fait son devoir entre dans l’immortalité

Élie de Paris

Shavouah Tov..!
Plus Pharaon et sa maison oppressaient les Hébreux, plus ils fructifiaient et multipliaient…
Les survivants de la Shoah et ceux des résistants qui ont survécu ont développé des résistances étonnantes qui rallongent leur vie.
« Ce qui ne tue pas rend plus fort… »