Accusés de contacts avec Israël, vingt-quatre Juifs iraniens sont détenus

 

L’Iran poursuit sa campagne de répression après le récent conflit avec Israël, et cette fois, c’est la communauté juive du pays qui se retrouve dans la tourmente. Au total, vingt-quatre Juifs iraniens sont actuellement emprisonnés à Téhéran et Shiraz, soupçonnés d’avoir entretenu des liens avec Israël. Une situation inédite, qui soulève des inquiétudes sur le sort de cette minorité religieuse historique, encore présente dans la République islamique.

Les arrestations ont débuté à l’aube du 23 juin, dans le cadre d’un vaste coup de filet ayant visé plus de 700 personnes à travers le pays. D’après HRANA, une organisation iranienne de défense des droits humains, trente-cinq Juifs ont initialement été arrêtés. Depuis, onze d’entre eux ont été relâchés, mais les autres restent détenus dans l’attente d’une décision judiciaire.

Les accusations portées sont graves : contacts non autorisés avec Israël, un crime désormais assimilé à de l’espionnage, dans le contexte de tensions extrêmes entre les deux pays. Selon un ancien responsable communautaire iranien, aujourd’hui exilé à Los Angeles, les autorités scrutent les téléphones des personnes arrêtées pour identifier tout appel ou message en direction d’Israël. Or, rappelle-t-il, « la plupart des Juifs iraniens ont de la famille en Israël, et beaucoup ont simplement voulu prendre des nouvelles lors des bombardements ».

Si pendant des années ces échanges familiaux ont été tacitement tolérés par les autorités, la guerre récente a changé la donne. Les responsables du régime semblent désormais considérer toute interaction comme une menace potentielle à la sécurité nationale. Cette évolution fait craindre une criminalisation généralisée des relations personnelles au sein de la diaspora juive.

Cette montée en tension intervient dans un climat déjà très lourd. Téhéran accuse le Mossad israélien d’être derrière plusieurs opérations secrètes, notamment l’assassinat du scientifique nucléaire Mohsen Fakhrizadeh en 2020. La récente guerre a été marquée par des frappes israéliennes contre des sites stratégiques iraniens, ainsi que des attaques de drones et des opérations d’infiltration. Les autorités iraniennes cherchent désormais à identifier les relais internes de ces opérations, en lançant une chasse aux espions dans les milieux civils, y compris parmi les minorités.

Le cas de la communauté juive est d’autant plus sensible que, malgré sa liberté de culte garantie par la constitution, elle subit depuis des décennies discriminations sociales et restrictions légales. Les Juifs iraniens peuvent pratiquer leur religion et disposent de leurs écoles, synagogues et d’un représentant au Parlement. Mais ils sont exclus de nombreux postes à responsabilité et font l’objet d’une surveillance continue.

Dans ce contexte, les récentes arrestations rappellent tristement un précédent : en 1999, treize Juifs de Shiraz, parmi lesquels des rabbins, enseignants et commerçants, avaient été accusés d’espionnage. Bien que la justice iranienne les ait condamnés à des peines de prison allant jusqu’à 13 ans, une mobilisation internationale avait abouti à leur libération progressive, les derniers détenus ayant été relâchés en 2003.

Aujourd’hui encore, la peur règne. Plusieurs sources évoquent une campagne médiatique et communautaire de soutien aux autorités iraniennes, lancée par les responsables juifs eux-mêmes afin d’écarter tout soupçon. Des rassemblements ont été organisés, notamment à la synagogue Abrishami de Téhéran, en présence de rabbins et de jeunes Juifs servant dans l’armée iranienne. Ces démonstrations de loyauté visent à désamorcer les accusations, même si leur sincérité reste difficile à évaluer dans un contexte de répression politique.

« La moindre communication avec Israël suffit désormais pour être traité comme un traître », déplore l’ancien responsable iranien. Il rappelle que les liens familiaux ne sont pas des actes d’espionnage, mais dans la logique actuelle du régime, ils peuvent suffire à justifier une détention prolongée.

Alors que les tensions géopolitiques régionales s’intensifient, la communauté juive d’Iran se retrouve à nouveau dans une position précaire, sommée de prouver sa fidélité à un pays qui, en retour, multiplie les signes de défiance. Le fragile équilibre que cette minorité maintenait depuis des décennies pourrait bien être en train de se briser.

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