Le groupe jihadiste État islamique (EI) semble en déroute après une série de défaites, à Kobané en Syrie et sur d’autres fronts en Irak, mais des analystes affirment que les batailles les plus dures restent à venir.

La bataille de Kobané « montre que des frappes aériennes intensives sur un espace réduit peuvent permettre de contenir l’EI », estime Aymenn Jawad al-Tamimi, analyste rattaché au Forum sur le Moyen-Orient, basé à Philadelphie.

« Les frappes ont été dévastatrices. L’EI a perdu beaucoup de combattants à Kobané », ajoute Patrick Skinner, expert au sein du groupe Soufan, spécialisé dans le renseignement. Selon les experts, les jihadistes ont perdu 1 200 combattants dans la bataille de Kobané et 6 000 au total depuis le début des frappes aériennes en août, selon des responsables américains. « Le groupe a perdu son élan » (…) affirme M. Tamimi. « En général, soit l’EI perd des territoires, soit il ne fait pas d’avancée, soit il doit reconquérir du terrain », comme lors de la perte de la ville stratégique irakienne de Baiji en novembre.

« Des bastions intacts »

L’EI doit également faire face à la résurgence d’un groupe jihadiste rival en Syrie, le Front al-Nosra, la branche d’el-Qaëda en Syrie. « L’EI a été soumis à une telle pression, ils ont vraiment passé de mauvais moments, alors qu’al-Nosra restait sous les radars », affirme M. Skinner.

Selon lui, el-Qaëda a réussi à intégrer d’autres groupes rebelles et se positionne pour être le principal groupe d’influence, quand les rebelles « modérés » entraînés par l’Occident entreront en jeu. Si le soutien aérien occidental a pu jouer un rôle crucial, les récentes victoires contre l’EI sont surtout dues aux forces du cru : à Kobané, avec les miliciens des Unités de protection du peuple (YPG), au Kurdistan irakien avec les peshmergas, à Diyala avec les milices chiites, soutenues par l’Iran. « Le contrôle de l’EI sur ses principaux bastions en Syrie et en Irak reste intact, car il n’y a pas de forces locales pour les affronter, comme à Mossoul », souligne M. Tamimi. Et comme la formation de l’armée irakienne et des groupes sunnites prendra du temps, selon les analystes, certains pays arabes sunnites avancent l’idée d’une intervention étrangère, une option pourtant écartée par la coalition et l’Irak.

Les frappes insuffisantes

« Nous ne pensons pas que les progrès soient si importants, car les frappes aériennes sont insuffisantes », tempère à l’AFP un haut responsable d’un pays de la région, sous le couvert de l’anonymat. S’exprimant après la conférence de la coalition la semaine dernière à Londres, ce responsable a indiqué que son pays avait proposé d’envoyer des troupes au sol, une offre refusée par Bagdad. « La pire chose qui pourrait arriver et que Mossoul (…) soit libérée grâce aux frappes aériennes et une offensive au sol menée par les milices chiites, sans implication des sunnites », estime-t-il.

Patrick Skinner souligne qu’« il a fallu 10 000 soldats américains pour prendre Falloujah » aux combattants sunnites en 2004, alors que la ville irakienne « est beaucoup plus petite que Mossoul ».

En Syrie, « il a fallu 112 jours aux YPG et à la coalition pour déloger l’EI de Kobané, qui fait 6 km2 », rappelle Rami Abdel Rahmane, directeur de l’Observatoire syrien des droits de l’homme (OSDH). « L’EI contrôle environ 35 % du territoire syrien (…) Combien de temps faudra-t-il pour le déloger de Raqqa, Deir ez-Zor et d’autres villes ? » demande-t-il.

 L’Orient le Jour

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