La première acquisition de l’Iran après un « accord » renseigne sur son agressivité dans la Région et ses véritables objectifs

 

La première acquisition de l’Iran après avoir signé le projet d’accord nucléaire, et nageant dans les promesses d’allègement des sanctions, ne consiste pas à acheter des voitures, des avions, des réfrigérateurs, encore moins des sacs à main pour les femmes – mais bien plutôt des missiles de longue portée! L’Iran est ravi de l’accord du Kremlin de lui livrer des S-300 d’ici cet été. Mais ces déclarations russes n’ont fait qu’alimenter la colère des pays de la région qui, il y a encore peu de temps alertaient des conséquences de l’accord contracté à Lausanne, ce mois-ci et destiné à assouplir les sanctions économiques et militaires qui pesaient sur Téhéran. Cet accord, bien avant même d’être finalisé et scellé, n’a, déjà, fait que conduire à un plus niveau de militarisation de la région et à des tensions encore accrues. 

 

On peut se demander quelles sont les raisons qui ont motivé la précipitation de la Russie à envoyer des missiles, alors même que la finalisation de cet accord n’est pas prévue avant plus de huit semaines (2 mois). 

Courtiser l’Iran? 

Est-ce que le Kremlin souhaite courtiser l’Iran avant que ce pays ne se tourne vers les Etats-Unis après la réconciliation qui devrait s’ensuivre? 

Est-ce que ces missiles symbolisent plutôt une partie du conflit entre la Russie et l’Occident en Ukraine et, ainsi, peut-être le Président Poutine veut-il élargir le cercle de turbulence, pour l’Occident et ses alliés, dans leurs aires d’influence? 

 

Cet appétit de Téhéran pour le chaos resurgira d’autant plus qu’il vient de comprendre qu’il est parvenu à neutraliser les pays occidentaux et à les empêcher d’intervenir par de simples promesses de geler son programme nucléaire. 

Abdulrahman al-Rashed

Ou encore n’est-ce, finalement, qu’un simple contrat commercial, dans un monde où l’argent n’a pas d’ôdeur? Le Moyen-Orient est devenu, depuis longtemps, le plus vaste marché d’achat d’armes dans le monde. La Russie veut y prendre sa part de gâteau. En vendant de tels missiles, la Russie ne fait alors que pousser les paysde la région à se mettre en chasse pour acquérir des armes encore meilleures et plus puissantes. Le Ministère russe de la Défense a déclaré qu’il livrera aux Iraniens la version améliorée de missiles S-300 à pas plus d’1 milliard de $, afin de resserer à nouveau les liens avec l’Iran après l’avoir laissé tomber.La Russie a déjà récolté 1 milliard de $ de l’Iran, mais n’a pas encore expédié la marchandise. 

On n’est pas près de se rapprocher de la Paix

Stratégiquement, cet accord sur les missiles ne va pas fondamentalement changer la puissance de l’Iran dans la région, mais il sera sûrement important et influent. Le Premier Ministre israélien Binyamin Netanyahu n’a même pas achevé le lecture des journaux du matin, avant d’appeler directement le président russe pour se plaindre de cet accord. Beaucoup de groupes arabes considèrent cet accord sur les missiles comme la preuve que l’accord nucléaire  » a accru l’agressivité de l’Iran en l’éloignant un peu plus de l’horizon de la paix ». 

Pour ce qui est des Etats du Golfe, ils élaborent des calculs différents que ceux d’Israël. Israël dispose d’une puissance nucléaire et conventionnelle qui pourrait détruire l’Iran en un jour, dans l’éventualité d’une guerre. Alors que le Golfe se retrouve dans une position affaiblie face au renforcement de la défense de l’Iran grâce aux missiles russes. Dans leur stratégie défensive contre l’Iran, les pays du Golfe comptent fondamentalement sur leur armement aérien et leurs roquettes, en cas de menace extérieure. Les missiles S-300 peuvent sérieusement affecter la capacité de la principale force du Golfe – alors que sa puissance aérienne était significativement meilleure que celle dont l’Iran disposait avec ses missiles précédents – et que le Golfe continuera de compter pouvoir faire face contre toute attaque potentielle de l’Iran, que ce soit au sol ou par la mer. 

L’accord entre la Russie et l’Iran repose sur le scepticisme grandissant, concernant la promesse américaine de défendre le Golfe, et augmente les pressions régionales. Certains peuvent bien se demander : pourquoi ne favorisons-nous pas une perspective optimiste et pacifique, avec l’espoir que l’Iran, après avoir repris confiance dans son armée, grâce aux accords nucléaires et à l’acquisition des missiles russes, puisse se détendre et arrêter de propager le désordre dans la région? 

Cette aspiration a toujours été vivace parmi les Arabes. Cependant, les réalités sur le terrain sont fort différentes. Nous savons que l’Iran ne participera pas au dialogue – alors qu’il possédera tous ces pouvoirs- pour aboutir à une paix juste. L’appétit de Téhéran pour le chaos ne fera qu’augmenter, parce qu’il très bien compris qu’il a réussi à neutraliser le désir des pays occidentaux d’intervenir, en croyant être parvenus à geler son programme nucléaire. Il a amélioré ses forces défensives et tiré avantage du fait que les sanctions, militaires et économiques, internationales sont sur le point d’être levées. Les dirigeants de Téhéran pensent que la région est devenue une carte totalement ouverte, pour la première fois, depuis les accords Sykes-Picot et que les frontières peuvent s’ajuster à la convenance des propres intérêts de l’Iran. 

 

Cet article a d’abord été publié dans Asharq al-Awsat le 18 Avril 2015.

english.alarabiya.net

Adaptation : Marc Brzustowski.

________________
Abdulrahman al-Rashed est l’ancien Directeur Générald’Al Arabiya News Channel. Journaliste chevronné et internationalement reconnu, il est l’ancien rédacteur-en-chef du principal quotidien arabe basé à Londres, Asharq al-Awsat, où il rédige régulièrement des éditoriaux. Il a également occupé le poste de la publication jumelle d’Asharq al-Awsat, al-Majalla. Tout au long de sa carrière, Rashed a interviewé plusieurs grands dirigeants mondiaux, ses articles recueillant une reconnaissance internationale et il a dirigé avec succès Al Arabiya jusqu’à la position d’influence appréciée, enviée  à laquelle se trouve ce journal aujourd’hui.

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gabriel Taieb

Décidémment, votre cécité politique s’aggrave ! Dois-je en conclure que la DEBKA est manipulée par Poutine? Je n’ai fait ici que rapporter les analyses de cet organisme israélien très renseigné.
Deux: Qui a importé le guerre en Moyen Orient, en Egypte, au Liban, en Irak, en Syrie, qui a fabriqué l’EI pour abattre Assad – les Occidentaux, USA en tête, qui commencent à courtiser le président syrien comme l’Iran? J »ai lu une quantité d’articles sur ce thème dans ce site, et, leurs conclusions ne touchent en rien la Russie, c’est l’intervension directe des USA qui est la cause de tous ces bains de sangs et d’une situation dangereuse pour Israël
Trois: il faudrait lire avec plus d’attention ce que j’écris, je n’ai pas écrit « une mise en place de dernières versions ne représenterait aucun « danger » pour les aviateurs israéliens » je ne parle que des S-300 qui remontent à l’époque soviétique, mais bien, je me recite: »Par contre les photos montrent la version S-300 MK, qui elle, pourrait s’avérer un danger »
Certes, il est nécessaire de rester sur ses gardes et ne pas perdre de vue l’ennemi. Toutefois, il ne faut pas se tromper d’ennemi, à l’heure actuelle, comme l’ont noté la plupart des analystes de ce site, la Russie s’inquiète depuis longtemps de l’apparition d’un pouvoir nucléarisé à sa porte et tant que les centrales iraniennes seront sous contrôle russe, on veillera au grin. Par contre, si les Russes venaient à quitter ce pays, ils seraient immédiatement remplacés par les Nord Coréens qui eux, possèdent déjà la technologie nécessaire à la fabrication de telles armes. Au moment présent, la totalité des articles du Forum, démontre que l’ennemi d’Israël c’est l’Occident – USA compris- où l’antisémitisme fait rage et se développe.

En ce qui concerne l’OTAN, c’est sa politique agressive vis-à-vis de la Russie qui poussée depuis la maison brune, devient dangereuse, car elle tend à intégrer dans son système des pays limitrophes avec la Russie, le dernier exemple étant celui de l’Ukraine.

gabriel Taieb

Cet article provenant d’un média arabe est en complète contradiction avec le reportage élaboré de
DEBKAfile Reportage Exclusif 15 avril 2015, 11:38 AM (IDT). Sans doute y trouve-t-on quelques remarques judicieuses (que j’avais déjà commentées sur l’article DEBKA) à savoir une éventuelle concurrence entre la Russie et les USA sur le marché iranien, que ce soit -essentiellemnt- des armes ou de la technologie. Comme le note l’auteur de cet article, l’Iran a parfaitement bluffé l’Occident, surtout grâce aux USA. Toutefois, je ne cesse de le répéter, et comme le souligne DEBKAfile, les Iraniens ne sont pas encore capables de s’approprier la technologie adéquate pour utiliser des systèmes ultra-sophistiqués, de ce fait, la livraison de S-300 dans un futur indéterminé, ne gênera pas Israël, car il y beau temps que ces missiles sont connus des services de Tsahal (peut-être même avec la complicité des services spéciaux russes qui collaborent depuis de nombreuses années) et ne consituent aucune menace. Par contre les photos montrent la version S-300 MK, qui elle, pourrait s’avérer un danger, mais cette version, ni l’Iran ni la Syrie n’en verra la couleur, à l’inverse de l »Egypte qui elle – le meilleur allié d’Israël – va en recevoir très rapidement.