RONY AKRICH ET DAVID SABAH: HAFTARA MATOT-MASSE « UN PROPHETE ACCUSATEUR »

Le livre de Jérémie nous ramène au temps des derniers rois de Juda avant la captivité. L’apparition d’un prophète est toujours l’indice du mauvais état du peuple d’Israël, mais aussi une preuve de la grâce de Dieu.

Dès avant sa naissance, l’Éternel avait mis à part ce jeune homme pour le service auquel il le destinait. Timide, Jérémie commence par résister à l’appel de Dieu : « Je suis un enfant ».

Ne parle pas ainsi, lui répond l’Éternel. Qu’importent tes capacités, du moment que tu ne dis et ne fais rien d’autre que ce que je te commande. Pour encourager son jeune messager, Dieu lui donne deux visions remarquables : Le bâton d’amandier (« l’arbre qui veille ») rappelle la verge d’Aaron qui jadis avait bourgeonné, fleuri et mûri des amandes (Nomb. 17 v. 8) et confirme la décision de ce Dieu vigilant et fidèle. Il faut donc se hâter d’avertir le peuple et le presser de se repentir, car le pot bouillant annonce la menace imminente d’ennemis venant du nord. Tâche difficile !

Mais Jérémie reçoit la force d’en haut (v. 18) avec une promesse : « Moi je suis avec toi » (v. 19; voir aussi ch. 15 v. 20). Les premiers mots que l’Éternel met dans la bouche de Jérémie sont destinés à regagner le cœur de son peuple oublieux… trop fidèle image de notre propre cœur ! Et c’est comme si le Seigneur nous demandait avec tendresse : Te souviens-tu de cet heureux temps qui a suivi ta conversion ? Comme tu brûlais alors de zèle et de reconnaissance ! Certes, tu marchais dans ce monde comme dans un désert, « un pays non semé ». Mais je te suffisais alors pleinement. Si tu as oublié ce temps-là, moi j’en ai gardé le souvenir. Car elle m’était agréable, cette ardeur de tes affections, cette joie de ton premier amour.

Les prophéties de Jérémie

Le grand prophète Jérémie vécut en une période des plus critiques de l’histoire juive. Il fut témoin de la destruction de Jérusalem et du Beth Hamikdache après que ses avertissements répétés et ses prophéties eurent été ignorés de tous.

Quand vint la catastrophe, il pleura sur le sort tragique de son peuple dans le Livre d’Eikhah (Lamentations) que nous lisons à Tichea beAv. Ce qui ne l’empêcha pas, une fois le malheur arrivé, d’être une source de réconfort pour ses frères en leur indiquant la voie de leur rédemption. Ses prophéties sont consignées dans le Livre de Jérémie, qui contient aussi les événements importants de sa vie.

Jérémie naquit dans une famille de prêtres à Anatoth, ville appartenant à la tribu de Benjamin. Son père était le prophète et Grand-Prêtre ‘Hilkiyah. Jérémie commença ses prophéties la treizième année du règne du roi Josiah (en l’an 3298). Le prophète Zefaniah et la prophétesse ‘Houldah appartiennent à la même époque.

Jérémie était encore un jeune homme quand l’esprit de prophétie l’investit. Une telle responsabilité lui donnait des craintes ; aussi hésitait-il à l’accepter, en déclarant : « Je ne suis qu’un enfant ! » Mais D.ieu lui répondit : « Ne dis pas : je ne suis qu’un enfant. Car tu iras vers tous ceux auprès de qui Je t’enverrai. Ne les crains pas, car Je suis avec toi pour te délivrer. » (Jérémie 1, 6-8).

À partir de ce moment, Jérémie perdit toute appréhension et formula ses tristes prophéties et ses sombres avertissements sans se soucier du roi et de ceux qui l’entouraient, souvent au péril de sa vie.

Il prophétisa les dernières années du règne de Josiah (3285-3316) et sous celui de ses fils : Yéhoa’haz, qui ne régnait que trois mois, et Yéhoyakim (3316-3327) ; sous le fils de ce dernier, Yéhoyakhine, qui demeura cent jours sur le trône, et enfin sous Tzédékiyah, fils de Josiah et dernier roi de Judée (3327-3338).

En tout, Jérémie prophétisa quarante ans, jusqu’à la destruction du Beth Hamikdache et peu de temps au-delà.

L’une des premières missions de Jérémie fut sa visite aux Dix Tribus exilées d’Israël, dont le royaume au nord avait été détruit par les Assyriens, moins d’un siècle auparavant. Le prophète leur apporta réconfort et espoir, et induisit plusieurs d’entre elles à retourner dans leur patrie.

Comme une nouvelle mariée

Josiah fut le dernier roi de Judée qui eût la crainte de D.ieu. Il tomba au champ de bataille alors qu’il combattait contre le Pharaon Nékho. Lui mort, et des successeurs médiocres aidant, le peuple s’enfonça dans l’idolâtrie. Jérémie fit tout ce qu’il put, mais en vain, pour le ramener dans les voies de la Torah.

Dans une prophétie émouvante, il rappelle à son peuple son histoire passée quand, plein de foi, il suivit Moïse dans le désert. Il décrit la fidélité du peuple juif à D.ieu, la comparant à la fidélité d’une nouvelle épouse à son époux ; et il se demande ce qui a bien pu arriver à ses frères pour qu’ils se détournent ainsi de D.ieu :

« Ainsi parle l’Éternel : Je me souviens de ton amour lorsque tu étais jeune, de ton affection quand tu étais fiancée, quand tu Me suivais au désert, dans une terre inculte. Israël est consacré à l’Éternel, il est les prémices de Son revenu ; tous ceux qui en mangent se rendent coupables, et le malheur fondra sur eux, dit l’Éternel.

 « Écoutez la parole de l’Éternel, la maison de Jacob, et vous toutes, familles de la maison d’Israël ! Ainsi parle l’Éternel : quelle iniquité vos pères ont-ils trouvée en Moi, pour s’éloigner de Moi et aller après des choses de néant et n’être eux-mêmes que néant ? Je vous ai fait venir dans un pays semblable à un verger, pour que vous en mangiez les fruits et les meilleurs produits ; mais vous êtes venus, et vous avez souillé Mon pays, et vous avez fait de Mon héritage une abomination… Car Mon peuple a commis un double péché : ils M’ont abandonné, Moi qui suis une source d’eau vive, pour se creuser des citernes crevassées, qui ne retiennent pas l’eau. »

(Jérémie 2, 2-13)

Ce n’est pas tout. Le prophète se plaint de ce que le peuple juif a abandonné D.ieu et Sa Torah, la source de vie, et s’est tourné vers l’idolâtrie et un mode de vie contraire à la vérité, et dont ne peut résulter justement aucune vie, mais seulement le malheur.

La valeur réelle

Le prophète déclare que la « sagesse » des nations idolâtres, leurs richesses, ni leur puissance n’ont une valeur réelle ; seulement de connaître D.ieu et de marcher dans Ses voies, en a une. L’un des enseignements les plus célèbres de Jérémie est le suivant :

« Ainsi parle l’Éternel : Que le sage ne se glorifie pas de sa sagesse, que le fort ne se glorifie pas de sa force, que le riche ne se glorifie pas de sa richesse. Mais que celui qui veut se glorifier se glorifie d’avoir de l’intelligence et de Me connaître, de savoir que Je suis l’Éternel qui exerce la bonté, le droit et la justice sur la terre ; car c’est à cela que Je prends plaisir, dit l’Éternel. »

(Jérémie 9, 23-24)

Le prophète enseignait aussi qu’il est inutile de se fier à l’homme, car se faisant l’on nie D.ieu ; seule la confiance en D.ieu est sûre d’être récompensée :

« Ainsi parle l’Éternel : maudit soit l’homme qui se confie dans l’homme, qui prend la chair pour son appui, et qui détourne son cœur de l’Éternel ! Il est comme un misérable dans le désert, et il ne voit point arriver le bonheur… Béni soit l’homme qui se confie dans l’Éternel… car il est comme un arbre planté près de l’eau, et qui étend ses racines vers le courant ; il n’aperçoit pas la chaleur quand elle vient, et son feuillage reste vert ; dans l’année de la sécheresse, il n’a pas de crainte et il ne cesse de porter des fruits. »

(Jérémie 17, 5-8)

Comme nous l’avons dit plus haut, le pieux roi Josiah mort, la vie spirituelle commença à décliner au sein du peuple. Les successeurs de Josiah étaient loin d’avoir sa stature.

Avant sa mort, il avait désigné pour lui succéder sur le trône son fils Yéhoa’haz qui semblait plus enclin que son frère aîné à marcher sur les traces de son père. Le peuple accepta ce choix, et le proclama roi. Mais le règne de Yéhoa’haz fut très bref ; il ne dura que trois mois pendant lesquels il déçut tous les espoirs qu’il avait suscités.

L’invasion du pays de Juda par le Pharaon Nékho mit fin à son règne. Nékho captura Yéhoa’haz qui fut emmené dans les chaînes en Égypte ; il y mourut en captivité. A sa place, le Pharaon mit sur le trône le frère aîné de Yéhoa’haz, Elyakime qui changea son nom en Yéhoyakime.

Ce dernier fut encore pire que son frère. Il négligea les lois de la Torah que son père avait si solidement implantées dans le pays, et fut un triste exemple pour son peuple en s’engageant dans la voie du mal et de l’idolâtrie.

« Une nation contre vous »

Jérémie constate avec une peine infinie la dégradation de la moralité parmi ses frères et il admoneste sévèrement :

« Parcourez les rues de Jérusalem ; regardez, informez-vous, cherchez dans les places, s’il s’y trouve un homme, s’il y en a un qui pratique la justice, qui s’attache à la vérité, et Je pardonne à Jérusalem. Même quand ils disent : “l’Éternel est vivant”, c’est faussement qu’ils jurent. Ils renient l’Éternel, ils disent : “Il n’existe pas ! Et le malheur ne viendra pas sur nous. Nous ne verrons ni l’épée, ni la famine…”

« C’est pourquoi ainsi parle l’Éternel, le D.ieu des Armées : Parce que vous avez dit cela, voici, Je veux que Ma parole dans ta bouche soit du feu, et ce peuple du bois ; et que le feu les consume. Vois, Je fais venir de loin une nation dont tu ne connais pas la langue, et dont tu ne comprendras point les paroles. Son carquois est comme un sépulcre ouvert ; ils sont tous des héros. Elle dévorera ta moisson et ton pain que tes fils et tes filles doivent manger ; elle dévorera tes brebis et tes bœufs, elle détruira par l’épée tes villes fortes dans lesquelles tu te confies.

« Mais en ces jours, dit l’Éternel, Je ne vous détruirai pas entièrement. »

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