Attentat à Rambouillet/Meurtre de Sarah Halimi: «Les symptômes de l’impuissance publique»

FIGAROVOX/TRIBUNE – Vendredi, une policière se faisait assassiner par un ressortissant tunisien ; dimanche, des manifestations avaient lieu partout en France pour rendre hommage à Sarah Halimi, assassinée par Kobili Traoré en 2017. Selon l’avocat et essayiste, Gilles-William Goldnadel, ces deux meurtres de femmes sont les symptômes d’un système devenu fou.

Cette semaine, voyageons dans la folie du temps présent à travers deux «féminicides racisées», pour parler la novlangue si chère à nos médias conformistes. Et écrivons ce que peu songent ou n’osent écrire. Sarah Halimi a été torturée puis défenestrée par Kobili Traoré parce qu’elle était juive et qu’il est islamiste et antisémite.

Commençons par Stéphanie. Elle est la nouvelle martyre de la police ou de l’armée, elle dont on oubliera bientôt le prénom tant ceux-ci sont nombreux et s’entassent sans mémorial.

Alors rappelons-les en remontant dans le temps et en rappelant aussi le nom de leurs bourreaux :

Paris 7 janvier 2015, les frères Kouachi assassinent le policier Amet Merabet ;
Paris, 8 janvier 2015, Coulibaly assassine la policière Clarissa Jean-Philippe ;
Magnanville, 13 juin 2016, Abdallah Larossi massacre les deux policiers Baptiste Salvaing et Jessica Schneider ;
Paris, 3 février 2017, Carroussel du Louvre, un Égyptien hurlant « Allah Akhbar » et armé d’une machette agresse quatre militaires ;
Orly, 18 mars 2017, Ziyad Ben Belkacem tire sur des policiers au nom d’Allah ;
Paris, 20 avril 2017, Champs-Élysées : Karim Cheurfi loge deux balles dans la tête de Xavier Jugelé ;
Notre-Dame de Paris, 6 juin 2017 : Farid Ikken agresse à l’arme blanche trois policiers au cri de : «C’est pour la Syrie !» ;
Trèbes, 23 mars 2018 : Radouane Lakdim, fiché S, assassine Arnauld Beltrame ;
Préfecture de police de Paris, 3 octobre 2019 : Michael Harpon, musulman converti et radicalisé poignarde à mort trois policiers ;
Colombes, 27 avril 2020 : Youssef T. fonce avec sa voiture sur trois policiers et les blesse grièvement ;

Et enfin Stéphanie. Et toujours cette même folie. Et osons dire pourquoi. D’abord par la spécificité de son agresseur. Jamel, tunisien entré irrégulièrement sur le territoire français puis régularisé. Le concept même de la régularisation possible d’un individu entré irrégulièrement sur le territoire national montre la faiblesse suicidaire d’un État-nation en déréliction.

Quand on accepte sans mot dire et encore moins faire qu’un clandestin puisse impunément se montrer publiquement, c’est qu’il n’est plus clandestin et qu’il n’y a plus vraiment de force publique.
Le tournant des années 80 aura sans doute marqué la descente aux abysses. Par les occupations d’églises par les irréguliers et leurs alliés et jamais de mosquées. Par leurs manifestations au grand jour dans les rues des villes françaises.

Quand on accepte sans mot dire et encore moins faire qu’un clandestin puisse impunément se montrer publiquement, c’est qu’il n’est plus clandestin et qu’il n’y a plus vraiment de force publique. Et voilà que la force publique est contrainte de se remparer pour se protéger de la haine furieuse. La peur, paraît-il, devait changer de camp.

Autre étrangeté psychologique : la manière médiatique dont on traite le bourreau de Stéphanie. Une partie de la presse française a dissimulé les sympathies qu’il manifestait sur les réseaux sociaux. Qui pour Jean-Luc Mélenchon. Qui pour le BDS (ndlr : Boycott, désinvestissement et sanctions (BDS) est une campagne qui vise au boycott d’Israël). Au-delà de cette délicatesse elle a eu incontestablement raison de n’en tirer aucune conséquence. Si Hitler aime Mozart, cela ne fait certainement pas de Mozart un antisémite.

La même presse n’avait malheureusement pas agi aussi délicatement lorsqu’elle reprocha à Renaud Camus ou à Éric Zemmour une manière de responsabilité morale parce qu’ils avaient eu le malheur de ne pas déplaire à un terroriste néo-zélandais de Christchurch.

C’est dans cette différence de traitement qu’habite la folie du temps présent. À en croire les antiracistes professionnels aux scrupules sélectifs, les hommes et femmes politiques qui au lendemain d’un assassinat commis par un migrant irrégulier régularisé remettent sur la table la question migratoire seraient dans la « récupération ».

En revanche, lorsque l’affaire Georges Floyd traverse l’Atlantique pour s’en prendre au racisme systémique qui régnerait dans la police française, il n’y aurait évidemment ni instrumentalisation ni folle exagération.

Comme à son habitude, la majorité presse française n’a pas non plus été avare de ses interrogations sur l’état mental de Jamel. À en croire son père, il n’était pas au meilleur de sa forme. Anders Breivik, le terroriste norvégien et son équivalent néo-zélandais n’étaient pas des modèles d’équilibre et de pondération. Cela n’empêcha pas les condamnations morales de la planète médiatique, en faisant l’économie des questions psychiatriques.

Contrairement à ce qui a été indiqué, y compris par les plus hautes autorités judiciaires, la justice française pouvait parfaitement, dans l’état actuel de son droit positif statuer autrement, quand bien même elle aurait constaté une abolition totale du discernement du meurtrier Traoré qui est contestée.
Et puisque nous en sommes aux registres de l’instrumentalisation opportune de la folie, on ne peut pas ne pas aborder l’affaire Sarah Halimi.

L’auteur du présent article ne saurait revendiquer la parfaite objectivité, le lecteur le sachant impliqué dans l’affaire judiciaire en tant qu’avocat de la sœur de la victime. Aussi, il s’abstiendra de la commenter longuement. Il rappellera qu’il fera franchir au dossier, avec son confrère Szpiner, la Méditerranée, littéralement en désespoir de cause, aux fins de voir la justice israélienne, compétente hors de ses frontières lorsqu’un juif est assassiné en tant que juif, réparer ce qu’ils considèrent comme un déni de justice.

Je me contenterai néanmoins ici de démentir une contrevérité judiciaire que j’ai lue cette semaine et que je ne saurais taire. Contrairement à ce qui a été indiqué, y compris par les plus hautes autorités judiciaires, la justice française pouvait parfaitement, dans l’état actuel de son droit positif statuer autrement, quand bien même elle aurait constaté une abolition totale du discernement du meurtrier Traoré qui est contestée. Je porte à la connaissance publique que par un arrêt de la Cour d’appel de Versailles du 13 février 2018–confirmé par la Cour de cassation–la Chambre de l’instruction de cette Cour, exactement dans les mêmes conditions de fait et de droit que dans l’affaire Traoré, a jugé que : « La consommation importante de stupéfiants ne doit pas s’analyser comme une cause d’abolition du discernement mais au contraire comme une circonstance aggravante ».

Et le commentateur de l’arrêt d’observer : « Il s’agissait donc d’une décision contraire à celle de la chambre de l’instruction de Paris puisque sur la même base théorique (trois expertises dont deux concluant à l’abolition du discernement) la juridiction d’instruction du second degré avait choisi de renvoyer la personne mise en examen devant la cour d’Assises ».

Mais quittons le droit pointu pour revenir à la psychologie sociétale. Osons une hypothèse hardie : qu’un Traoré ait été torturé aux cris de « sale noir ! » avant que d’être défenestré par un Martin ayant abusé du Martini au point d’en faire une crise de delirium tremens. Peut-on imaginer que la réaction des banlieues aurait été moins compassée que celle de la communauté juive française ?

Par analogie, je rappelle qu’une partie des médias américains et français ont décrit Minneapolis soulagée de voir Derek Chauvin condamné dans l’affaire George Floyd. La ville sinon aurait brûlé… Sans faire de procès d’intention outrancier aux juges français, ne peut-on imaginer qu’ils auraient peut-être par prudence évité un jugement similaire à la décision concernant Sarah Halimi ?

Pour enfoncer plus profondément le clou dans la croix judiciaire, je rappellerai que dans une autre affaire autrement plus contestable, cette fois concernant Adama Traoré, une Garde des Sceaux considéra sans autre forme de procès que la manifestation interdite sur le parvis du tribunal pour raisons sanitaires devait malgré tout être autorisée « en raison de l’émotion ».

Lorsque l’émotion et la colère sont des outils plus efficaces que la raison et la sagesse c’est que notre système est devenu fou.

Par Gilles William Goldnadel  mis à jour le 26.04.2021 à 20:43

Gilles-William Goldnadel est avocat et essayiste. Chaque semaine, il décrypte l’actualité pour FigaroVox.

https://www.lefigaro.fr/vox/societe/attentat-a-rambouillet-meurtre-de-sarah-halimi-les-symptomes-de-l-impuissance-publique-20210426

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trublion

Les hauts responsables en France ont décidés, pour ne pas donner la publicité que ces assassins fous souhaitent, notamment par un procès :
soit de les exécuter sur place, en effet, très peu s’en sortent vivants.
soit de les déclarer fous d’office, ou déséquilibrés.
Entre une prison 5 étoiles, visites, télé, atelier ré-insertion, et sortie au bout de 10ans pour bonne conduite.
et un état de légumes dans un asile pendant un temps indéterminé et probablement jusqu’à la mort,
c’est quoi le pire ?

Elie de Paris

Nous en sommes là.
Mais chaque jour aggrave la perception (des mouvements de foules) des juges, désormais dans l’incapacité de faire leur métier objectivement.
Le naufrage, de probable, devient certain. Quand un pays change de justice en cours de route, qui sait où ça mène ?
Nous autres, les canaris, ne voulons plus l’être. Nous partons, lentement, mais sûrement.
La France ne sera plus la France ? C’est déjà le cas.